L'utopie n'est elle que l'envers de l'histoire ?
Publié le 27/02/2008
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d'envisager cela il convient de poser la métaphore de l'envers de l'histoire de son point de vue critique.
Cet« envers » peut se comprendre aussi comme prendre l'histoire à rebours ou vouloir remonter l'histoire, or n'est-cepas ce que fait l'utopie en ce plaçant dans une situation idéale presque édénique ? II – De l'« envers » à « l'à l'envers » de l'histoire a) En effet, et c'est bien là l'une des critiques fondamentales de Cioran dans Histoire et Utopie .
L'utopie est bien cette conception à rebours du temps.
Elle le conçoit à l'envers ou plus exactement l'utopie cherche à atteindre unesituation idéal qui se trouve dans le phantasme édénique, c'est-à-dire avant le péché originel et la chute d'Adam etEve du Paradis comme la Genèse dans l'Ancien Testament l'explicite. b) Plus exactement, il s'agit comme le met en exergue Cioran dans Histoire et Utopie de « refaire l'histoire avec les moyens de la chute ».
Qu'est-ce que cela signifie ? Tout simplement que l'homme cherche à retourner vers cet âged'or notamment par le travail c'est-à-dire par les effets de la « malédiction divine » si l'on peut dire.
Expliquons :l'homme travaille pour sa subsistance depuis sa chute du paradis telle est sa sanction or c'est avec cela qu'il estcensé se créer un paradis terrestre à l'image du paradis divin.
En ce sens, il s'agit bien de renverser l'histoire c'est-à-dire de la mettre à « l'envers », si l'on nous excuse le jeu de mot.
L'idée est donc celle d'un retour à une périodedans l'histoire humaine révolue.
L'histoire au lieu de se poursuivre de façon linéaire doit alors revenir à sa situationpremière d'avant la chute.
C'est pourquoi on peut parler sans effet de rhétorique d'un « à l'envers » de l'histoire.
Ledéveloppement technique est alors un facteur, comme le travail, un moyen en vue de la création d'une sociétéparfaite claquée sur le modèle divin.c) On peut alors parler légitimement d'« à l'envers » de l'histoire parce qu'elle est une lecture qui mélange à la foisun a priori de l'histoire et la projette dans le future.
C'est bien là l'un des caractères fondamentaux de l'utopiecomme le manifeste Cioran dans Histoire et Utopie .
Mais cet « envers » de l'histoire va plus loin car ces utopies sont aussi des « envers » dans la mesure où ils ont servis de modèle au développement du totalitarisme comme lestalinisme.
En ce sens, elles sont des doubles critiques : du point de vue de la société qu'elles voulaient critiquermais aussi des sociétés qu'elles ont elles-mêmes contribuées à créer.
Et c'est bien ce que l'on peut voir avec ladifférenciation que l'on établit entre le discours marxisme et son application et sa transformation par le léninisme etle stalinisme.
Elles sont donc des envers de l'histoire parce qu'elles sont aussi ces négatifs de ce qui aurait dû être ;alors qu'elles ont contribué au totalitarisme et aussi à une relecture de l'histoire souvent en invoquant des causesstructurelles comme « une lutte des classes » dans le cas du communisme.
L'utopie en effet dresse à rebours unelecture de l'histoire et de ses conséquences.
Et c'est pour cela que l'on peut parler d'un « envers » de l'histoire.
Transition : Ainsi l'utopie est bien cet « envers » de l'histoire mais si l'on peut y voir une composante positive il n'en reste pasmoins que cet envers en constitue une critique dans sa valeur, son sens et son fondement même.
L'utopie en effeta cette capacité de faire une lecture de l'histoire ou une projection sur l'histoire anhistorique dans une volonté deretour vers un âge d'or rêvé.
Et l'on passe bien souvent d'un « envers » de l'histoire à l'« à l'envers » de l'histoire.Néanmoins force est de constater que l'utopie ne reste « que » cet envers de l'histoire.
Pourtant ce serait sans doute se faire un concept de l'utopie non seulement trop pauvre mais surtout trop négatif de cette dernière.L'utopie n'est pas « que » cela, sans doute a-t-elle aussi un usage régulateur, c'est-à-dire prospectif pour la raison.
III – Utopie, Idée de la raison & usage régulateur de l'entendement a) En effet, l'utopie n'est pas « que » un envers de l'histoire ce serait méconnaître la dimension critique régulatrice qu'elle porte en son sein.
Et c'est bien en ce que Kant entend le terme d'utopie dans la Critique de la raison pure . L'utopie est effectivement une Idée de la raison c'est-à-dire qu'elle est d'un usage régulateur pour l'entendement.Plus simplement cela signifie que pour Kant l'utopie n'est pas tant un but à réaliser ou une critique sur une époquedonnée qu'une exigence de perfection à laquelle doit tendre l'homme.
Et c'est ce qu'exprime l'utopie dans ce« devoir être » qu'elle développe.
L'idée essentiel est cette question de devoir qui est en lui-même une obligationmorale.
L'utopie est donc un modèle que nous devons suivre afin de maximiser la perfection humaine.
Et ainsid'atteindre la fin de l'histoire comme il le développe dans la Critique de la faculté de juger . b) Le paradigme dont se sert Kant dans la Critique de la raison pure pour déterminer l'utopie est la cité de la République de Platon .
En effet, elle y est décrite comme « res publica phaenomenon ».
Elle définit la république parfaite à laquelle le législateur doit tendre.
Et c'est pour cela qu'elle est d'un usage régulateur.
Elle fournit uneimage non sensible, un schème, du concept de république.
Ainsi cette idée n'est pas vocation à être dans le mondesensible.
Elle est de l'ordre nouménal bien qu'elle est un usage dans le monde sensible en tant qu'elle induit desréformes et des améliorations à une situation ou à une société donnée.c) Pourtant, si l'on se situe bien sur le plan nouménal, il n'en reste pas moins qu'en bue d'une fin de l'histoire, dansla Critique de la faculté de juger , cette idée devrait se réaliser en même temps que l'union de l'intelligible et du sensible c'est-à-dire du nouménal et du phénoménal et cela dans ce que Kant appelle le « règne des fins ».
En effet, le peuple de la république, dans sa forme la plus parfaite, sera le schème de la communauté du royaume desfins.
L'utopie constitue donc un espoir asymptotique vers lequel on doit tendre.
Elle est une exigence de la raison.En ce sens elle n'est pas qu'un envers de l'histoire mais bien une visée de l'histoire qui ne signifie pas un retour enarrière.
Cependant, force est de constater que chez Kant du moins le « règne des fins » coïncide avecl'établissement d'un royaume de Dieu, c'est-à-dire d'un nouveau paradis construit par l'homme.
Peut-être ne s'agit-ilque d'une illusion ou d'une croyance mais il s'agit selon d'une croyance rationnelle qui est seule garante d'espoir..
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