Nietzsche: critique du libre arbitre comme effet d’une illusion.

Aussi longtemps que nous ne nous sentons pas dépendre de quoi que ce soit, nous nous estimons indépendants : sophisme qui montre combien l’homme est orgueilleux et despotique. Car il admet ici qu’en toutes circonstances il remarquerait et reconnaîtrait sa dépendance dès qu’il la subirait, son postulat étant qu’il vit habituellement dans l’indépendance et qu’il éprouverait aussitôt une contradiction dans ses sentiments s’il venait exceptionnellement à la perdre. — Mais si c’était l’inverse qui était vrai, à savoir qu’il vit constamment dans une dépendance multiforme, mais s’estime libre quand il cesse de sentir la pression de ses chaînes du fait d’une longue accoutumance ? S’il souffre encore, ce n’est plus que de ses chaînes nouvelles : — le « libre arbitre » ne veut proprement rien dire d’autre que ne pas sentir ses nouvelles chaînes.

■ Analyse du sujet

— Le thème du texte est assez simple à repérer : Nietzsche élabore ici une critique du libre arbitre comme effet d’une illusion.

— Cette illusion repose sur l’habitude, qui finit par nous rendre indifférents aux servitudes que nous subissons le plus souvent, pour ne nous faire ressentir comme des obstacles que les « chaînes nouvelles », lorsqu’il arrive qu’elles se manifestent. Relativement à ces chaînes nouvelles, le prétendu « libre arbitre » n’est rien de plus que le fait de ne pas les sentir.

— On peut chercher si une telle critique se rattache à une tradition philosophique (penser notamment à Spinoza, même si le point de vue ici esquissé ne recoupe pas entièrement le sien).

■ Pièges à éviter

— Ne pas profiter de l’expression « libre arbitre » pour en retracer longuement (Descartes...) la généalogie et les différentes conceptions.

— Ne pas considérer ce texte comme une simple invitation à recenser les différentes conceptions historiques de la liberté : ce n’est pas ce qu’on vous demande dans un commentaire, qui doit d’abord prouver que vous comprenez avec précision l’extrait proposé.

— Attention au terme << sophisme », qui indique ici un raisonnement qui fonctionne à l’envers, et prend un effet pour la justification d’une croyance.

■ Plan

Introduction

I. La liberté comme sentiment illusoire

II. Le renversement de perspective nietzschéen

III. L’anesthésie par l’habitude.

Conclusion