Devoir de Philosophie

Peut-on définir objectivement ce qui est bien et ce qui est mal, juste ou injuste?

Publié le 23/01/2012

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Au sens le plus général du terme, être juste envers quelqu'un, c'est le traiter comme il convient, lui accorder ce qui lui revient de façon légitime. Une société juste est donc celle qui attribue à ses membres ce qui leur revient légitimement. Dans les sociétés libérales, on considère que ce qui revient légitimement à chacun, c'est fondamentalement un ensemble particulier de droits - les droits de l'homme: l'égalité et la liberté. Au sens juridique du terme, une "liberté" est une autorisation légale de faire, de dire ou de penser ceci ou cela. Les hommes devraient ainsi tous également disposer de la liberté de mener la vie (professionnelle, amoureuse, politique, religieuse…) qu'ils souhaitent, tant qu'ils n'empiètent pas sur la liberté d'autrui.

NB: en français, le "libéralisme" est le plus souvent interprété comme une doctrine économique qui prône le moins de régulation possible du marché par l'Etat. En réalité, le libéralisme est une doctrine plus globale qui prône l'attribution d'un nombre étendu de libertés (la liberté économique n'étant qu'une liberté parmi d'autres). 

« alors traite- bien les autres", "si tu veux verser moins d'impôts, fais des dons à une association caritative") ou sur des émotions comme la sympathie, la pitié, dont certains animaux sont peut -être capables et qui sont intéressées jusqu'à un certain point (l a sympathie implique le plaisir de faire plaisir, la pitié l'effort pour supprimer un sentiment désagréable, etc.) L’homme et l’homme seul serait donc capable de concevoir vs ressentir un impératif catégorique qui commande un comportement moral non calculé, désintéressé.

NB: l'impératif moral que tout homme conçoit plus ou moins distinctement est pour Kant une "obligation morale" ou un "devoir moral", mais il ne faut pas entendre "obligation" ou "devoir" au sens péjoratif du terme, comme lorsqu'on nous impose de l'extérieur de faire ou de penser quelque chose à quoi on n'adhère pas.

L'obligation morale n'est pas une contrainte à proprement parler, parce que même si je me sens en un sens "forcé" de bien agir, au sens où cela peut impliquer pour moi certains sacrifices, j'adhère intérieurement à l'obligation morale que je conçois.

En outre, en suivant cette obligation, je fais quelque chose de grand et de noble, quelque chose dont aucun animal n'est capable, et je manifeste par là au plus haut point ma liberté de choix, ma capacité à résister à mes pulsions et mes tendances bestiales.

Bien sûr il m’arrive d’instrumentaliser ou de maltraiter autrui au gré de mes désirs, mais ce qui fait ma dignité, c’est que je SAIS que ce n’est pas bien.

Même le pire criminel le sait, dit Kant.

Donc même si quelqu’un ne respecte pas la personne d’autrui, ce n’est pas une raison suffisante pour ne pas respecter sa personne: il faut respecter la dignité des méchants aussi bien que des bons, car tout homme, bon ou méchant, a une même dignité.

Les méchants eux -mêmes doivent donc bénéficier des mêmes droits que les bons.

Pour Kant, l'impératif catégorique que tout homme conçoit plus ou moins clairement ne l'est ni sous l'effet d'émotions plus ou moins instinctives, ni sous l'eff et pur et simple de l'éducation.

S’il relevait simplement des émotions, si l’homme était porté à faire le bien sous l’effet de sentiments moraux plus ou moins instinctifs (comme la sympathie ou la pitié), il agirait en "animal moral" lorsqu’il ferait le bi en : cela ne suffirait pas à lui conférer une valeur particulière ou dignité (l’animal étant lui aussi capable de sympathie).

Si le fait de concevoir l’impératif catégorique résultait simplement de l’éducation comme conditionnement socio- culturel, si le "tu dois…" moral que je conçois n’était que l’intériorisation de la contrainte éducative, la soi -disant "moralité" humaine ne serait que l’effet d’une sorte de dressage.

Là encore, cela ne saurait conférer à l’homme une valeur particulière (car les animaux aussi peuvent être dressés à ne pas mordre…).

C'est pourquoi Kant soutient que l'impératif catégorique est "inscrit dans la raison humaine" et que l'éducation aide simplement à en prendre conscience.

Le premier problème concerne la justification du principe du respect de la dignité humaine.

On ne voit pas bien en quoi l’impératif catégorique serait "rationnel", et donc contenu dans la raison de tout homme.

Il n’est pas vraiment évident pour tous les hommes.

En outre, l'impératif catégorique ne peut pas être démontré à proprement parler.

Kant suggère parfois qu’il serait "irrationnel" de vouloir que le vol, le mensonge, le meurtre...

soient autorisés, et que donc il est "rationnel" de respecter l’impératif catégorique, mais en quel sens est -ce "rationnel" ? S i c’est au sens de la raison calculatrice individuelle (j’ai intérêt à vivre dans une société où le meurtre est interdit), l’impératif catégorique n’est pas vraiment moral mais intéressé, et il n’est pas vraiment catégorique (il pourrait être rationnel pour moi de l’enfreindre parfois, dans mon propre intérêt).

Si c’est au sens de la raison calculatrice collective (les conséquences sociales de l’adoption du principe sont pertinentes), ce n’est toujours pas un impératif moral au sens kantien, car pour Kant, ce ne sont pas les conséquences globales qui comptent mais le respect du principe lui -même : il devrait être respecté même si les conséquences globales étaient défavorables.

Kant en est donc réduit à postuler l'existence d'une partie de la raison qu'il appelle "raison pratique", distincte de la raison calculatrice; qui contiendrait une sorte de règle ("tu dois…"); pas tout à fait évidente, mais dont on a une conscience spontanée plus ou moins confuse; qu'une mauvais éducation morale peut obscurcir; qu'une bonne éducation contribue à éclaircir - sans qu'il faille y voir un conditionnement quelconque, mais un éveil à la moralité véritable.

Cette hypothèse est aussi tortueuse qu'invérifiable.

Pour les anthropologues culturalistes d’aujourd’hui (qui pensent que les idées morales des hommes leur viennent par imprégnation culturelle), la morale est le pur produit de l’éducation, et l’obligation morale intérieure que l’homme ressent face à certains principes moraux (très variables selon les cultures) n’a rien de vr aiment rationnel : elle est l’intériorisation de la contrainte éducative, le fruit d'un conditionnement précoce plus ou moins implicite.

Pour les psychologues évolutionnistes (qui pensent que l’homme a hérité de son évolution biologique des instincts le di sposant à certaines formes d’altruisme), l’homme est naturellement animé d’un certain nombre de sentiments moraux comme la sympathie, la pitié, qui le dissuadent (parfois) d’user des autres hommes comme de simples choses, mais ces sentiments ne l’amènent pas à admettre l’impératif catégorique kantien: s’il y a un impératif "moral" naturellement inscrit en l’homme, ce serait plutôt un impératif du type "aime / sois bon avec ceux qui ont été bons avec toi, méchant avec les méchants, et désintéresse toi des autres", et ce principe trouve ses principales racines dans des sentiments moraux, pas dans la raison.

La notion de "devoir" est peut -être biologiquement inscrite dans la psychologie humaine, elle n’est peut -être pas le simple effet d’un conditionnement soci al, mais elle n’est pas rationnelle à proprement parler, et elle ne suffit toujours pas à introduire une différence qualitative absolue entre l’homme et l’animal.

En obéissant à son instinct du devoir, l’homme adopte donc un comportement partiellement irrationnel et ce faisant, il se comporte en animal jouet de ses instincts tout autant que lorsqu’il suit la voix de l’intérêt personnel.

Pourquoi cela confèrerait -il à l’homme une valeur spéciale ? Pour le dire brièvement, les sciences sociales comme les scie nces biologiques ont aujourd'hui tendance à saper l’idée d’une dignité intrinsèque de l’homme (même si ce n'est pas leur objectif de départ…).. »

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