PASCAL ET L'ART DE PERSUADER
Publié le 12/07/2011
Extrait du document
L'espérance qui guide la conversion est avant tout l'attente de cette grâce par laquelle le Dieu parié devient le Dieu sensible au cœur. Dieu se manifeste dans l'histoire par des signes qu'il revient à la liberté de l'homme d'interpréter. Les miracles et les prophéties assurent la perpétuité pour la permanence absolue du dialogue entre l'homme et Dieu. Nous pouvons de christocentrisme, pour se comprendre soi même le monde, les écritures, il faut toujours avoir en la pensée l'incarnation par laquelle la mort passe à la vie, le temps accueille l'éternité et le péché se résout en salut. Mais pour Pascal, il n'y a pas de philosophie chrétienne. Dieu par le directement au cœur à l'intérieur même de l'être, par la grâce, et de l'extérieur par les signes. Mais la grâce et les miracles sont surnaturels, c'est le mystère de Dieu. En le christ, l'homme voit son image, son espérance.
«
ART DE CONVAINCRE, ART D'AGRÉER
Il y a deux genres de principes, car il y a deux facultés par où « les opinions sont reçues dans l'âme » :
l'entendement et la volonté.
Chacune a les siens : pour l'esprit, des « vérités naturelles et connues à tout le
monde » et pour la volonté, « certains désirs naturels et communs à tous les hommes, comme le désir d'être
heureux, que personne ne peut pas ne pas avoir, outre plusieurs objets particuliers que chacun suit pour y
arriver, et qui, ayant la force de nous plaire, sont aussi forts, quoique pernicieux en effet, pour faire agir la
volonté, que s'ils faisaient son véritable bonheur ».
L'ART DE PERSUADER EST -IL IMPOSSIBLE !
Si l'homme était raisonnable, il ne suivrait dans la recherche des vérités naturelles que ce qui découle des
principes de l'entendement ; en réalité, il suit plutôt son plaisir et ne croit guère que ce qui lui est agréable :
on admet facilement une vérité plaisante, mais si elle déplaît, l'homme « suit par un choix honteux et
téméraire ce qu'une volonté corrompue désire, quelque résistance que l'esprit trop éclairé puisse y opposer ».
Par suite l'art de persuader comporte d'abord un art de convaincre qui s'adresse à l'entendement, et un art
d'agréer pour les principes du plaisir.
Il suppose qu'on connaisse « l'esprit et le cœur » de l'interlocuteur, «
quels principes il accorde, quelles choses il aime ; et ensuite remarquer, dans la chose dont il s'agit, quel
rapport elle a avec les principes avoués, ou avec les objets délicieux par les charmes qu'on lui donne ».
Pour
l'esprit, la méthode géométrique suffit.
Pour l'agrément, « la part que nous pouvons prendre aux choses étant
de deux sortes (car ou elles nous affligent, ou elles nous consolent) », Pascal « croyait qu'il ne fallait jamais
affliger qu'on ne consolât, et que bien ménager tout cela était le secret de l'éloquence » (Vie).
L'INCONSTANCE HUMAINE
Mais pour appliquer cette règle générale, il faudrait que les principes du plaisir fussent fermes et constants.
Or
ils ne le sont pas ; ils apparaissent au contraire « divers en tous les hommes, et variables dans chaque
particulier, avec une telle diversité qu'il n'y a point d'homme plus différent d'un autre que de soi -même dans
les divers temps.
Un homme a d'autres plaisirs qu'une femme ; un riche et un pauvre en ont de différents ; un
prince, un homme de guerre, un marchand, un bourgeois, un paysan, les vieux, les jeunes, les sains, les
malades, tous varient ; les moindres accidents les changent », écrit Pascal dans L'Esprit géométrique.
La nature de l'homme a « ses allées et venues » (L.27, L.61) ; « Peu de chose nous console parce que peu de
chose nous afflige » (L.43, S.77).
« On croit toucher des orgues ordinaires en touchant l'homme.
Ce sont des
orgues à la vérité, mais bizarres, changeantes, variables » (L.55, S.88), dont on ne sait où sont les touches.
Le seul fait de s'adresser à un interlocuteur le change : « Qu'il est difficile de proposer une chose au jugement
d'un autre sans corrompre son jugement par la manière de la lui proposer.
Si on dit : je le trouve beau, je le
trouve obscur, ou autre chose de semblable, on entraîne l'imagination à ce jugement ou on l'irrite au contraire.
Il vaut mieux ne rien dire, et alors il juge selon ce qu'il est », ou plutôt « selon ce qu'il est alors et selon que
les autres circonstances dont on n'est pas auteur y auront mis » ; de toute manière, même le silence fait «
aussi son effet, selon le tour et l'interprétation qu'il sera en humeur de lui donner, ou selon qu'il le conjecturera
des mouvements du visage » (L.529, S.454).
Conclusion paradoxale : il existe assurément « des règles aussi
sûres pour plaire que pour démontrer », qui permettraient de « se faire aimer des rois et de toutes sortes de
personnes », mais l'inconstance humaine les rend impossibles à trouver.
L'art d'agréer est une pratique aveugle, où l'on procède par intuition et non par théorie.
Ceux qui en sont le
mieux instruits sont les honnêtes hommes semblables à Méré, qui ont compris que l'on plaît à autrui en
dissimulant le moi qui pourrait le gêner.
Pascal s'en fait l'écho : « L'homme est plein de besoins.
Il n'aime que
ceux qui peuvent les remplir tous.
C'est un bon mathématicien, dira - ton, mais je n'ai que faire de
mathématique : il me prendrait pour une proposition.
C'est un bon guerrier : il me prendrait pour une place
assiégée.
Il faut donc un honnête homme, qui puisse s'accommoder à tous mes besoins également » (L.605,
S.606).
Mais cela est plus facile à dire qu'à faire.
■ Simple dans ses fondements, l'art de persuader est difficile, voire impossible dans la pratique.
Ce n'est pas
sans avoir mesuré les difficultés de ce que la Logique de Port-Royal appelle la « véritable rhétorique » que
Pascal s'y essaiera dans les Provinciales et les Pensées.
La doctrine de L'Art de persuader : la démonstration et le coeur
L'art de persuader : l'entendement et la volonté
La première moitié du XVIIe siècle est dominée par la mathématisation de la pensée et par la figure de.
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