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Nouvelles réflexions sur le théâtre: Le théâtre est un art qui recrée la vie dans ce qu’elle a de complexe, de simultané et de présent, c’est-à-dire de fragile, par le moyen essentiel de l’Etre humain mis en conflit dans l’Espace. Jean-Louis Barrault

Publié le 19/03/2020

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« Aussi pour ce jeu, nous ouvrons yeux et oreilles, nous déclenchons tous nos sens, nous faisons marcher nos radars et nous captons ce que la vie peut avoir d’humain. »

«Vous savez, être comédien, c’est l’art de s’oublier soi-même dans les autres afin de les assumer, c’est-à-dire afin de reproduire l’acte d’amour, tous les bonheurs, tous les malheurs, les passions, les désirs de l’homme, de sa vie, et de les représenter sur scène, au présent, en la présence de... »

«D’abord, il faut revenir à une définition, toujours la même : le théâtre est un art qui recrée la vie dans ce qu’elle a de complexe, de simultané et de présent, c’est, à-dire de fragile, par le moyen essentiel de l’Etre humain mis en conflit dans l’Espace. L’Espace c’est la toile du peintre; l’Etre humain en est le pinceau, les couleurs, le fusain : l’Auteur en étant l’artiste. »

«Si l’homme pouvait devenir un instrument digne d’un art, c’est-à-dire un instrument obéissant, il serait le moyen artificiel idéal pour recréer cette vie présente. L’Homme, en effet, ne renferme-t-il pas dans son corps le siège du mouvement (c’est sa colonne vertébrale, souple comme un fouet), le siège des échanges (son appareil respiratoire : ce va-et-vient continuel d’appétit et de refus) et le siège du Rythme (son cœur, son sorcier) ? »

(Nouvelles Réflexions sur le théâtre. « Comment le théâtre naît en nous »)

« 52 / ART THÉÂTRAL • 6 mière d'un art total que Barrault énonce, sur le théâtre, la profession de foi suivante : « D'abord, il faut revenir à une définition, toujours la même : le théâtre est un art qui recrée la vie dans ce qu'elle a de complexe, de simultané et de présent, c'est­ à-dire de fragile, par le moyen essentiel de l'Etre hu­ main mis en conflit dans l'Espace.

L'Espace c'est la toile du peintre; l'Etre humain en est le pinceau, les couleurs, le fusain: I' Auteur en étant l'artiste.» ► Le théâtre est un spectacle qui, outre la mimique, nécessaire et suffisante, du corps humain (apport « essen­ tiel»), peut s'enrichir du concours des autres arts, dont il serait abusif de vouloir priver le public (décors, costumes, éclairages, bruitages, musiques).

La mise en scène, assu­ rée naguère par l'auteur et les comédiens, aujourd'hui par le metteur en scène, doit toujours être assujettie à l'har­ monie de l'ensemble du spectacle, à l'unité duquel elle contribue, ce qui, selon Barrault, s'est accompli dans la création de Christophe Colomb, de Paul Claudel.

Il est entendu que c'est le comédien, conjointement à l'auteur, qui est le centre de gravité du spectacle.

Ce postulat une fois admis, il est aisé de comprendre que le théâtre est un art du présent.

De manière immédiate - tous les comédiens en font l'expérience chaque soir -, le contact direct avec le public est fonction d'une présence sur la scène, transitoire, éphémère, fragile qui,' de sur­ croît, n'est jamais identique.

A cet égard, le spectateur participe avec d'autant plus d'intérêt qu'il perçoit cette fragilité inhérente à la vie.

Plus généralement, la vie qui s'écoule n'est qu'une suite d'instants présents.

Dans le chapitre intitulé « Pourquoi la Cerisaie?», faisant partie des Nouvelles réflexions sur le théâtre, Barrault recourt à l'image suggestive de la pas­ soire, pour mieux évoquer la fuite continuelle du présent: le temps ressemble à une passoire qui «passe» la vie.

De même, la cafetière «passe» le café solide, qu'elle trans­ forme en liquide.

Le présent est donc ce passage mysté­ rieux, magique même, puisqu'il est insaisissable.

« Esca­ motage ahurissant de l'existence exécuté par ce prestidigita-. »

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