Marx et le problème de l'art
Publié le 24/01/2013
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«
mais traduisent l’évolution de l’infrastructure économique et sociale.
Marx souligne que l’un des
points délicats à examiner est celui du « rapport intégral entre le développement de la production et
celui de l’art ».
Car « il ne faut pas concevoir l’idée de progrès dans son abstraction vulgaire ».
« Certaines époques de floraison artistique, précise- t-il, ne sont nullement en rapport avec
l’évolution générale de la société, ni donc avec le développement de la base matérielle.
Par exemple
les Grecs ou encore Shakespeare ».
Constatation d’un fait.
L’art grec, la poésie homérique par
exemple représente une prouesse artistique, et pourtant la société grecque est économiquement
faible.
De même le théâtre shakespearien domine la sphère théâtrale pour se déployer dans une
économie inférieure à la nôtre.
Si le progrès techno -scientifique est continu, l’histoire de l’art ne
peut se lire sur le mode de la progression.
Aussi une société p eu développée peut avoir des
créations artistiques d’une profonde richesse.
Écrire après Homère ne veut pas dire mieux écrire.
La
question par d’un constat : les superstructures artistiques offrent une apparente autonomie
contraire au principe du matérialisme historique : l’histoire de l’art ne reflète pas l’état économique
et social d’une société donnée.
Il faut donc deux distorsions dans l’appréhension de la
superstructure artistique.
D’abord à l’intérieur du domaine de l’art lui- même, des formes d’art
pr imitives donnent naissance à des créations sublimes dont le génie ne sera pas toujours égalé par
les formes suivantes.
Par exemple, l’épopée n’apparaît jamais « qu’à un stade peu développé de
l’évolution de l’art » et pourtant ce genre a fait surgir des œu vres insignes.
Ensuite, des chefs-
d’œuvres artistiques sont produits par des sociétés se trouvant à un degré inférieure de
développement économique.
H.
Lefebvre écrit à ce propos : « Lukacs semble avoir interprété ce
texte de Marx en un sens contestable.
Une société économiquement supérieure pourrait avoir un art
et une culture inférieure.
Marx a seulement voulu dire qu’une société économiquement inférieure
peut avoir une supériorité dans certaines formes d’art (l’épopée d’Homère par exemple) qui
peuvent co nnaître à un stade inférieur une floraison qu’elles ne connaîtront plus.
» La difficulté dira
Marx « est de formuler une conception générale de ces contradictions ».
En effet, le matérialiste
dialectique pense que les contradictions sont la trame de l’histoire.
L’autonomie apparente des
superstructures, les distorsions, les contradictions constituent une objection décisive à un
matérialisme pour lequel la superstructure serait parallèle à l’infrastructure qui la produit.
Mais
Marx a toujours affirmé l’inter dépendance complexe entre les deux structures.
Le problème des
superstructures artistiques, même s’il n’a pas reçu une solution satisfaisante, peut en tant que
problématique être assimilé par la philosophie dialectique.
Il n’en présente pas moins des difficultés
propres.
Marx explique bien, en effet, le retard fréquent de certaines idéologies qui se maintiennent
souvent en dépit de l’avancée économique : soit parce que leur forme très structurée leur assure
une longue survie (c’est le cas du droit romain do nt l’essentiel persiste dans les institutions
juridiques des hautes sociétés), soit parce que la classe dominante parvient à maintenir des
pouvoirs et des privilèges (à travers des formes culturelles qui les traduisent et les dissimulent)
qu’un état ancien des forces de productions, aujourd’hui dépassé, avait jadis suscités.
Mais quant il
s’agit de l’art la difficulté est inverse.
C’est le paradoxe d’une superstructure qui, avec des œuvres
géniales, paraît en avance sur l’infrastructure matérielle.
Hegel d ans son Esthétique avait déjà insisté
sur les rapports que la sculpture grecque avec la religion : « Une religion qui s’adresse aux sens
comme la religion grecque doit produire sans cesse de nouvelles images.
» Et d’ajouter : « pour le
peuple, la vue de pa reilles œuvres n’était pas un simple spectacle, elle faisait partie de la religion
elle -même et de la vie […] L’art grec n’était pas un simple ornement mais le besoin vivant,
impérieux.
» Il signale même que l’art romain serait inférieur parce que ce « souffle intérieur » a
disparu.
Marx qui se réfère surtout à Homère déclare que « l’art grec suppose la mythologie grecque,
c’est -à -dire la nature et les formes sociales, déjà élaborée au travers de l’imagination populaire.
»
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