n'exprime-t-on que ce dont on a conscience ?
Publié le 01/12/2005
Extrait du document
«
« C'est dans le mot que nous pensons.
Nous n'avons conscience de nospensées, nous n'avons de pensées déterminées et réelles que lorsque nousleur donnons la forme objective, que nous les différencions de notre intériorité[…].
C'est le son articulé, le mot, qui seul nous offre une existence oùl'externe et l'interne sont intimement unis.
Par conséquent, vouloir pensersans les mots est une tentative insensée.
On croit ordinairement, il est vrai,que ce qu'il y a de plus haut, c'est l'ineffable.
Mais c'est là une opinionsuperficielle et sans fondement ; car en réalité, l'ineffable, c'est la penséeobscure, la pensée à l'état de fermentation, et qui ne devient claire quelorsqu'elle trouve le mot.
Ainsi le mot donne à la pensée son existence la plushaute et plus vraie.
»
Hegel, in « Philosophie de l'esprit ».
Hegel engage sa réflexion sur la possibilité de la synthèse entre l'aspect subjectif et l'aspect objectif de la conscience.
Le langage est unmoyen terme entre ces deux aspects, ce par quoi la conscience obtientl'existence.
Le langage permet à l'homme de concevoir la nature.
Et on ne peut laconcevoir sans lui, quel que soit l'envie qu'on en a.
De même, il n'est paspossible d'exprimer la conscience autrement que par le recours au langage, quelle que soit la prétention de l'ineffable.
Hegel lie le mot et la pensée :
1.
Penser par le mot, c'est lier intériorité et extériorité.
2.
Il est impossible de penser sans les mots.
3.
Le langage clarifie la pensée.
D'emblée, la thèse de Hegel est affirmée clairement, en une phrase lapidaire : « C'est dans le mot que nous pensons. »
L'ensemble du texte vise à l'analyse des deux termes : la pensée, le mot, et à leur articulation.
D'où formellementdeux possibilités : penser avec les mots (penser « dans le mot ») ; penser sans les mots (c'est la tentation de l'ineffable).
Cette seconde tentative est écartée, par Hegel , comme une erreur.
Ainsi, seule, la première possibilité demeure, d'où l'affirmation renouvelée, sous une autre forme, de la thèse : « le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie. »
1.
La thèse est examinée en chacun de ses éléments.
D'abord la pensée.
Penser c'est avoir conscience depenser, ce qui implique un dédoublement.
Si naïvement toute pensée, en tant que personnelle (« nos pensées »), est crue de l'ordre de notre intériorité (et strictement seulement de cet ordre), philosophiquement, elle est aussi de l'ordre de l'extériorité (et donc différenciée de l'intériorité).
Penser est une activité (« donner »à nos pensées) qui assure le passage d'un ordre à un autre, où l'on passe en même temps de l'abstrait(« penser » dans le vague en général) au concret, de la subjectivité à l'objectivité (des pensées « déterminées », cad qui sont celles-ci ou celles-là).
Enfin, avec une réflexion particulière qui doit être consacrée à l'idée de forme (la « forme » objective) qui, en tant que forme, assure une universalité de la pensée applicable dans la diversité et la multiplicité des situations – s'opposant implicitement à un plein qui ne peut seréférer qu'à l'unique particularité du contenu de ce qui est ici et maintenant.
Forme claire opposée à l'obscur duplein.
En suite le mot.
Si pour la pensée, il convenait de distinguer intériorité et extériorité, il faut reconnaître au mot (défini au passage comme « son articulé ») le statut concret (« l'existence ») d'une synthèse de l'intériorité (« l'interne ») et de l'extériorité (« l'externe »).
D'un rapport privilégié du mot et de la conscience, puisque c'est le mot qui est le seul à pouvoir à chaque fois unir (intimement) les deux positions de la pensée.
La pensée n'est ni l'intériorité seule (l'intériorité est insuffisante il en faut plus) ni l'extériorité seule (il n'y a d'extériorité que seconde, puisqu'elle est le produit, le résultat d'une activité qui prend naissance dans l'intériorité).Mais seul le mot articule en même temps, à la fois, l'intériorité (c'est moi, je, qui parle) et l'extériorité (la « forme » du langage me permet de dire l'universel).
2.
Penser, cad tenir à la fois l'intériorité et l'extériorité, n'est possible qu'avec les mots.
D'où logiquement(« par conséquent ») la réfutation d'une thèse, qui pourtant a cours, et selon laquelle, croit-on, il serait.
»
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