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« Oui ! mille fois oui ! La poésie est un cri, mais c'est un en HABILLÉ (!)» Max Jacob, Esthétique. Vous commenterez, et discuterez s'il y a lieu, ce jugement. ?

Publié le 03/04/2009

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Dans le domaine de la poésie a toujours été posé le problème de la recherche de la forme, de moyens techniques permettant au poète d'exprimer ses aspirations, ses sentiments profonds d'une façon qui les fasse parvenir le plus clairement possible au lecteur. Nombre de poètes n'ont pas perçu de la même manière cette nécessité d'une technique poétique. Cette nécessité s'affirme peut-être dans la réflexion de Max Jacob : « Oui ! mille fois oui ! La poésie est un cri, mais c'est un cri HABILLE ! « qui exprime aussi la valeur lyrique que Max Jacob attribue à la poésie. Déterminons chez quelques poètes les exemples qui illustrent le mieux ce jugement.

« Parallèlement nous pouvons étudier comment les surréalistes qui pourtant veulent abolir toute contrainte dans lapoésie, en prenant des libertés dans la métrique, dans les thèmes qu'ils développent, en ne faisant appel ni à lalogique, ni à des sensations communes chez le lecteur, qui transmettent des sentiments et des sensationsimmédiats et spontanés, utilisent aussi les ressources des rythmes, des sonorités, des images que font naître lechoix des mots employés et leur juxtaposition.

Ainsi Paul Eluard nous dévoile ses aspirations profondes dans des versqui sont de véritables cris d'espoir, tout en jouant sur les oppositions par exemple.

Cet espoir, fondé sur la certitudeque l'homme est capable de vaincre sa souffrance, s'exprimeparticulièrement dans «Le langage des couleurs» et dans les derniers vers : «Je vis je suis ivre de lutter pour vivreEt dans la clarté d'autrui j'érige ma victoire.

» Eluard dit ici une foi absolue en l'avenir.

Ces deux vers expriment lacertitude d'une victoire sur la nuit, la souffrance et la mort.

La volonté qu'on y lit prend la forme d'un appel à lalutte adressé à tous les hommes.

Eluard la rend d'autant plus forte et plus frappante par l'usage qu'il fait de l'imagede l'ivresse : elle évoque un univers où tout est permis, où tout estpossible et dit un enthousiasme tel qu'il sera vainqueur de tout, donc une nouvelle puissance de l'homme.

D'ailleursla force, la vigueur sont suggérées par les consonnes dures qui font résonner des mots comme «vivre», «clarté»,«victoire», les allitérations des « t » et des « v » («Je vis », « ivre de lutter pour vivre», «clarté d'autrui»).

Cemonde où tout est permis, ce monde de l'énergie est aussi un monde inondé de lumière («clarté d'autrui»), de sonsaigus : les «i» : «Je vis je suis ivre de lutter pour vivre...

d'autrui j'érige ma victoire»... Cette « clarté » ne fait d'ailleurs que reprendre une image précédente qui l'étendait à l'infini :«Mille images de moi multiplient ma lumière.» Dans cet exemple à nouveau s'affirme le jugement que Max Jacob a porté sur la poésie.

Peut-être pourrions-nous en découvrir la pleine signification avec d'Aubigné.

Il nous offre en effet dans sa seuleœuvre deux exemples absolument contradictoires de la recherche de la forme, de l'esthétique dans la poésie.

Ildéfinit lui-même le revirement complet qui s'est opéré en lui et au début des Tragiques énonce clairement unerupture définitive avec son passé.

Il oppose à une poésie personnelle et à son inspiration factice et légère unepoésie destinée à évoquer les malheurs de la France dans les luttes civiles.

Nous le voyons donc successivementpasser d'une poésie utilisant les ressources d'un langage particulier, le « langage poétique » des auteurs de laPléiade (diminutifs, références mythologiques) et développant des thèmes traditionnels : l'amour, la vieillesse, lanature, à une autre poésie beaucoup plus stricte dans sa forme, de laquelle est absent tout recours à uneexpression qui embellisse.

Cependant cette nouvelle inspiration ne va pas sans une nouvelle recherche technique.En effet, d'Aubigné utilise dans Les Tragiques, peut-être encore plus qu'auparavant, toutes les ressources de sonart, mais cette fois pour confondre son œuvre avec ce qu'elle exprime.

L'exemple le plus frappant de cetterecherche toute nouvelle est peut-être l'utilisation que fait d'Aubigné de la muse Melpomène ou du dieu Mars dans ledébut de cette œuvre : la figure de Mars se charge de toute la réalité de la guerre ; la muse apparaît non pas dansune évocation lyrique mais comme la représentation de la souffrance et du malheur de la France, d'autant plus qued'Aubigné lui prête une profonde signification religieuse : elle est celle qui s'élève vers Dieu dans une attitude derévolte pour demander justice, elle est particulièrement proche des hommes, elle les représente auprès de Dieu.Nous arrivons alors à une vue parfaitement lucide de la portée que le poète attribue à son œuvre et de la place qu'ildonne aux moyens d'expression.

Celle-ci confirme la part de nécessité de la recherche de la forme dans le sens dontse charge la poésie : c'est-à-dire que la technique poétique permet au poète de donner toute sa valeur à sonœuvre en lui donnant les moyens d'évoquer le monde de la réalité tout en l'immortalisant dans un autre univers.. »

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