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ORIGINE ET NATURE DE LA CONSCIENCE MORALE

Publié le 14/06/2009

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conscience
D'où vient la conscience morale? Comment expliquer sa présence dans la nature humaine? Parmi les réponses possibles nous ne retiendrons que les deux principales. Ou bien la conscience morale est inscrite comme telle dans l'être humain ou bien elle vient de la société : elle est innée ou acquise. a) Conception innéiste. Exposé. Elle consiste à dire que la conscience morale est un attribut fondamental de la nature humaine au même titre que le sens de la responsabilité, le sens de la vérité, le sens de la beauté. L'homme la porte inscrite dans son être : il lui suffit de réfléchir pour apercevoir sa présence. Il va sans dire que le terme origine doit être pris ici au sens de source et non au sens historique. La conscience morale apparaît alors comme une donnée a priori, irréductible et première. On connaît la définition célèbre de ROUSSEAU, elle est innéiste : « Conscience, conscience! instinct divin, immortelle et céleste voix, guide assuré d'un être ignorant et borné, intelligent et libre, juge infaillible du bien et du mal, qui rend l'homme semblable à Dieu, c'est toi qui fais l'excellence de sa nature et la moralité de ses actions ; sans toi je ne sens rien en moi qui m'élève au-dessus des bêtes, que le triste privilège de m'égarer d'erreurs en erreurs à l'aide d'un entendement sans règle et d'une raison sans principe. « Retenons la formule si imparfaite qu'elle soit.

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« fois cette pression disparue.

Son intériorisation serait impossible si elle n'éveillait un sens moral latent et préexistant.La théorie du surmoi, écrit DALBIEZ, n'explique que la transmission d'une interdiction, elle n'explique pas cetteinterdiction même.

» D'ailleurs la vraie morale n'est pas une morale de contrainte et d'hétéronomie mais de liberté etd'autonomie. Remarque. L'arbitrage entre la conception innéiste et la conception sociologique, on pourra le faire en abordant le problème des variations de la conscience morale. c) Les variations de la conscience morale. Toute conception métaphysique de la conscience morale se heurte à la relativité que l'on constate en matièred'opinions morales.

Cette relativité est-elle irréductible ou bien subsiste-t-il dans la conscience morale quelquechose d'absolu ?Les variations de la conscience morale sont un fait, on ne saurait se le dissimuler.

L'histoire et la sociologie nousenseignent que les normes du bien et du mal changent selon l'époque, le milieu, la civilisation.

Nul besoin d'ailleurs derecourir à des sciences.

C'est un fait d'observation courante qu'il y a une grande diversité d'opinions touchant lepermis et le défendu.

Les règles morales seraient-elles radicalement relatives et contingentes dans l'espace et dansle temps? Les modes, les coutumes, les moeurs, les préjugés, les lois, les croyances : tout semble soumisinéluctablement aux fluctuations de la conscience collective, comme le voudraient les sociologues.C'est l'un des thèmes favoris des moralistes sceptiques et désabusés.

On le trouve chez PASCAL exprimé enformules mémorables : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au delà.

— Plaisante justice qu'une rivière borne.

— Undegré d'élévation du pôle renverse toute la jurisprudence, un méridien décide de la vérité.

»Les immoralistes ne manqueront pas d'en tirer des conclusions sceptiques quant à la valeur de la conscience moraleet au degré de confiance qu'elle mérite.

Le doute sur les valeurs morales les inclinera au nihilisme et à l'absurdisme :rien n'est vrai, rien n'a de sens, ou tout au moins au relativisme : tout est équivalent, il n'y a rien d'absolu enmatière de morale.

Cependant que les individualistes réclameront pour chacun le droit de faire sa vérité morale.Pourtant PASCAL n'abonde pas du tout en ce sens.

C'est donc que sa critique relativiste n'exclut pas l'existenced'une morale absolue : elle a seulement pour objet de dénoncer la misère de l'homme, l'insuffisance d'une moraletoute humaine qui perd toute vérité dès qu'elle perd le fondement religieux seul capable de la rendre irrécusable.Sans que nous ayons à suivre la dialectique pascalienne, retenons de cet exemple que la relativité de la consciencemorale n'est pas irréductible.L'exigence morale elle-même est quelque chose qui demeure un dans le multiple, identique dans le divers, permanentdans l'impermanent.

Il suffit en effet de faire abstraction des évaluations particulières, qui sont fonction desfacteurs les plus divers, pour retrouver dans la conscience morale le même mouvement fondamental : l'aspiration aubien, le dépassement, la prise de conscience du décalage de ce qui est et de ce qui doit être, bref, cette vocationmorale de l'homme qu'il est impossible de renier.

Autrement dit si l'on prend la conscience morale non pas dans sesmanifestations contingentes mais dans son essence profonde, non pas dans son contenu variable mais dans saforme, on y trouve quelque chose d'immuable et de constant : le sens du devoir et de l'obligation, de laresponsabilité et de la dignité, de l'idéal et du bon usage à faire de la liberté.

SARTRE, après avoir été tenté par lerelativisme, rétablit la conscience morale dans son universalité.De plus, s'il est vrai que les hommes se trompent sur la définition ou la reconnaissance des valeurs, il n'en est pasmoins vrai qu'il leur est possible de se mettre d'accord sur un certain nombre de valeurs susceptibles d'être inscritesdans un code universel et absolu, de figurer au rang de ces constellations incontestables dont parle le poète.

Mis àpart la mauvaise foi et l'aveuglement dû à la formation reçue, les hommes ne peuvent pas ne pas reconnaître cesvaleurs fondamentales que sont : la liberté, la justice, la dignité, la paix.• Reste alors à chercher la solution de cette contradiction de l'absolu et du relatif.

On pourrait croire que nous ysommes enfermés comme en un dilemme : ou bien la conscience morale est relative et n'existe plus ou bien elle estabsolue et ses variations sont alors inexplicables.

La synthèse est cependant possible.

Immuable dans ses exigencesfondamentales, la conscience morale varie dans ses manifestations empiriques, ses actualisations contingentes, sesapplications diverses.

C'est le destin de tout absolu sur la terre des hommes que de se briser et de se multiplier ense révélant.

La lumière morale, il est inévitable qu'elle subisse réfraction et diffraction en passant à travers lesprismes des époques, des milieux, des personnes.

Ce n'est pas à dire qu'elle y perde à jamais son unité, pas plus quela lumière physique dans les radiations du spectre.

La conscience morale se cristallise dans un certain nombre derègles, de tables de valeurs, d'éthiques, comparables à diverses législations exprimant chacune un aspect de la loiéternelle.

Elle demeure cependant comme une tendance, inscrite dans notre être, que n'épuisent pas ces différentesréalisations d'ailleurs contingentes et imparfaites.

Ainsi l'un se retrouve dans le multiple, le nécessaire dans lecontingent.

On peut voir dans les diverses éthiques autant d'actualisations de l'idéal transcendant, autantd'expressions temporelles de la vérité éternelle, autant d'étapes, peut-être, dans la réalisation progressive dusouverain bien.

Bien entendu cette découverte de la conscience morale ne va pas sans erreurs, traductions infidèleset trahisons inouïes : d'où la relativité et l'opposition de certaines règles morales.

Mais au moins ces variationsrévèlent-elles une inquiétude, une recherche; or, le bien est comme Dieu même : on ne le chercherait pas si on nel'avait déjà trouvé.

De même que la science ne cesse pas d'être valable tout en se renouvelant de théories enthéories, la conscience morale atteste, dans ses variations et son évolution même, la preuve de sa valeur.

Il estdonc légitime de dire qu'elle est identique, immuable et absolue dans son fond malgré les interprétations diversesqu'on en donne, tout comme la vérité en général.Il n'y a donc pas de raison de perdre la foi dans la conscience morale, il suffit d'adopter une attitude critique pour segarder des erreurs d'interprétation auxquelles elle est sujette, tandis que l'homme s'efforce de lire la loi profondeinscrite dans son être.

Il faut savoir aussi qu'elle est inépuisable dans ses exigences et ne peut nous laisser enrepos sur la route du bien.

Il faut distinguer, avec BERGSON, la morale statique où elle se cristallise et cette morale. »

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