Peut-il être raisonnable de désobéir à la loi ?

« Il est souvent arrivé qu'un sans-abri, pour ne pas mourir de faim, soit obligé de voler.

Evidemment, dans son espritc'était compréhensible et défendable, pourtant son acte a été puni par la loi.

Il était donc, pour lui, raisonnable dedésobéir mais cette désobéissance s'est avérée déraisonnable.

Ce qui peut donc nous amener à nous demander s'ilpeut être raisonnable de désobéir à la loi. Semble-t-il intéressant de désobéir à la loi? Mais de quelles lois parlons-nous? Nous verrons dans une première partie, dans quelles conditions les individus désobéissent à la loi et dans unedeuxième partie nous verrons que dans la réalité, il n'est jamais raisonnable de désobéir à la loi. Tout d'abord, la nature de la loi elle-même sous-entend que la désobéissance est possible (car l'hommepeut être possédé par ses sentiments, ses penchants, ses passions), sinon il n'y aurait pas besoin de prévoir dessanctions. Dans quelles circonstances les individus désobéissent-ils à la loi (prescription établie par l'autorité souveraine de l'Etat, applicable à tous et définissant les droits et les devoirs de chacun )? Certaines circonstances sont telles que l'obéissance habituelle à la loi semble pouvoir être momentanément suspendue à cause du caractère exceptionnel dela situation.

Prenons l'exemple d'un médecin qui ne dirait pas la stricte et dure vérité à son malade condamné.

Lefait qu'il désobéisse à la loi (qui est ici surtout une loi morale: une règle, une obligation, une "contrainte" qui, sansêtre édictée par un législateur, s'impose à un individu dans son comportement) se justifie par le souci du médecin dene pas faire souffrir psychologiquement son malade. En fait, c'est parce qu'il veut respecter le malade qu'il transgresse la loi.

Mais évidemment, inconsciemment, nouspouvons dire que le médecin ne veut pas souffrir en voyant souffrir son malade, sentiment correspondant ici à lapitié.

Il y a en fait deux causes de l'obéissance: une cause sensible du fait de l'existence d'un mobile et une causemorale du fait de l'existence d'un motif.

Donc, d'après cet exemple, nous pouvons considérer que c'est la raison dumédecin qui l'a poussé à ne pas suivre la loi, ou bien son intérêt personnel. Nous pouvons également prendre l'exemple d'un citoyen dont l'Etat est en guerre, il est alors de son devoir de faire la guerre.

Il sait qu'il sera amené à tuer, acte qu'il considère allant à l'encontre de la loi civile ou morale quiinterdit de tuer, pour défendre son pays ou des valeurs qui méritent d'être défendues.

Lors de cette guerre, il vajouer le "rôle du soldat" et c'est pourquoi il peut s'autoriser à désobéir à la loi, car il obéit à la raison du soldat quiest de défendre son pays.

Là aussi, la désobéissance à la loi peut être due à l'intérêt personnel, à la raison dutransgresseur.

Par ailleurs, si ses valeurs morales l'empêchent de jouer le rôle du soldat, la véritable questiondeviendrait: serait-il raisonnable qu'il déserte? Ensuite, un individu peut désobéir à la loi lorsque celle-ci est énoncée en fonction de principes ou de buts qui contredisent les valeurs auxquelles adhère l'individu.

Prenons l'exemple de la tragédie Antigone.

Antigone est l'héroïne qui défend les lois "non écrites" du devoir moral contre la fausse justice de la raison d'Etat.

Son frère a ététué en attaquant sa propre Cité, elle réclame alors qu'il y soit enterré, au nom de lois "qui ne dépendent pas de lavolonté des hommes".

Mais Créon, son père et roi de la Cité s'y oppose au nom de la loi interdisant d'enfouir ceuxqui ne respectent pas la loi de la Cité.

Pour Antigone, il y a une injustice et c'est pour cela qu'elle désobéit.

C'estdonc selon sa propre raison qu'elle "viole" la loi.

La loi morale est nécessaire, elle pourrait être la seule car chaqueindividu sait ce qui est juste et bien. Mais l'homme est moralement faible, c'est-à-dire qu'il n'arrive pas à faire le bien, il a donc besoin d'une autoritéextérieure pour le contraindre, pour le remettre dans le droit chemin.

La loi civile se justifie par les contraintes. »