Manuscrits de 1844, Marx (explication de texte)
Publié le 30/04/2012
Extrait du document
Supposons que nous produisions comme des êtres humains : chacun de nous s'affirmerait doublement dans sa production, soi-même et l'autre. 1° Dans ma production, je réaliserais mon individualité, ma particularité ; j'éprouverais, en travaillant, la jouissance d'une manifestation individuelle de ma vie, et, dans la contemplation de l'objet, j'aurais la joie individuelle de reconnaître ma personnalité comme une puissance réelle, concrètement saisissable et échappant à tout doute. 2° Dans ta jouissance ou ton emploi de mon produit, j'aurais la joie spirituelle immédiate de satisfaire par mon travail un besoin humain, de réaliser la nature humaine et de fournir au besoin d'un autre l'objet de sa nécessité. 3° J'aurais conscience de servir de médiateur entre toi et le genre humain, d'être reconnu et ressenti par toi comme un complément à ton propre être et comme une partie nécessaire de toi-même, d'être accepté dans ton esprit comme dans ton amour. 4° J'aurais, dans mes manifestations individuelles, la joie de créer la manifestation de ta vie, c'est-à-dire de réaliser et d'affirmer dans mon activité individuelle ma vraie nature, ma sociabilité humaine [...] En supposant la propriété privée, le travail est aliénation de la vie, car je travaille pour vivre, pour me procurer un moyen de vivre. Mon travail n'est pas ma vie. En second lieu, mon individualité particulière, ma vie individuelle, se trouverait affirmée dans le travail. Le travail serait alors une vraie propriété, une propriété 2 active. En supposant la propriété privée, mon individualité est aliénée à un degré tel que cette activité m'est un objet de haine, un tourment : c'est un simulacre d'activité, une activité purement forcée, qui m'est imposée par une nécessité extérieure et contingente, et non par un besoin et une nécessité intérieurs.
Karl Marx, Économie et philosophie, 1844. Trad. Maximilien Rubel, in CEuvres, t. 2. Bibliothèque de La Pléiade, Gallimard, 1968, pp. 33-34.
Ce texte de Marx extrait des Manuscrits de 1844 a pour objet d’exposer une conception du travail précise et de ce qui en découle. Marx s’oppose ici à la définition étymologique du mot travail. En effet, le travail vient du mot latin tripalium qui signifie : appareil de torture. De plus, le travail n’est souvent perçu par les individus que comme une contrainte. Et en tant que fait social, il est également fréquemment conçu uniquement comme l’activité grâce à laquelle les individus gagnent leur vie. L’individu ne voit souvent du travail que son aspect économique.
Dans ce texte, Marx nous invite à appréhender le travail d’une manière plus profonde. Les raisons pour lesquelles l’individu travaille occultent la raison d’être du travail. L’idée principale de Marx dans ce texte est que le travail est une fonction noble de l’homme. Celui-ci est même le propre des hommes. Pour Marx, par le travail l’homme réalise son humanité. Le texte s’inscrit ainsi dans la perspective d’une valorisation du travail humain.
«
2
il réalise toujours le même mouvement répétitif comme une machine.
Dans ce cas, le travail
est une aliénation car on utilise l’homme uniquement pour sa force de travail et non comme
un individu doué d’imagination et d’une conscience.
C’est le problème de la division du
travail où l’homme ne voit pas le résultat de son travail.
De plus, dans une société capitaliste,
le travail est exploité c'est-à-dire qu’une partie du travail du salarié ne lui ai pas payée.
C’est
le surtravail qui est à l’origine de la plus-value réalisée par le capitaliste.
Pour Marx, c’est donc seulement si nous travaillons comme des êtres humains que le travail
est alors « une affirmation de soi-même et des autres » .
Dans la tradition grecque et chrétienne, le travail est une punition, une souffrance.
Hors pour
Marx le travail est d’abord ce qui définit l’homme.
Pour exprimer pourquoi le travail serait le propre de l’homme.
Marx divise son texte
en quatre parties numérotées.
Il s’agit pour lui d‘argumenter cette thèse en quatre points.
Dans la première partie, Marx développe la thèse comme quoi le travail est un aboutissement
de soi-même ; l’homme est créateur de sa production.
Le travail est vu comme aboutissement
de soi même.
L’homme est le seul maitre de ce qu’il produit, ce qu’il produit est donc
personnel et unique.
Le travail est ici vu comme une œuvre.
Dans cette partie, Marx s’oppose
à Aristote.
En effet dans la tradition antique l’homme libre ne travaille pas car il doit se
concentrer sur les activités intellectuelles comme la science et la philosophie.
Dans la Grèce
antique, le travail est considéré comme une des activités les plus animales et les moins nobles.
C’est pourquoi on le confie aux esclaves, qu’Aristote définissait comme des « machines
animées ».
Pour Aristote et Platon, l’homme qui est philosophe accomplit davantage son
humanité que l’homme qui travaille.
Au contraire pour Marx, la production d’objets matériels
peut être tout aussi forte que le travail intellectuel car l’homme peut voir concrètement la
réalisation de sa pensée.
C’est aussi ce que veut montrer Hegel dans sa dialectique du maître
et de l’esclave.
Le maître fait travailler l’esclave pour la satisfaction de ses propres besoins et
finit ainsi par en dépendre, tandis que l’esclave grâce à son travail plie la nature à sa propre
volonté.
L’esclave devient ainsi le maître du maître et le maître l’esclave de l’esclave.
Marx
reprendra cette idée : l’homme se réalise dans et par son travail parce qu’il peut s’y
reconnaître.
Quand un homme crée ou qu’il produit un objet il lui transmet sa personnalité.
Donc il peut être lui-même et s’accomplir dans cette production : il peut être libre.
Dans le premièrement, Marx parle de ce qu’apporte le travail à celui qui produit.
Dans
le deuxièmement, il introduit « autrui ».
Dans cette partie, Marx développe l’idée que le
travail permet la satisfaction des besoins humains.
En effet, l'homme n'est pas chez lui dans la nature :il a des besoins auxquels il ne peut pas
subvenir avec les moyens naturels dont il dispose.
Grâce à Prométhée qui offre aux hommes la maîtrise du feu et des techniques qui vont leur
permettre de travailler et ainsi de compenser cette inadaptation au milieu.
Prométhée leur
offre aussi le travail puisqu'on ne peut utiliser les techniques que dans le cadre d'un travail.
Nous travaillons parce que notre constitution et notre nature ne sont pas en harmonie, parce
que nous ne pouvons nous procurer ce dont nous avons besoin pour vivre qu'en le fabriquant.
Nous travaillons pour adapter la nature à nos besoins.
Telle est la raison d'être ou la raison
suffisante du travail.
Et le travail est cette activité de transformation adaptatrice de la nature à
nos besoins.
L'homme est l'être qui produit lui-même ses conditions d'existence parce qu'elles
ne sont pas immédiatement présentes dans la nature.
Adapter la nature à nos besoins, la
transformer pour satisfaire nos besoins, c'est produire de la valeur d'usage.
Une valeur d'usage est un bien ou un service, produit par un travail humain, qui nous est utile,
qui permet de satisfaire un besoin qu'il s'agisse d'un besoin naturel parce qu'il est lié aux
exigences de notre corps ou des besoins sociaux parce qu'ils nous sont inspirés par notre.
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