Panorama de la philosophie française au XXe siècle
Publié le 14/07/2011
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Théoricienne de la libération de la femme, Simone de Beauvoir publieen 1949 le Deuxième Sexe qui fait scandale. Elle y dénonce avecvirulence la condition féminine, marquée par l'aliénation : la femme est l'Autre, elle ne se définit que par rapport à l'homme et reste enfermée dans une définition sclérosée et réductrice.
La femme, « cette inconnue «, est une construction sociale, nourrie de mythes tenaces.La célèbre formule « On ne naît pas femme, on le devient « sera le mot d'ordre du féminisme.
• Le Deuxième Sexe (1949), Les Mandarins (prix Concourt 1954), Mémoires d'une jeune fille rangée (1958).
«
de l'épreuve (la mort, l'absence) parlafidélité qui est une grâce. Lafoi est une « fidélitécréatrice » qui rendpossibles toutes les autres fidélités.•Être etavoir (1935), leDéclin de la sagesse(1954), L'Homme problématique (1955).
LESTRUCTURALISME
Dans lesannées1960, le structuralismeremet encause l'existentialisme. Inaugurée par les linguistes Ferdinand
de Saussure (1857-1913) et Roman Jakobson (1896-1982), l'analyse structurale véhicule une nouvelle approche philosophique : il s'agit de faire apparaître les structures(linguistiques, sociales, politiques) sous-jacentes qui déterminentl'homme de part en part.
La liberté est uneillusion, voire une utopie.
Lesujet humain est détrôné, sinon dissous.
Claude Lévi-Strauss (né en 1908)
Agrégé dephilosophie, il s'en détourne
au profit de l'anthropologie, qu'il pratique envoyageant beaucoup.
Dansson enseignement au Collège de France, il théorise la méthodestructurale,qui accorde la primauté
du système sur les éléments.
Ilcherche
à dégager l'intelligibilité cachée des diverses formes del'activité symbolique :
les mythes, lacuisine, lesrelations de parenté répondent à une logique combinatoirecomplexe qu'il estpossible demodéliser. Il montre ainsi
que la « pensée sauvage», loin d'être
primitive, est aussi soucieuse d'ordre
et de systèmeque la pensée cartésienne.
Lévi-Strausscritiquel'humanismeoccidental,ethnocentrique
et impérialiste,
et prône une
approcherelativiste etculturaliste. •Les Structures élémentairesdelaparenté (1949), 7ns(es tropiques (1955), Anthropologie structurale (1958), LaPenséesauvage (1962), LeRegard éloigné (1983).
Michel Foucault (1926-1984)A partirde 1970, il occupe la chaire d'histoire des systèmesde pensée
du Collège deFrance. Il met en évidence les rapports de domination et de répression à l'œuvre
dans nos sociétés prétendument libres.
Ilanalyse lesmécanismes dupouvoir et
les dispositifs disciplinaires à l'œuvredans toutes lesstructures sociales: école, atelier, hôpital, prison. Toutes les sociétés modernes obéissent aumême «diagramme denormalisation ». Foucault énonce ainsi la « mort du sujet » : l'homme n'est que le lieudu langageet le produitdesstructures.•Histoire de la folie à l'âge classique (1961), iesMotset les Choses (1966), Surveiller etpunir (1975), Histoire delasexualité (1976-1984),
PHILOSOPHIE ETINCONSCIENT
Suspectée par Sartre d'être un alibicommode pour fuir ses responsabilités, lathéorie del'inconscient est au centre denombreux débats. L'héritage deFreud est tantôt prolongé, tantôt contesté.
Iacques Lacan (1901-1981)Médecin psychiatre etpsychanalyste, il entre dans la légende par sesséminaires dispensés àl'École pratique des hautes études, puis àl'École normale supérieure.
En 1964,ilfondel'École freudienne deParis qu'il dissout en 1980et remplace par la Causefreudienne.Ilprône le « retour à Freud », contrelapsychanalyse américaine qu'il accuse
d'en dénaturer le message. L'inconscient est structuré comme un langage. Letravail dupsychanalyste consiste àdéchiffrer etinterpréter les«dialectes de l'inconscient ». Derrièrelesignifiant,ilfaut retrouver lesignifiérefoulé.•Écrits (1966), Séminaires(1953-1980).
Gilles Deleuze (1925-1995)L'Anti-Œdipe, publiéen 1972 etcoécrit avec le psychanalyste Félix Cuattari (1930-1992), fait l'effet d'une bombe. L'inconscient est libérédes interprétations de la psychanalyse freudo-lacanienne
qui s'en tient auxfigures œdipienneset aux investissements familiaux.
Avec eux,au contraire, il est rapporté à tout unchamp social, économique et politique. Enréaction contre tous lesdiscours totalisants, Deleuze se veut attentif à
la différence, à l'événement, au devenir.
Ilconstruit ainside nouveaux concepts, dont le plus célèbre est celui de«machine désirante» pour qualifier l'homme.•Différence etrépétition (1969), L'Anti- Œdipe (1972), Mille plateaux (1980).
PHILOSOPHIE ETMARXISME
Considéré par Sartre comme « horizonindépassable », le marxismeest laréférence politique dominantejusqu'à la fin des années 1950. Demeurant l'outil privilégié del'analyse critique du capitalisme,il est néanmoins remisen cause par certains penseurs,avant
même la terrible révélation dugoulag.
Louis Althusser (1918-1990)Professeur àl'Ecole normale supérieure, ilexerce une influence déterminante sur les générationsfutures.Lacrise du « marxisme-léninisme » lui apporte l'idée d'un renouvellement profond de la théorie marxiste, dont ilaffirme lanature entièrement scientifique, enl'intégrant dans ladémarche structuraliste. Son but est de « sauver » le marxisme et d'en faire la base théoriquedusavoir contemporain.
• Pour Marx (1965), Lire LeCapital (1965), Réponse à John Lewis (1973).
Raymond Arqn(1905-1985)Philosophe etsociologue, il est l'analyste pertinent des mythes etidéologies politiques. Àcontre-courant
des idées dominantes de l'époque, ildémystifie les notions sacrées de l'intelligentsia de gauche : « prolétariat», « sens de l'histoire»,«révolution ».
Sa critique du dogmatismeet du totalitarisme
exercera une influence considérable. •Introduction à la philosophie del'histoire (1938), Démocratie ettotalitarisme (1965), Mémoires, cinquante ans de réflexion politique (1983).
Pierre Bqurdieu (1950-2002)
Philosophe etsociologue, il étudie
les stratégies sociales, plusou moins obscures, destinées à maintenirles rapports de dominationentreles classes.Son analyse des structures de
« reproduction »sociale fait apparaître lafaillite du système scolairedans sa fonction d'ascenseur social. •La Reproduction (1970, avec J.-C. Passeron), Ceque parlerveut dire (1982), LaDistinction (1979).
André Glucksmann (né en 1957)Aprèsavoir été maoïste, Glucksmann revient sur son engagement, entame
le virulent procèsdu totalitarisme et rallie les thèses ducélèbre dissident Aleksandr Soljénitsyne. •LaCuisinière et le Mangeur d'hommes (1975), LeXI'Commandement (1991).
PHILOSOPHAS CRITIQUESETDÉCONSTRUCTION
Dans les années 1960, commencel'èredu désenchantement : la crise des idéologies est le refletd'une crise majeure, celledes fondements delaculture occidentale.
Iacques Derrida (1950-2004)participe en1983 à la création du Collège international dephilosophie, dont il est le premier directeur.Véritable maître à penser auxÉtats-Unis,Derrida dénonce le systèmehiérarchiquecaractéristiquede la culture occidentale et propose de sortir de cette « clôturemétaphysique »,c'est-à-dire cette organisationdu monde qui a pour effetdejustifier l'ordre établi. Ilpropose ainsi une « déconstruction »minutieuseetsubtile de la métaphysique occidentale. La«grammatologie », ou science de l'écriture, sert de filconducteur à cette vaste entreprise. •L'Écriture etla Différence (1967), Marges de la philosophie (1972), Dudroit à la philosophie dupoint de vue cosmopolite (1997).
Guy Debqrd (1951-1994)Poète, philosophe, cinéaste etagitateur, cet esprit subversif etinclassable est
l'un des maîtres à penser de mai 68.
Ilfonde «l'Internationale situationniste »,
mouvement d'avant-garde artistiqueetpolitique d'ultra-gauche.
Il critique violemment lemode de vie et de pensée des sociétés contemporaines.Ennemi déclaré de l'« ordre établi »,
il dénonce la tyrannie du « spectacle »,
c'est-à-dire ladéformation des rapports sociaux induitspar les médias. • Commentaires sur la société duspectacle (1992).
JEAN BaUDRILLARD (NÉEN1929) Ensémiologue, il s'attache à déchiffrer les « signes » de notre société, vouéeau « simulacre » et au vide. •De la séduction (1979), LesStratégies fatales (1983).
Jean-François Lyqtarp(1924-1998)Son concept depost-modernité rejette
les représentations idéologiques (« métarécits »structurants) au profit
d'une pensée en perpétuel mouvement
quis'infiltre dans les fractures entre discours etperception. • La Condition postmoderne (1979), LeDifférend {\9M).
PHILOSOPHIE ETMORALE
Lesguerres et leur barbarie ontprécipité l'homme du xxesiècle
dans un profond désarroi moral. Dans une époque marquée par ledésenchantement et le nivellement des valeurs, la pensée éthique repense aveclucidité les notions de Bien et de Mal.
Henri Bergson (1859-1941) P"' WÊ MProfesseur M au collège
IdeFranœ' pjr Bergson
véritablefascination sur la génération suivante enouvrant denouveaux horizons spirituels. Àla « morale fermée »,figée dans un système de normes rigides, il oppose
la « moraleouverte», qui repose sur
la
liberté, l'amouret l'appel du « héros ».
Il développe une conception de
la liberté comme dépassement
des normessociales etlangagières par l'acte exceptionnel etoriginal. On lui doit égalementune philosophie de la temporalité novatrice, qui oppose au temps social objectif l'intuition subjective de la « durée » concrète. • Essai sur les données immédiates de la conscience (1889), L'Évolution créatrice (1907), LesDeux Sources de la morale et de la religion (1932).
Albert Camus (1915-1960) adhère brièvement au Parti communiste en 1935, s'engage dans la Résistance en 1941 ettravailleau journal Combat. Camus est inclassable : romancier,dramaturge,journalisteet
essayiste,
"W| ildéveloppe gm% W mjM unensemble HUk jH H de réflexions convergentes sur la condition humaine. Lethème du Mythe deSisyphe illustre l'expérience de l'«absurde»,qui se manifeste par la prise de conscience
d'un infranchissable abîme entre moi
et le monde. Mais loind'engendrerun
rejet dédaigneux du monde,cette prise deconscience constitue aucontraire un appel à l'action et à la révolte, c'est-à-dire au refus de la passivité nihiliste. •L'Envers etl'Endroit (1937), LeMythe de Sisyphe (1942), L'Homme révolté (1951).
Paul Ricœur (1915-2005)Professeur dans diverses universités françaiseset étrangères, directeur
de la Revue demétaphysique et de
morale, Ricœurest un passeur : c'est
par luique Jaspers, Husserl et d'autres sont ensuite introduits enFrance. Ilse passionne pour tout ce qui touche
au sujet humain et fait preuve d'une grande curiositépour des domaines
aussi variés que l'éthique,
l'histoire, lapsychanalyse, l'anthropologie, l'exégèsebiblique,lajustice,lesstructuresnarratives. Pour Ricœur, penser 1 „:4. c'est dialoguer t^flB avec lesautres HB pensées et chercherà les comprendre.Le concept d'«identité narrative » permetde clarifier beaucoup d'expériences vécues. « Je suis ce que je me raconte » :l'identité individuelle estd'abord un récit. Chacun estle dépositaire fragile et le responsable inquietde son propre moi. •Temps et récit (1983-1985), Soi-même commeun autre (1990), LeMal, un défi
à la philosophie et à la théologie (1996).
Emmanuel Levinas (1905-1995)Lituanien naturalisé français, il dirige l'École normale israélite orientale.Levinaspropose un nouvel humanisme : ce qui est premier, ce n'est plusle moi cartésien,
mais r«Autre »,
dans saradicale altérité.
Cethumanisme ne repose plus sur la raison, mais
sur la responsabilité, l'ouverture
et le dévouement à l'égard d'autrui.
Autrui se présente à moi d'abord
comme « visage ».
Danssa
vulnérabilité, cevisage m'enjoint à respecter le commandement :« Tu ne tueras pas.
» En ce sens,il m'ouvre à la transcendance divine,il en est le signe,la « trace ».•Totalité etinfini (1961), Humanisme del'autre homme (1972), Éthique et infini(1982).
Vladimir jankélévitch (1905-1985) Son œuvre s'organise autourd'une double recherche,la quête moraleet laréflexionmétaphysique.Jankélévitchdélivre une leçon
de rigueur et de sagesse : vivrene
consiste pas à se complairedans
le confortet la jouissance autosatisfaite, mais c'est apprendre le don, l'amour, la générosité et le pardon.
• Le Je-ne-sais-quoi et le Presque rien (1957-1980), LeParadoxe de
tomora/e (1961)..
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