Notes de cours: RAISON - IDEE - JUGEMENT.
Publié le 25/10/2009
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L'homme commence par se fier à ses sens et à ses impressions. Mais, il lui apparaît que sensations et impressions sont imparfaites, relatives, et qu'elles doivent être contrôlées par un travail de critique. Un arbitrage est nécessaire. C'est la raison qui le rendra possible.
Par opposition aux formes inférieures de la conscience, la raison se définit d'abord comme la faculté de l'universel. Elle se montre comme la faculté de mettre d'accord les esprits entre eux. Les sociologues ont insisté à juste titre sur le rôle de la société dans l'éveil de la vie raisonnable. C'est d'abord parce que nous avons à mettre d'accord nos impressions premières avec celles de nos semblables que nous recourons à l'arbitrage de la raison. Cependant, on aurait tort de dire que la société créée la raison. Elle l'éveille et l'éduque chez l'homme qui en est déjà pourvu, mais la vie en société ne crée la raison ni chez l'animal (abeilles, fourmis, ect), ni chez l'idiot.
Mais l'accord se fait entre les esprits parce que, grâce à la raison, ils saisissent un ordre objectif des choses ou des idées. Pour parvenir à ce résultat, c'est qu'elle se fonde sur des principes universels, qui sont les mêmes pour tous les hommes, et qui peuvent se ramener aux deux principes d'identité et de raison suffisante. Quelle est l'origine de ces principes? Nous retrouvons là le conflit classique entre les empiristes et les rationalistes.
Pour les premiers, ils ont leur origine dans l'expérience sensible (connaissance du monde extérieur et expérience sociale). Or, cette thèse est déficiente: comment en effet expliquer que les mêmes données extérieures produisent des effets aussi différents dans l'espèce humaine?
On doit donc admettre, avec les rationalistes, que ces principes sont innés, encore évidemment qu'ils ne s'exercent qu'à propos de l'expérience: "J'ai nommé ces idées innées, écrit Descartes, au sens où l'on dit que la générosité... ou certaines maladies, sont innées dans certaines familles." Mais, tout le monde est d'accord pour dire que ces principes sont propres à l'humanité, et qu'ils lui permettent d'organiser son expérience d'une façon très particulière. Penser, raisonner, c'est établir consciemment des rapports.
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sens que par rapport à l'esprit qui l'a faite.
Aussi, détachée de l'esprit, et considérée en ses seuls résultats, lascience amène-t-elle la pensée à se perdre dans l'objet, dont elle oublie qu'il est son oeuvre, et conduit aux pirespréjugés du réalisme vulgaire.
Mais, prise en sa source, et rattachée à l'esprit, elle est le signe de sa puissance, et témoigne de la valeur de la raison.
Le concept ou idée générale.
L'animal trouve son expérience toute découpée en choses dont chacune se présente à lui comme un bloc.S'il les modifie, c'est par des actes dont la pensée se présente à lui encore comme des choses.
Son acte lui estdonc imposé, c'est l'instinct.
L'homme, au contraire, pense avant d'agir, il s'oriente en partie comme il veut dans sonexpérience.
La raison est donc inséparablement liée à la liberté. Le premier acte de sa raison est l'abstraction.
Par exemple de cette feuille de papier, il distinguera l'objet,puis sa forme, sa couleur, son poids...Cette idée abstraite devient aussitôt une idée générale ou concept: idée de feuille, de parallélépipède (géométrie),de couleur (physique), ect.
L'homme, qui est libre, pense toujours au-delà de son action immédiatement utile (à l'inverse de l'animal).Sans doute commence-t-il, lui aussi, par des associations d'idées, pendant la période de l'éducation.
Mais, bien viteil saisit les rapports objectifs qui existent entre les données de son expérience.
A ce moment-là, il se forme lespremiers concepts.Le concept, oeuvre de la raison, c'est un rapport, ou plus exactement un ensemble de rapports.
Prenons un exemple: Par temps de pluie, les animaux se réfugient dans une grotte, sous un arbre, ect.
A l'averse suivante, ilsreviendront peut-être sous le même abri.
Ils ont donc une image générique, une impression d'ensemble de ce quepeut être un abri.
Mais, ils n'ont pas l'idée générale d'abri, et la preuve, c'est qu'ils n'en construisent pas, sauf ceuxque leur instinct leur fait construire, et toujours selon le même type.
L'homme, lui, considère dans la grotte, dans l'arbre, cette propriété qu'ils ont l'un comme l'autre, quelquesdifférents qu'ils soient par ailleurs dans leur réalité concrète de le préserver des intempéries.
C'est cela l'idéegénérale d'abri: dehors, le mauvais temps, dedans la tranquillité, entre le dehors et le dedans ce quelque chose quin'est ni forcément une grotte, ni forcément un arbre, et qui fait toujours que l'intempérie ne nous atteint pas.
Ce"quelque chose" n'est donc pas une image, puisqu'il se trouve lié à des images tout à fait différentes, c'est un rapport: l'écran (quel qu'il soit) interposé entre la pluie et nous, rapport qui reste stable au milieu de la diversité desdonnées sensibles et des images.
Une fois qu'il a compris cela, l'homme est capable de fabriquer n'importe quellesorte d'abri, en utilisant n'importe quels matériaux, groupés de n'importe quelle manière, du moment que le rapport:intempérie-tranquilité se trouve sauvegardé.
Finalement, un parapluie c'est une voûte de caverne rendue portative.Cette analyse, on pourrait la refaire à propos de chacun de nos concepts abstraits: "le chien", c'est un typed'organisation qui se trouve identique, malgré des "contextes" (ou races) différents. Dans certains cas, même, le concept n'est plus réalisé dans aucune image , donnée dans l'expériencesensible: ainsi en mathématique la notion d'infini, celles d'imaginaire et d'irrationnel; en physique, les notions demasse, de force, de travail, d'accélération, qui expriment si visiblement des rapports et seulement des rapports quetout essai pour les définir par les seules images aboutit forcément à une erreur entachée d' anthropomorphisme . L'idée générale est donc le propre de la raison .
Sans elle pas de liberté, pas de science, pas d'invention, et aussi pas de langage, parce que, comme l'a dit Leibniz, une langue qui n'aurait que des noms propres ne serait pas une langue.
Vous comprenez maintenant pourquoi l'étude du concept a retenu l'attention desphilosophes, et pourquoi, comme le disaient Platon et Aristote , la raison peut se définir par le pouvoir que nous avons de penser "non à cet homme qui s'appelle Socrate, mais à l'homme". Le jugement.
Concept et jugement: Quel est l'acte par lequel nous établissons des rapports entre les choses?C'est l'acte de jugement.Pour former le concept de chien, j'écarte de ces images tout ce par quoi elles diffèrent et je définis le typed'organisation, le jeu de rapports, qui se retrouvent chez tous ces êtres.
Par la même occasion, j'écarte de monconcept, l'image de sanglier et de chat qui ressemblent peut-être au chien, mais sont d'un autre type.
Ce travailactif de la pensée pour établir et distinguer des rapports, c'est le jugement.
Ma définition du chien, c'est unjugement: "le chien est un vertébré carnivore ayant des crocs et des poils" .
Lorsque je dis: le sanglier n'est pas un chien mais le terre-neuve en est un.
Je formule des jugements.
Le jugement, c'est l'acte essentiel de l'esprit, c'est la faculté qui va d'une donnée à l'autre pour écarter les impressions hâtives, défaire lesrapports apparents (chat-chien; baleine-orque), retrouver les rapports essentiels (félidé-canidé; mammifère- cétacé), bref pour édifier des concepts ayant une valeur objective.
Le concept est donc un résumé, un complexe de jugements..
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