Pascal écrit dans ses Pensées que « nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais ». Dans quelle mesure une telle affirmation vous permet-elle de rendre compte de votre lecture de La Vie heureuse, d'Oncle Vania, et du Chercheur d'or?

« du bonheur que suppose sa recherche (car pourquoi chercherait-on moinsqu'un idéal ?), d'autre part la structure même du temps humain.

II fautdonc apprendre à vivre sans se disposer « toujours à être heureux », pourespérer de l'être. 2.

LA NÉCESSITÉ DE VIVRE POUR ÊTRE HEUREUX a.

La vie comme lieu du bonheur.

La vie peut devenir heureuse quand on oublie sa recherche. L'utopie naturelle omniprésente dans Le Chercheur d'or s'accompagne souvent d'un abandon par le narrateur de la réflexion : c'est bien le projet qui empêchede vivre. b.

Cesser de se disposer à vivre : reconquérir le présent.

Il faut donc accepter de vivre au présent. Conseil théorique de Sénèque dans La Brièveté de la vie, pratique de Sénèque dans La Vie heureuse : le lien étroit du dialogue avec la situation présente de Sénèque (et la situation politique de l'Empire, notamment avec la critique deNéron sous le masque de Jupiter) s'explique par son thème même. Il peut aussi s'agir, dans une version plus pessimiste, de refuser d'abandonner leprésent : c'est le suicide évité de Vania. c.

Vivre en éprouvant sa vie.

Mais cette vie au présent ne doit pas être vécue par défaut : il faut accepter de l'investir pleinement. La vie que propose Sonia à Vania n'est pas pour autant une vie vide : c'est aucontraire une vie de labeur, dans laquelle il s'agit d'oeuvrer, à la différence del'existence stérile de Sérébriakov, ce « perpetuum mobile de la plume » (p.

23). La vie d'Alexis à la fin du Chercheur d'or, pour être modeste et dépouillée, n'en est pas moins intense, comme le prouve le fait qu'il est envahi par « le bruitvivant de la mer » (p.

374). Conclusion/transition : C'est alors le concept même de recherche qu'il faut modifier, pour que la recherche du bonheur aboutisse. 3.

UNE QUÊTE HEUREUSE? a.

Le bonheur de la recherche.

La recherche elle-même peut-être heureuse, si on accepte de la vivre pour elle-même. Le bonheur marin d'Alexis témoigne de cette possibilité de vivre pleinement saquête, dès lors que cette quête n'est pas soumise à un but qui la dépasse etsans quoi elle n'est rien : « je vais vers l'espace, vers l'inconnu, je glisse aumilieu du ciel, vers une fin que je ne connais pas » (Le Chercheur d'or, p.

142). Sonia propose, en même temps qu'un avenir de travail, une communautéeffectivement présente àVania : au moins, il n'est pas seul (« Nous allons vivre,oncle Vania, toi et moi », p.

98). b.

Mais c'est au prix d'un basculement.

Le bonheur alors gagné n'est pas le bonheur initialement prévu. Sénèque abandonne l'idéal inatteignable du sage. — Alexis abandonne le trésor du corsaire. Sonia et Vania abandonnent les espoirs amoureux qu'ils avaient respectivementnourris, et Vania est appelé, dans la tirade finale de Sonia, à renoncer à sonrêve de « vie nouvelle » (cf.

Astrov : « Une vie nouvelle, tu parles ! », p.

87). Ce que nécessite donc une quête heureuse, c'est un contact nouveauavec la vérité : une lucidité qui peut, aussi, être douloureuse.. »