Ne travaille-t-on que par intérêt ?
Publié le 01/12/2005
Extrait du document
«
et, d'autre part, dans l'intérêt subjectif, et leurs rapports avec les nécessités de la finitude ou de l'essence.Est-on libre de travailler? Dans l'affirmative, ce qui, du travail, est libre, est-il pourtant exempt d'intérêt? Untravail désintéressé est-il possible? Peut-on aller jusqu'à penser un travail qui serait à lui-même sa propre fin?
Proposition de plan
I La nécessité naturelle comme racine fondamentale du travail
Michel FOUCAULT Les mots et les choses
« Le travail en effet – c'est-à-dire l'activité économique – n'est apparu dans l'histoire du monde que du jour où leshommes se sont trouvés trop nombreux pour pouvoir se nourrir des fruits spontanés de la terre.
N'ayant pas de quoisubsister, certains mouraient, et beaucoup d'autres seraient morts s'ils n'avaient pas continué à travailler a terre.
Età mesure que la population se multipliait, de nouvelles franges de la forêt devaient être abattues, défrichées, etmises en culture.
A chaque instant de son histoire, l'humanité ne travaille plus que sous la menace de la mort :toute population, si elle ne trouve pas de ressources nouvelles, est vouée à s'éteindre; et inversement, à mesureque les hommes se multiplient, ils entreprennent des travaux plus nombreux, plus lointains, plus difficiles, moinsimmédiatement féconds.
Le surplomb de la mort se faisant plus redoutable dans la proportion où les subsistancesnécessaires deviennent plus difficiles d'accès, le travail, inversement, doit croître en intensité, et utiliser tous lesmoyens de se rendre plus prolifique.
Ainsi ce qui rend l'économie possible, et nécessaire, c'est une perpétuelle etfondamentale situation de rareté : en face d'une nature qui, par elle-même, est inerte et, sauf pour une partminuscule, stérile, l'homme risque sa vie.
»
La finitude radicale de l'homme s'exprime fondamentalement dans les raretés des conditions nécessaires à sa survie.C'est dire qu'il vit « sous le surplomb de la mort », mais aussi qu'il possède un moyen de différer dans cessel'échéance : le travail.
Ainsi, le travail est avant tout le moyen d'un sursis.
Dans ces conditions, le terme d'intérêtparaît faible, dans sa généralité, pour désigner la nécessité toujours renouvelée.
Mais c'est aussi sa généralité qui luipermet de s'y accorder : on a bien « intérêt » à travailler si l'on désire survivre.
Transition Nous avons, dans cette première approche, mis au jour l'attache fondamentale entre travail et intérêt. Cette attache permet de plus de rendre compte de l'évolution historique du concept de travail : c'est bien parceque le travail avilissant est nécessaire à la survie, qu'il doit bien être fourni par quelqu'un, que la Grèce antique ainstitué l'esclavage [1].
Cependant, cette même évolution historique nous montre que cette nécessité fondatrice du travail a peu à peu été intégrée dans les structures sociale comme norme, jusqu'à considérer des activités nonnécessaires comme du travail.
Comment comprendre ce déplacement depuis la nécessité naturelle d'obtenir l'objet du travail, vers celle du travailpour lui-même? En d'autres termes, si l'on travaille d'abord par intérêt, la pratique du travail ne libère-t-elle d'elle-même une fin qu'elle poserait en elle-même, et qui amènerait à travailler en dehors de tout intérêt?
II Le travail : la pratique et les fins
Karl MARX Le Capital
« Le travail est de prime abord un acte qui se passe entre l'homme et la nature.
L'homme y joue lui-même vis-à-visde la nature le rôle d'une puissance naturelle.
Les forces dont son corps est doué, bras et jambes, tête et mains, illes met en mouvement afin de s'assimiler des matières en leur donnant une forme utile à sa vie.
En même temps qu'ilagit par ce mouvement sur la nature et la modifie, il modifie sa propre nature et développe les facultés qui ysommeillent.
Nous ne nous arrêtons pas à cet aspect primordial du travail où il n'a pas encore dépouillé son modepurement instinctif.
Notre point de départ c'est le travail sous une forme qui appartient exclusivement à l'homme.Une araignée fait des opérations qui ressemblent a celles du tisserand, et l'abeille confond par la structure de cescellules de cire l'habileté de plus d'un architecte.
Mais ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte del'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans la ruche.
Le résultat.
»
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