PANORAMA DE LA PHILOSOPHIE ALLEMANDE
Publié le 14/07/2011
Extrait du document

Exception faite de Leibniz au xviie siècle, c'est au XIXe siècle que la philosophie allemande connaît la consécration. Cette grande période de l'idéalisme voit naître des philosophesmajeurs,influencés par les philosophesfrançais des Lumières. Les défaites de leur pays face aux armées françaises de Napoléon conduisent les penseurs allemands à s'inscrire, par réaction, dans une tradition nationale. Deux approches de la philosophie se distinguent : une approche mystico-religieuses et une approche analytico-scientifique. La première inspirera les romantiques, la seconde les rationalistes. C'est la clarté analytique qui s'est imposée comme représentante de l'esprit allemand qui trimphera avec l'exigent système hégélien.

«
LASECONDE MOITIE DU XIXe SIÈCLE
SCHQPENHAUER (ARTHUR) Schopenhauer (1788-1860) est un adversaire d'Hegel.Ilremet en cause'assimilation de l'histoire au progrès et présente
une pensée
pluspessimiste.Sonouvragemajeur,LeMondecommevolontéetcomme représentation (1818) passe tout
d'abord inaperçu.
Ily présente une
métaphysique de la volonté.
Suivantles traces de Kant, il pense que
le sujet n'a pas accès au réel en soi, mais à des phénomènes conditionnés
par sa faculté de représentation :
« Le monde est ma représentation.
»
Cela dit, le sujet appréhende aussi le
réel comme volonté, comme instance métaphysiquefondée sur le«vouloir-vivre ».Cette volonté est sans intelligence, sans but et sans
repos.
En ce sens, le monde est
absurde ettoute vie est liée à des désirs inextinguibles.
Lasouffranceest liée à l'existence.
Pour son salut,l'homme doit s'affranchir du «vouloir-vivre » et de l'égoïsme. Faceà l'art, il peut se livrerà une
contemplationdésintéressée, mais
lavéritable négation de la volonté
passe uniquementpar la morale
de la pitié, par la conscience delasouffrance d'autrui.
HÉCËLIANISME DE GAUCHEET MATÉRIALISMELa publication de la Viede Jésus (1835) du théologien David Friedrich Strauss (1808-1874) fait apparaître des divergences entre les disciples d'Hegel (appelés hégéliens de gauche et hégéliens de droite).Ludwig Feuerbach (1804-1872) est le plus connu des hégéliens de gauche. Dans L'Essence du christianisme (1841), il fonde la théologie dans
l'anthropologie.Dieu est une fiction, une création delaconscience. L'homme projettesur le divin ses propres qualités et attributs dès lors
pensés comme infinis et absolus.
La religion nous renvoie donc à
l'homme : « Le mystère de Dieu n'est que le mystère de l'amour de
l'homme pour lui-même.
» Dans
L'Unique et sa propriété (1845), MaxStirner (1806-1856) contredit lapensée de Feuerbach. L'homme ne doit pas être pensé comme unedonnéesupra-individuelle.
Seull'individu compte et la société est un ensembled'Uniquesobéissant à leur volonté propre.Refusant un dieu ou un hommesuprême,Stirner alimente une réflexion anarchisante qui exalte la liberté individuellecontre latoute-puissance del'État. Karl Marx (1818-1883), souventsecondé dans ses travaux par
Friedrich Engels (1820-1895), reprend
le système hégélien (LeCapital, 1867) mais renie l'idéalisme au nomdu matérialisme.
Selon lui, lesrapports sociaux économiquesdéterminent laconscience humaine. La philosophie, la religion ou la
politique n'influent pas sur l'histoire,
ce sont les processus économiques
qui conditionnent le développement
humain.
Son matérialisme historique
repose sur une lecture dialectique.
Ildécrit des cycles : les forces
productives aliénées par le travail
s'insurgent contre les rapports de
production, de là naît une révolution et finalement, une nouvelleorganisation de la production surgit.Ainsi différentstypes de société se
sont-ilssuccédé : la société primitive, la société esclavagiste antique, la féodalité et le capitalismebourgeois
moderne.
Désormaisau capitalisme
(comme thèse) s'opposera
nécessairement ladictature du prolétariat (antithèse).
Après lacollectivisation des moyens de
production naîtra une société sans
classes (synthèse).
LE NÉOKANTISMEÀpartir dumilieu duxixesiècle, différents mouvements sont rassemblés sous leterme de néokantisme. Dans Kant und die Epigonen (Kantet les épigones, 1865)
Otto Liebman (1840-1912) déclare
qu'il faut revenir à Kant. Friedrich Lange (1828-1875), fondateur du
pragmatisme allemand, rejette
le matérialismedogmatique et
applique la pensée kantienne
aux sciences naturelles. Herman Cohen (1842-1918), Paul Natorp (1854-1924) et ErnstCassirer (1874-1945) sont les fondateurs de l'écolede Marburg. Ilss'inspirent de la théorie kantienne tout en cherchant à la dépasser. L'école d'Heidelberg (Wilhelm Windelband, 1848-1915 ; Heinrich Rickert 1863-1936.EmilLask, 1875-1915) est tournée vers lessciences morales et la théorie des valeurs.
LAVIE D'EMMANUEL KANT À L'ÉCRITET À L'ÉCRAN
Né et mort à Kdnigsberg, Kant n'a jamaisquitté sa ville natale.
La régularité et l'austéritéde sa vie
ont inspirél'écrivain britannique Thomas de Quincey, auteur des Derniers jours d'Emmanuel Kant (1828), ouvrageà l'ironie mordante.
En 1993, Philippe Collin adapte ceroman aucinéma. Ilréalise un film en noir et blanc, drôle et poétiqueà la fois, où l'on découvre la vie trèsritualisée du philosophe alors mêmeque son corps commence à donner
des signes de faiblesse. Kant est interprété par David Warrilow.
LAMÉTAPHYSIQUE INDUCTIVE Il s'agit de penser la métaphysique
de façon inductive enprivilégiant une approche empirique et en tenantcomptede l'apport des sciences positives.
CustavTheodor Fechner(1801-1887) étudie la métaphysique comme une science dutout et postule la présence d'une âme chez
tout être corporel. Rudolf Hermann Lotze (1817-1881) s'inspire de Leibnitz pour synthétiserscience moderne,
conscience axiologique (sciencedes
valeurs) et religion.
Nietzsche (Friedrich)Contre toute pensée systématique,
Nietzsche (1844-1900) a recoursà un stylelittérairesingulier,tranchant et combatif,qui ne
cherche pas
àséduire et
à s'attirer la bienveillance. Son œuvre complexe a conduit à diverses interprétations.
La première période (1869-1876) : dans La naissance de la tragédie (1872), Nietzsche analyse la tragédie
grecque antique présocratiqueet le renouveau de la culture tragique chez
Wagner.La deuxième période (1876-1882) est
marquée par la publication de Humain trop humain (1878), Aurore (1880-1881) et Le GaiSavoir (1882). En quête de véracité, Nietzsche revient sur la signification dulangage et larelativité de la morale. Ilcritique lamétaphysique et la manière dont elle fonde lascience. Ilaffirmeque l'erreur est nécessaire
à la vie.
Ilattaque vivement le
christianisme qui tourne l'homme
vers l'au-delà et déprécie la vie présente.
Legai savoir repose sur
unscepticisme rationnel et non sur la quête de vérités définitives. Durant la troisième période(1883-1888), Nietzscheécrit ses textes les plus célèbres : AinsiparlaitZarathoustra (1883-1885), Par-delà bienet mal (1886), Généalogie de la morale(1887).Toute réalité estdésormais assimilée à la volonté de puissance.On aboutit à unrenversement des valeurs : le bien et le mal sont déterminés enfonction de la notion de puissance: « Qu'est-
ce qui est bon ? tout ce qui élève en
l'homme lesentiment depuissance. » Estmauvaisce qui est lié à la faiblesseetnotamment lesvaleurs morales et religieuses. Pour développersa
volontédepuissance, l'homme doit renoncer aux vérités absolues et se défaire des valeurs traditionnelles. Critiquant l'idéalascétiquechrétien (où la souffrance amène au salut),Nietzsche décrit unsurhomme aspirant à la vitalité et à la force.
Laphilosophie delavie Simmel (Georg)Fondateur de la sociologie, Simmel (1858-1918) développe une philosophie de la vie et une réflexion sur la tragédie de la culture.
Lavie
s'accroîtsans cesse et engendre des
formes socioculturelles qui, par la suite, deviennent des obstaclesàcette même vitalité.
LE XXe
SIECLE
La phénoménologieHusserl (Edmund)Husserl (1859-1938) est le fondateur de la
phénoménologie.
Illa présentecomme une science distincte de la psychologie (science empirique) et de lalogique
(science
rationnelleetabstraite).Elle estla méthodepermettantdefairedelà philosophie une science rigoureuse.Eneffet,la phénoménologie implique de se dégager de tous préjugéspourse tourner vers l'analyse des actes deconscience. Dans Recherches logiques (1900-1901), il décritla conscience pure et montre commentcelle-ci appréhende le réel. Ildéveloppe le concept d'intentionnalité :celui-ci renvoie à ce pouvoir qu'a la consciencede se dépasser elle-même et de viserun objet.
Ces intentions sont variées(jugement, doute, hypothèse), mais elles correspondent à une donationdesens. «Toute conscience du monde impose un sens au monde.
»
Cela dit, cette visée d'un objet peut
avoirlieu sans que l'objet existe. Laréduction phénoménologique estd'ailleurs l'attitude consistant à s'abstenir de tout jugementsur l'êtreou le non-être dumonde afin de mieux observer la conscience pure.
Cette mise entre parenthèses du réel
donne sa valeur scientifique à la philosophie (Idées directrices pour
une phénoménologie, 1913).
Scheler (Max)DansLe Formalisme en éthique etl'éthique matérielle des valeurs (1913-1916), Scheler (1874-1928) s'oppose à l'éthique formaliste kantienne et développe une philo
sophie des valeurs.
Selon lui, les
valeurs sont données àl'homme apriori. Sa pensée repose sur le
concept de la personne comme unité
existentielle dedifférents actes etmanières d'être etnon comme conscience psychologique ouraison.
La philosophiede l'existencelaspers (Karl)Influencé par Kierkegaard, Jaspers (1883-1969) tente de définir les notions d'«être-là » et d'existence (Philosophie, 1932).Selon lui, l'homme abesoin d'être confronté à des situations extrêmes (mort,souffrance, combat,faute) pour prendre conscience de son existence.Celle-ci lui estaussi révélée àtravers lacommunication avec autrui.
Heidegger (Martin)Dans son principal ouvrage. Être et temps (1927), Heidegger (1889-1976) renouvelle la question du sens de
l'être et revient donc à une approche
ontologique du sujet. Son point de départ n'est pas l'homme dans sa globalité.Au
contraire, il distingue l'« être-là » (dasein) de l'être(l'existence).
L'«être-là » peut décider de sonexistence dans lamesure des possibilités qui lui sont propres. Selon ses choix, il sera dans l'authenticitéou dans l'inauthenticité. Heidegger parled'échéance dans le « on »lorsque l'« être-là » se laisse imposerses choix par les autres etne réalise donc pas ses possibilités les plus authentiques. L'«être-là » estaussi confronté à safacticité (la contingenceet le mystère de sa
naissance) et à sa finitude. L'angoisse (ou conscience de sa finitude) le
pousse pourtant à lutter contre la
domination du « on » et à conquérirson authenticité. Àpartir de1930, Heidegger prend un tournantdécisif, il délaisse la question du sens
de l'être pour étudier celle de la
véritéde l'être ainsique l'origine de la métaphysique (Introduction à la métaphysique, 1952).
Ontologie et néopositivismeNicolai Hartmann (1882-1950) élabore une nouvelle ontologie
et s'oppose au subjectivisme.
Dans Traits fondamentaux d'une métaphysique de laconnaissance (1921), il lie théorie de la connaissance et ontologie. Son système de pensée s'articule
autour de catégories.
Le néopositivisme s'apparente au
cercle de Viennefondé par
Moritz Schlick (1882-1936).
Ses membres (dont le logicien Rudolf Carnap, 1891-1970) veulent relier méthodes
scientifiques etphilosophie.
Leur
exigencede
vérification empirique les
conduit au rejet de la métaphysique.
Lesinterprétations dumarxisme LePrincipe espérance (1954-1959) d'Ernst Bloch (1885-1977) est une
interprétation du marxismecentrée
sur la notion d'utopie.
L'homme tend vers l'avenir, sa conscienceestanticipative.
La « théorie critique » ou école de
Francfort est représentée par Max Horkheimer (1895-1973), Theodor
Adorno (1903-1969) et Herbert Marcuse (1898-1979). Ils proposent une analyse critiquede
la société fondée sur la pensée marxiste et la psychanalyse.
Leurs
essais s'appuient sur des recherches interdisciplinaires.
Dans Dialectique de la raison (1947), Horkheimer etAdorno montrent comment depuis les Lumières, la raison a été utiliséepour maîtriser la nature, et cela au prixdel'aliénation del'homme. Dans L'Homme unidimensionnel (1964), Marcuse critique lerationalisme de la société industrielle..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- LUDWIG FEUERBACH ET LA FIN DE LA PHILOSOPHIE CLASSIQUE ALLEMANDE, Friedrich Engels
- Grand Oral du Bac: La philosophie allemande
- LA PHILOSOPHIE ALLEMANDE (Exposé – Art & Littérature – Collège/Lycée)
- KANT DANS LA PHILOSOPHIE ALLEMANDE DU XVIlle SIÈCLE
- Panorama de la philosophie française au XXe siècle