Pensez-vous que l'individu puisse créer librement ses valeurs ?
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
c'est d'être un pont, et de n'être qu'un but.
[...] Ce que je puis aimer chez l'homme, c'est qu'il est un passage et undéclin.
»Zarathoustra enseigne non pas une vérité, mais un vouloir : « Que dise notre vouloir : soit le Surhomme le sens dela terre ! » Il n'enseigne pas une doctrine susceptible d'être vraie ou fausse, que l'on pourrait adopter ou réfuter.
«C'est une volonté nouvelle que j'enseigne aux hommes.
» Il enseigne une certaine qualité de la volonté qui nous metà même de renoncer enfin à toutes les « demi-volontés ».
« Ah ! Puissiez-vous rejeter tout votre demi-vouloir, etvous décider résolument pour la paresse ou l'action ! Ah ! Puissiez-vous entendre ma parole : faites ce que vousvoudrez, mais soyez d'abord ceux qui peuvent vouloir ! » Peu importe que l'on veuille ceci ou cela : seul compte lefait d'être capable d'authentiquement vouloir quelque chose.
Le nihilisme menace en effet l'essence même de lavolonté : comment et pourquoi vouloir quelque chose si au fond tout se vaut, c'est-à-dire que rien ne vaut ?L'éternel retour va avoir pour conséquence de donner pour contenu à la volonté le devenir lui-même. Telle sera l'opinion de Sartre.
Le «néant» qu'il oppose à l' « être », dans unouvrage célèbre, n'est pas autre chose que la valeur jaillie d'un libre projet etqui apparaît d'abord comme un idéal absent du monde et nié par lui ; mais àpartir de cet idéal, l'homme va contester, « nier » ce qui existe et transformerle monde.
Ainsi l'homme est « ce par quoi les valeurs surgissent dans lemonde ».
La liberté humaine est l'acte même de poser des valeurs.
L'inventiondes valeurs est d'ailleurs un acte strictement individuel.
Pendant l'occupationallemande un ancien élève de Sartre était venu le consulter.
Resterait-il enFrance pour travailler et faire vivre sa mère sans ressources ? Ou irait-il enAngleterre poursuivre la lutte contre l'envahisseur ? Sartre répond que cejeune homme doit choisir lui-même sa voie et décider de ses valeurs.
Lacréation des valeurs est un acte personnel.
Nul ne peut l'assumer que poursoi.
Jamais nousn'avons étéaussi libresque sousl'occupationallemande.(Situations,III)
Sartre ne prétend nullement quel'occupation allemande aurait étépropice à la liberté politique.
C'estde la liberté au sens métaphysiquedu terme qu'il s'agit ici.
Être librec'est être capable de dire non, derefuser une situation.
L'occupationallemande est un de ces momentsde notre histoire où notre attitudeavait une pleine signification.Accepter c'était être complice,refuser, devenir résistant c'étaitrisquer la torture et la mort.
C'estdonc une de ces situations limitesoù les choix ne peuvent qu'êtreauthentiques.
La liberté ne semesure pas dans les situations sansrisque mais dans celles où notreresponsabilité et ses conséquencessont pleinement engagées.
Cependant, il ne semble pas que l'expérience que la conscience fait de la valeur justifie l'interprétation sartrienne.Revenons à l'exemple très habile de Sartre.
Évidemment on conçoit qu'entre le devoir d'assistance filiale et le devoirpatriotique il ne puisse être question que d'un choix en quelque sorte gratuit.
Mais Sartre a pris la précaution denous proposer en exemple deux valeurs d'égale dignité.
Supposons que le jeune homme ait hésité entre le projetd'aller rejoindre les forces armées et le projet de faire du marché noir ou de piller des centres de réfugiés.
Ici, il n'estplus question de choix gratuit et la distinction du bien et du mal s'impose à nous de l'extérieur.
J'éprouve le bien etle mal, la beauté et la laideur comme je distingue le rouge et le bleu.
La valeur s'impose à moi et Hartmann remarqueà juste titre qu'on ne peut pas provoquer arbitrairement un seul sentiment de valeur.En outre, je distingue spontanément la valeur esthétique d'une oeuvre ou bien la valeur morale d'une conduite, entant qu'essences objectives de mon aptitude personnelle à les reconnaître, de mon désir propre de les réaliser.
Parexemple, j'affirme la très hautevaleur du théâtre de Racine ou de la musique de Bach, mais je ne ressens pas cette valeur de la même manière àtout moment ; je peux après une journée de travail pénible préférer voir un film de Hitchkock plutôt qu'unereprésentation de Britannicus, je continue cependant à affirmer que la tragédie a « plus de valeur ».
Il est vrai qu'ontrouverait des hommes incultes pour déclarer qu'un bon roman policier a plus de valeur qu'une oeuvre de Racine,qu'une ritournelle à la mode a plus de valeur qu'une fugue de Bach.
Ils expriment par là que le roman ou lachansonnette leur donnent plus de plaisir.
Seulement l'expérience subjective du plaisir est sans commune mesureavec la reconnaissance d'une valeur esthétique et morale.
Les sentiments que nous éprouvons ne sont pas lamesure des valeurs.
Ce sont au contraire les valeurs qui servent de mesure pour apprécier notre sensibilitéesthétique ou notre délicatesse morale.
Il ne suffit pas, dit Le Senne, « qu'un homme éprouve le désir de tuer pourque le meurtre devienne une valeur » ! Si le subjectivisme est logique avec lui-même, il aboutit inévitablement à la.
»
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