MARX: le cours de l'histoire
Publié le 27/02/2008
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En quelques mots Marx souligne le caractère essentiellement social de la vie de l’individu. Dégageant une ligne historique qui va des sociétés primitives jusqu’à la société occidentale du XVIIIe siècle, l’auteur montre comment le statut de l’individu social évolue dans l’histoire. Selon Marx la dépendance de l’homme à une collectivité est exponentielle à mesure que l’on recule dans le temps. Il identifie une cassure au XVIIIe siècle : l’individu devient individualiste, il ne se fonds plus dans la société mais cherche à dégager son propre profit. Paradoxalement l’essor de l’individualisme coïncide avec un développement des rapports sociaux ; nous nous demanderons comment il faut comprendre une telle corrélation. Dans un dernier moment Marx décrit l’homme comme un animal politique, sociable, incapable de s’abstraire de la société, le fruit de son travail n’a de sens qu’au sein de la société où il prend place.
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L'auteur identifie une cassure au XVIIIe siècle, les différentes parts de la société apparaissent à l'individucomme des machines dont il peut tirer profit en les exploitant, ce qui compte ce n'est plus le devenir de sa tribumais ses « buts particuliers ».
Les individus se désolidarisent au sein d'une même communauté, le bien de la sociétén'est plus une fin commune mais devient le moyen pour quelques uns d'assouvir leurs volontés particulières.
Letravail de l'ouvrier, au-delà de sa valeur immédiate et sociale, prend le sens d'une force impersonnelle dont on vapouvoir dégager un profit.
Non que l'esclavage des hommes commence, mais il est rationalisé, c'est-à-dire que lefruit du travail dépasse la simple production d'objets, il est production d'activités, de flux, de capitaux, c'est lesiècle du développement de l'économie politique.
Cependant le XVIII siècle correspond également au développement des rapports sociaux, plus qu'unparadoxe il faut y voir une corrélation logique.
Tout se passe comme si tandis que l'individualisme prennait son essor,la société tentait de le masquer en affirmant l'importance du lien social.
Le développement, au XVIIIe siècle de l'idéede volonté générale, mise en scène par Rousseau dans Le contrat social témoigne de cet effort d'une pensée politique pour solidifier une société où certains deviennent des outils pour les autres, où la noblesse se doublantd'une classe bourgeoise de plus en plus importante qui profite du travail de la classe inférieure.
Canguilhem notequ'au développement de la pensée d'une politique de la volonté générale (sacrifier les volontés particulières à cellede la majorité, faire du souverain le représentant personnifié du corps social dans son ensemble), et qui prône doncl'irréductibilité du corps social à une addition de volonté particulières, coïncide en médecine avec l'essor du courantvitaliste qui prône l'irréductibilité de la vie aux forces mécaniques.
Au XIX siècle, peu avant que Marx ne développesa pensée, Auguste Comte invente la sociologie et caractérise l'unité sociale primitive comme n'étant pas l'individumais le couple.
Bref, on le voit les réactions à l'individualisme, à la séparation entre un idéal politique et une réalitésociale, se multiplient.
Les penseurs, de façon plus ou moins consciente, réagissent à l'impersonnalisation desindividus et à la dégradation réelle des liens sociaux.
Une pensée de la sociologie ou de la volonté générale a beause développer ce n'est pas pour autant qu'elle empêche la formation de classes sociales et en particulier de cettenouvelle classe qu'est la bourgeoisie, qui organise et profite du travail de l'individu producteur.
Pour Marx l'homme devient un animal politique, sociable, au sens fort, s'isoler ce n'est pas tant s'abstrairede la société que s'isoler dans la société, autrement dit, nulle part il ne peut fuir la société.
Pensons à Rousseau quifuyait ses soucis en arpentant les forêts et en se cachant dans des troncs d'arbre, son attitude témoignait d'uneimpossibilité à se débarrasser des difficultés sociales qu'il connaissait, en s'enfuyant il ne faisait que reconduire lesproblèmes, les affirmant par le seul fait de vouloir s'isoler.
Son seul refuge était dans la rêverie.
Au-delà del'affirmation d'Aristote au début de La politique d'après laquelle l'homme est un animal politique parce qu'il a besoin de vivre en communauté, Marx exprime la même idée non comme un besoin mais comme une fatalité : l'homme nepeut faire autrement.
On peut penser ici à la très belle analyse développée par Deleuze au début de L'île déserte et autres textes sur Robinson Crusoe personnage du début XVIIIe ; Deleuze remarque que sur son île, qui lui offre de commencer une nouvelle vie, lui commande de s'adapter, Robinson ne sait pas faire autre chose que de tenter dereconstituer le mode de vie qu'il vient d'abandonner.
Plutôt que de s'adapter au milieu vierge et à la liberté qui luiest offerte, il préfère se rassurer en essayant de se construire une vie organisée, rationalisée, comme celle qu'il aconnu et à laquelle il intégrera Vendredi.
Sur son île, alors que rien ne l'y oblige, il reconduit un modèle réduit de lavie économique du monde civilisé.
Même abandonné, à l'écart de toute société, l'homme demeure un animalpolitique.
Marx remarque fort justement que la production de biens en dehors d'une société est une absurdité, maispour Robinson c'est la condition de sa survie, de même qu'un individu que l'on condamnerait à l'isolement perpétuelse mettrait probablement à parler avec lui-même pour ne pas sombrer dans la folie (et certes il y sombrerait à cetinstant).
Pensons par exemple au personnage du joueur d'échec de Zweig qui joue seul contre lui-même dans sacellule, dissociant sa personnalité selon que c'est aux blancs ou aux noirs de jouer.
L'homme est donc pris dans lasociété et en sortir lui est impossible, il ne peut vivre en dehors du lien social, quitte à devoir le réinventer enl'imaginant.
La production de biens comme le langage ne sont légitimes qu'au sein d'une société, produire sur une îledéserte ou se parler à soi même sont le signe d'une absurdité pour Marx, l'indice d'une impossibilité pour l'hommed'exister autrement que comme animal sociable.
Conclusion :
Jusqu'à ce que la communauté prime sur l'individu aucune pensée du lien social n'a eu besoin d'êtreaffirmée, c'est à partir du moment où l'individualisme est né, avec la création de la classe bourgeoise, que la sociétés'est efforcée de penser son unité et ses forces de liaisons.
Il en a résulté que l'homme est devenu un animalsociable, au point de ne pouvoir jamais s'abstraire d'une existence sociale, le sens de l'existence est lié à uneappartenance sociale.
Il n'y a donc pas alternative entre individualisme et le fait d'être un animal sociable, ce n'estpas parce qu'il est capable d'exister comme individu en dehors de la famille ou de la tribu que l'homme est capabled'excister autrement que comme animal politique..
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