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Machiavel: La vertu du prince

Publié le 15/01/2004

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Machiavel: La vertu du prince

« Vertu » provient de vir qui signifie à la fois « force » et « homme ». Cette origine étymologique s'explique par la considération selon laquelle la vertu consiste en une force d'âme. En effet, pour parvenir à une conduite juste, sage et courageuse, peurs et craintes sont à fuir. Affirmer ses actes implique une maîtrise sur soi que seules peuvent posséder des personnes ayant un tempérament fort.

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« La notion de « fortuna » est la monnaie d'une vision du monde.

Elle n'a pas le statut d'un concept. « La multitude lui [la Fortune] donne le nom de Toute-puissance, parce que quiconque reçoit la vie en ce monde éprouve tôt ou tard sonempire. Souvent, elle tient les bons abattus sous ses pieds tandis qu'elle élève les méchants, et si parfois elle fait unepromesse, jamais on ne la lui voit tenir. Elle renverse de fond en comble les Etats et les royaume au gré de son caprice, et elle ravit au juste le bienqu'elle prodigue au pervers. Cette déesse inconstante, cette divinité mobile place souvent ceux qui en sont indignes sur un trône où ceux qui lemériteraient n'arrivent jamais. Elle dispose du temps au gré de sa volonté ; elle nous élève et nous renverse sans pitié, sans loi et sans raison. Personne ne sait de qui elle est fille, ni de quelle race elle est née : ce qu'il y a de certain seulement, c'est que Jupiter lui-même redoute sonpouvoir… » (« Capitolo de la Fortune ») La fortune n'existe que pour dire la neutralité du monde en matière politique ; elle remplit une fonctiond'évacuation.

Par la fortune, le monde « pré-civil » (celui qui précède l'acte par lequel l'homme se fait politique) est vide. La fortune n'est pas la Providence.

Elle en est au contraire une double négation.

Elle nie tout le pays religieuxd'où elle est née ; mais encore elle sert à récuser ce qui pourrait être donné comme son équivalent laïcisé ouathée : la régularité implacable de l'ordre des choses. On ne peut rien savoir de ce que veut la vertu.

Il n'y a pas de science de la fatalité : l'ordre du monde n'estpoint une base scientifique possible de l'ordre politique. La fatalité est une catégorie mentale qui se conjugue au futur antérieur, non au présent, ni non plus au futur.Tout aura été nécessaire demain, mais cette nécessité ne peut pas être décryptée dans les événementsd'aujourd'hui qui pourtant, dès demain, apparaîtront comme « ayant été nécessaires » dans la catégorie de « l'avoir-été ». Lorsque les choses du monde, prises globalement sont réputées fatales, l'homme soumis à cette fatalité n'a plusqu'à en lire les signes.

Le signe n'est pas la cause de ce qui arrive, il n'en est pas une partie à partir de laquelle onpourrait, grâce à un calcul intellectuel inférer le tout : il en est l'avertissement.

Avertissement toujours confus,opaque, équivoque.

Le signe parle bien de la chose dont il veut parler, mais en une langue à ce point détournée quela sémiologie qu'il appelle est ambiguë ; après coup on saura que les prodiges étaient des signes. La fortune est ce qui suscite l'opposition de la « virtù ».

Rapport à cette « virtù », elle est une résistance, un obstacle, mais elle est aussi la porteuse des occasions d'agir.

Elle est ce à quoi l'homme affronte son humanité. La fortune appelle la « virtù » comme son partenaire et comme son répondant.

Elle tire son nom de la confrontation : si elle est fortune, c'est pour une volonté qui désire imprimer sa « virtù » dans le cours du monde et en faire un phénomène de ce monde. L'absolu qu'est la « virtù » rencontre la fortune sous les espèces du changement, de l'imprévisible mouvant.

Mais elle n'est pas un libre arbitre en lutte avec le libre arbitre de l'homme. De la fortune, de l'appel qu'elle lance par son indifférence à la démiurgie politique de l'homme, comment donnerce que nous pourrions appeler des concepts ? Image. « … pour que notre libre arbitre ne soit pas éteint, j'estime qu'il peut être vrai que la fortune soit maîtresse de lamoitié de nos œuvres, mais elle nous en laisse gouverner à peu près l'autre moitié. ». »

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