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Peut-on accepter la loi de la majorité si l'on refuse la loi du plus fort ?

Publié le 08/12/2005

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Je tâcherai d'allier toujours, dans cette recherche, ce que le droit permet avec ce que l'intérêt prescrit, afin que la justice et l'utilité ne se trouvent point divisées. » (Livre I, Préambule) Ce préalable pose donc que renoncer à la loi du plus fort ne signifie pas admettre n'importe quel règne ou n'importe quel régime pour se substituer à lui. Si la liberté et l'égalité ne sont pas assurées par le peuple souverain envers lui-même, ou si des intérêts particuliers font que le pacte est divisé ou aliéné alors c'est l'état de nature primitif qui reprend ses droits. Rompre ce pacte sera faire que « l'état de nature subsisterait, et l'association deviendrait nécessairement tyrannique ou vaine ». Troisième partie : La démocratie Dans Du contrat social, Rousseau établit que la démocratie repose sur un pacte garantissant l'égalité et la liberté. Ce pacte est contracté entre tous les participants, c'est-à-dire l'ensemble exhaustif des citoyens. Dans le pacte social, chacun renonce à sa liberté naturelle pour gagner une liberté civile. La souveraineté est un principe fort du contrat social. L'indivisibilité de cette souveraineté est un autre principe fort, par lequel il faut comprendre que chacun appartient au Souverain et ne peut s'en séparer par intérêt personnel, car l'intérêt personnel est contraire à la recherche de l'intérêt général, seul objectif du contrat social. Ce contrat social, cet état de la société démocratique, Rousseau le voit comme faisant suite à l'état de nature.
La question posée sous-entend que la majorité implique un rapport de force avec la minorité et que par conséquent c'est elle qui détient le pouvoir. Mais ne peut-on pas être en majorité tout en étant soumis à une minorité ? La loi du plus fort ainsi n'aurait rien à voir avec la quantité mais plutôt avec ses moyens d'actions. Tout le monde se voit contraint à accepter la loi de la majorité puisque chaque individu se trouve en minorité par rapport au pouvoir politique, par exemple. Mais cependant l'obéissance à la majorité est un choix puisqu'elle découle d'un vote démocratique.
 

« Les arguments de Calliclès Faite par la masse, la loi en exprime forcément les intérêts et les valeurs.

Elle n'est donc universelle qu'enapparence.Cette loi est un instrument d'oppression non par la force mais par un mécanisme d'intériorisation.

Elle n'estdonc juste qu'en apparence.Les valeurs prônées par cette loi n'ont pas de réalité propre : elles consistent dans le retournement axiologiquede la réalité de la force, et l'égalité de droit n'est que la dénégation de l'inégalité de fait.

Elle est donc sansconsistance.Les meilleures dispositions sont laminées par l'éducation égalitariste.Le vrai droit est celui de la nature qui est foncièrement inégalitaire.

En effet, il est universel, nécessaire,irrécusable.Cette fausse loi sous laquelle nous vivons est intrinsèquement fragile, puisqu'elle se maintient en s'appuyantsur un verbiage sans répondant, et grâce à l'absence momentanée d'un individu suffisamment fort pour larenverser en lui et hors de lui. Discussion de chaque argument Calliclès confond expression et représentation.

S'il est vrai que les lois représentent la masse, elles ont uneréalité qui ne lui est pas réductible.

La vraie question est donc celle de la spécificité du politique : un ordred'existence que son absence de répondant réel n'autorise pas à qualifier d'illusoire.Calliclès suppose que l'homme est un être sorti tout constitué de la nature, c'est-à-dire qu'il est un simplevivant, alors qu'il est le produit des lois.

Il est donc absurde de considérer que les lois l'oppressent : elles leconstituent comme sujet.L'égalité conditionne l'idée même de loi, à la fois parce qu'elle doit être la même pour tous et qu'elle effectue laforme même de la réflexion, puisque réfléchir revient à se poser soi-même comme un sujet indifférent c'est-à-dire juridiquement égal aux autres.

La loi a la consistance de la réflexion, acceptée par le discours de Calliclèsen tant que c'est un discours et non un pure violence.La cité, dit Aristote, exclut aussi bien ceux qui sont trop inférieurs (bestialité) que ceux qui sont tropsupérieurs (les dieux, les héros), puisqu'il est impossible à l'individu moyen de se reconnaître en eux.

Touteéducation a donc bien une dimension de dressage à la " semblance " (être le même que soi parce qu'on s'estsoumis à ce qui rassemble les semblables) c'est-à-dire à la médiocrité.

Cependant les dispositionsexceptionnelles ne sont pas naturelles mais humaines (l'idée d'un gène de la musique, de la philosophie ou desmathématiques est absurde, puisque ce sont des réalités exclusivement culturelles) : les " dons " sont desattitudes envers le monde et surtout envers soi-même (une éthique) motivées par une situation en fin decompte toujours sociale.

Dès lors si la vie commune peut parfois étouffer de grandes individualités potentielles,elle est cependant le seul lieu de leur possibilité.

En réalité le danger reste très minime : être une personnalitéd'exception étant une question d'éthique et non pas de nature, autrement dit la semblance étant une positionsubjective et non un état objectif, il faudrait des circonstances extrêmement particulières et rares pour qu'unindividu ne soit pas totalement responsable de sa vie.

Donc même si l'on admet cette absurdité que constituel'idée d'un don naturel, l'argument de Calliclès qui attribue cette responsabilité à la société reste sans portéeréelle.Calliclès confond le fait et le droit : la nature atteste de ce qui est, pas de ce qui doit être.

Quand il s'agit deslois de la cité, son invocation est donc nulle par principe.

D'autre part il confond l'universalité des lois de lanature qui est absolue ou a priori (si on ne la pose pas l'idée même de nature n'a aucun sens, et avec elle lasimple éventualité du savoir) et celle des lois de la cité qui est relative ou réflexive (c'est le rapport du peupleà lui-même).

Autrement dit il confond la réalité où s'effectue la nécessité des lois de la nature avec lareprésentation où s'effectue celle des lois de la cité.La culture n'a pas de répondant et c'est précisément en cela qu'elle s'oppose à la nature : l'arbitraire n'est passa faiblesse mais sa force, puisqu'on peut seulement contester ce qui se présente comme fondé.

On n'obéitdonc pas à la loi parce qu'elle est utile, mais simplement parce que c'est la loi.

Voulant fonder la loi dans laréalité, Calliclès l'abolit donc : il n'y aurait plus que la nature.

Mais il réfute lui-même la thèse que cela pourraitconstituer en prônant le droit du plus fort en déplorant un pouvoir que les faibles exercent...

pour la seuleraison qu'ils sont momentanément les plus forts.

On comprend ainsi que ce n'est pas du tout de la nature qu'ilparle : devant être imposée d'une manière volontaire et non par la seule immanence de sa nécessité, cette "nature " est en réalité purement idéologique, comme à chaque fois qu'on veut y voir un modèle.

Dès lors, lavérité de son argumentation apparaît à la fin du texte : il veut seulement un maître, grâce auquel il sera enfindébarrassé de sa liberté en se dissolvant dans la semblance universelle. Conclusion Ce discours, paradigme de tout recours à la nature pour décider des affaires humaines, est un exemple deméconnaissance projective : celui qui veut un maître attribue aux autres une nature d'esclaves ! La servitudevolontaire est le mobile caché de toute invocation d'un modèle naturel.

La méthode généalogique se retournecontre Calliclès. Deuxième partie : Limites de la loi du plus fort. »

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