NIETZSCHE: Qu'est-ce en fin de compte que l'on appelle « commun » ?
Publié le 27/02/2008
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Ce texte de Nietzsche s’ancre dans une double thématique : partant de la recherche de ce qui constitue le « commun « au sein d’un peuple, l’auteur développe une réflexion sur le langage, car ce dernier semble être le paradigme de ce qui permet aux individus de mettre en commun leurs pensées, leurs émotions, leurs actions. La démarche philosophique de Nietzsche étant toujours critique, l’auteur remet en cause la validité du langage et sa capacité à être réellement « commun «, en se demandant si cette idée ne serait pas qu’une illusion, et si les mots peuvent vraiment faire l’objet d’une compréhension universelle et univoque. Est-ce le langage qui établit le « commun « au sein d’un groupe, ou est-ce la communauté qui est à l’origine de la constitution du langage ?

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2ème partie : C'est l'expérience du commun qui fonde le langage. - Pourtant, Nietzsche ne conclut pas à l'échec du langage dans sa prétention à édifier le « commun ».
En fait, pourl'auteur, le commun doit être préalable au langage, car c'est parce que nous avons des expériences communes quenous expérimentons le langage comme commun.- Le langage, pour être commun, ne se déploie pas seulement dans l'utilisation de mêmes mots entre les individus,mais d'abord dans une expérience commune.
C'est parce que les individus font des expériences semblables, etvivent dans le même environnement, qu'ils peuvent être garantis que les mots qu'ils emploient désignent bien lamême chose pour chacun.
(ex : En effet, on pourrait imaginer aisément que le mot « maison » ne désigne pas lemême objet pour un français que pour un malien, même si la langue est la même, alors qu'entre deux français oudeux maliens, l'image signifiée par le mot, c'est-à-dire l'idée de la maison, est identique).- De l'expérience commune entre des individus, l'auteur en dérive une compréhension entre les individus.
Ainsi pourNietzsche, la compréhension naît du partage, du « vivre ensemble ».
C'est parce qu'autrui vit de la même façon quemoi que je peux penser qu'il réagit comme moi, qu'il a les mêmes sensations.
La compréhension pour Nietzsche passedonc par une projection de notre propre expérience dans autrui.
Nous conférons à l'autre les sentiments que nousressentons nous-même, car il est notre semblable et se trouve dans la même situation que nous.
Le « commun »ainsi établit entre les individus, il en résulte que la compréhension des mots du langage utilisée sera aussi la même.
3ème partie : Le commun est une nécessité qui se laisse communiquer. - Poursuivant, Nietzsche explique que plus une expérience est répétée, et mieux les individus se comprennent, desorte qu'ils ont de moins en moins besoin du langage pour communiquer.
Le commun semble effacer la nécessité dulangage, puisqu'il est ce qui fonde la compréhension avant le langage lui-même.
C'est pourquoi l'auteur explique quele langage évolue en s'abrégeant.
Le processus de compréhension engendre simultanément un « processusd'abréviation », car mieux on se comprend, par des expériences communes et répétées, et moins il est nécessaired'avoir recours à de nombreux mots.- Nietzsche prend l'exemple d'une liaison amoureuse, qui ne pourrait durer si les deux individus mettaient chacun unesignification différente sous un même mot.
Mettre un mot en commun n'implique en rien faire état d'une expériencecommune, et on peut très bien imaginer que deux individus aient d'abord m'impression de se comprendre car ilsutilise le même mot, mais s'aperçoivent qu'ils désignent chacun par ce mot une sensation différente, un objetdifférent.
Il en résulte que la communication ne passe pas, et que la relation ne peut qu'échouer.- De cet exemple, Nietzsche en tire une hypothèse : seules les personnes pouvant « indiquer par des signesidentiques des besoins et des expériences identiques » peuvent entrer véritablement en rapport.
Or, comme il l'a ditprécédemment, l'expérience commune est d'autant plus communicable qu'elle est fréquemment répétée, doncbanalisée.
Ainsi, la facilité de la compréhension n'est redevable qu'à la nature « médiocre et commune » desexpériences communiquées.- L'auteur emploie ici la notion de « nécessité », pour souligner le caractère déterminé du « commun », qui ne peutse trouver que dans une expérience universelle à tous les individus, ou du moins assignable à l'ensemble d'ungroupe.
Le langage ne saurait être « commun » de manière extensif, c'est-à-dire, établir des rapports inexistants aupréalable.
Au contraire, il n'est que compréhensif, car il ne fait que désigner une expérience déjà commune, etn'apprend pas autre chose aux sujets que ce dont ils font déjà l'expérience.- L'homme est alors selon la conclusion de l'auteur, déterminé par ces expériences médiocres et communes qu'ilpartage par le biais du langage, et ne peut espérer acquérir sa puissance au-delà des limites du langages commun.
Conclusion : Partisan de la thèse phénoméniste, Nietzsche avance d'abord dans ce texte qu'il n'y a de réalité du langage quesubjective, et que nous subsumons aux mots une compréhension personnelle, particulière, et qui empêcherait parconséquent à la communication d'établir un véritable « commun » entre les individus.
Néanmoins, on peut espérerêtre en possession d'un véritable langage « commun » lorsque celui-ci est forgé par des individus dans l'expérienced'une vie en commun, d'un partage d'émotions, de sentiments, d'actions, qui permet de valider la précision et lecaractère univoque des termes employés.
Le langage est commun s'il désigne pour tous la même expérience interne,subjective, ce qui en définitive n'est possible que pour un petit nombre d'expériences, les plus « médiocres », pourl'auteur, car elles découlent d'une nécessité commune à tout un groupe d'individus.
En conclusion, les hommes nesont déterminés avec le plus de « force » que par ces expériences banales qui leur permettent de communiquer, etnon par l'expérience singulière, subjective, incommunicable..
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