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Ma liberté n'est-elle que celle de faire le mal ?

Publié le 27/02/2004

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LIBERTÉ (lat. libertas, condition de l'homme libre)

Gén. La liberté au sens primitif s'oppose à l'esclavage et se définit alors négativement comme absence de contrainte extérieure. On appelle ordinairement liberté physique le fait d'agir sans entrave ou de suivre spontanément les lois correspondant à sa nature propre comme le fait une plante qui se développe sans tuteur. Appliquée à l'homme, cette expression semble inadéquate sauf à désigner strictement la possibilité matérielle de faire. Car, pour qu'un homme soit libre, il faut non seulement qu'il puisse matériellement, mais encore qu'il veuille : l'homme peut toujours s'interdire à lui-même de faire ce qu'il peut faire. Mor. État d'un être qui se décide après réflexion, en connaissance de cause, qu'il fasse le bien ou le mal. La liberté, au sens moral, caractérise l'homme en tant qu'être responsable. Ainsi, Kant distingue la volonté libre, qui suppose que celui qui agit sait ce qu'il veut et agit conformément à des raisons qu'il approuve, et l'arbitraire, qui ne suppose pas l'existence de la raison. La liberté morale est donc autonomie, obéissance à la loi de la raison (pouvoir de se déterminer par soi-même) et non soumission aux penchants de la sensibilité». Cependant, la liberté semble ici se confondre avec la Raison. Descartes, au contraire, considérait que la liberté se manifeste déjà dans tout acte de choisir, distinguant ainsi la liberté éclairée (qui sait ce qu'elle veut) de la liberté d'indifférence (définie comme l'indétermination de la volonté relativement à ses objets). On peut toujours choisir entre deux solutions alors même qu'on est indifférent. Pour Descartes, la liberté n'est donc pas toujours responsabilité, mais d'abord libre arbitre qui, en son plus bas degré, se définit comme simple puissance d'agir sans aucune raison ou sans autre cause que l'existence même de cette puissance de choisir arbitrairement.

Donner une définition simple et univoque de la liberté n’est possible qu’au prix d’une simplification inacceptable du concept de liberté. En effet, pour définir la liberté, il faut nécessairement faire référence à un terme qui s’oppose à elle. Ainsi on peut définir la liberté par opposition à l’esclavage : alors elle est la condition d’une personne qui n’est pas sous la dépendance d’une autre. Elle s’oppose également à la contrainte, puisqu’elle est le pouvoir de faire ce que l’on veut ; mais elle s’oppose également à l’oppression, en tant qu’elle est le droit de faire tout ce que les lois permettent, sous réserve de ne pas porter atteinte aux droits d’autrui. Enfin, elle s’oppose au déterminisme, puisqu’elle est le pouvoir de la raison humaine de se déterminer en toute indépendance. Prenons garde à la lettre du sujet qui nous demande de réfléchir sur « ma « liberté et non sur « la « liberté. Cela implique qu’il nous faudra considérer une dimension expérientielle, intime de la liberté, celle qui s’incarne dans un sujet, et non comme un pur concept.

Faire le mal est une notion qui ne peut se définir simplement, dans la mesure où nombreuses sont les réalités que nous pouvons subsumer de manière contingente et relative sous cette qualité. En effet, la notion de mal est pour une part relative aux lieux, aux époques, et aux situations dans lesquelles le mal est pratiqué. Nombreuses sont les actions que nous pouvons considérer en un temps donné comme l’expression du mal qui cessent de l’être si nous regardons quelles motivations réelles y président (tuer quelqu’un par haine ou pour abréger ses souffrances, quand bien même il s’agit de la même action, n’a pas la même signification). Il ne s’agit pas de faire de la notion de mal une notion toute relative, mais de montrer que la valeur axiologique d’un acte peut varier en fonction des circonstances.

Le sujet nous demande précisément si ma liberté n’est que celle de faire du mal, formulation restrictive qui implique que c’est pour autant que nous pouvons faire le mal que nous sommes libres.

Nous nous demanderons donc si la liberté du sujet s’incarne uniquement dans la possibilité de faire du mal, dans d’autres possibilités d’agir, ou s’il n’est pas plus juste d’entendre par liberté non la capacité d’un faire, mais un certain rapport subjectif aux évènements du monde.

« Par ailleurs, nous dirons que si nous admettons que ma liberté peut être celle de faire du mal, il n'est pas évidentqu'elle ne soit que celle de faire du mal.

Si nous acceptons le concept trivial de liberté, qui fait consister cettedernière dans la capacité de faire quelque chose conformément à notre volonté, alors la nature du faire en lui-mêmen'importe pas.

En effet, si la liberté est un pouvoir d'agir, l'expression de ce pouvoir ne change rien à la liberté elle-même : il peut fort bien s'agir du bien tout autant que du mal.

Par conséquent, ma liberté n'est pas cette libertérestrictive qui consisterait à ne faire que le mal. III. La liberté n'est pas un faire mais un rapport subjectif aux évènements a.

La liberté de consentement à l'ordre du monde Nous prendrons ici la liberté dans un autre sens, non pas dans celui de capacité d'agir, mais dans celui de rapportsubjectif aux évènements.

Pour les Stoïciens, il existe deux types de réalités dans le monde : il y a d'une part toutce qui ne dépend pas de nous (la fortune, la condition, la naissance, les qualités personnelles, la réputation…) et cequi dépend de nous (en tout et pour tout : le rapport que nous soutenons à ce qui ne dépend pas de nous, c'est-à-dire notre rapport subjectif à la nécessité, rapport qui peut être d'acceptation ou, comme c'est le pluscommunément le cas, le refus et le désespoir).

Sur la base de cette distinction, Epictète dans son Manuel enjoint les hommes à accepter la nécessité : « S'instruire, c'est apprendre à vouloir chaque évènement tel qu'il se produit ».

C'est-à-dire que celui qui veut que les choses adviennent comme il le désire est en vérité esclave de ses passions.

La liberté véritable consiste dans l'assentiment à tout ce qui est.

Par conséquent, ma liberté ne s'incarnepas dans un faire singulier, que ce soit celui du mal ou du bien, mais dans l'acceptation de la nécessité. b.

La liberté consiste dans la compréhension et le désir de l'ordre du monde Pour Spinoza, la liberté est une illusion dans la mesure où il conçoit un déterminisme universel.

Il n'y a pas devéritable liberté pour, puisque tous les êtres sont pris dans un réseau de relations causales qui les déterminentabsolument.

Tout dans l'individu, que ce soit ses actions ou ses pensées, est entièrement le fruit de cettedétermination.

C'est la possibilité même d'affirmation de la liberté qui parait ici problématique.

Or, Spinoza montredans l' Ethique que l'asservissement à la nécessité n'est pas le lot de l'homme, que ce dernier peut conquérir une forme différente de liberté, à partir du moment où il comprend que tout ce qui lui arrive était nécessaire.

Par sonintelligence, l'homme coïncide avec la nécessité.

Par conséquent, l'affirmation de la liberté passe par le biais del'intelligence, qui embrasse la nécessité absolue de toutes choses en prenant en compte l'enchaînement causal, etnon par la possibilité de faire le mal. Conclusion : A première vue, nous pouvons faire de la liberté la puissance de faire le mal, car le mal est associé à l'idée d'unerévolte contre la nécessité, d'une affirmation du sujet.

Mais dire que ma liberté est, restrictivement, celle de ne faireque le mal, nous ne pouvons l'affirmer : car si la liberté est une capacité d'action, la nature de l'action elle-mêmeimporte peu.

En définitive, la liberté est peut être moins une capacité d'agir qu'un rapport subjectif aux évènementsdu monde qui nous permet de supporter la contrainte qu'ils incarnent.. »

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