L'utilité du langage ne consiste-t-elle qu'à communiquer ?
Publié le 09/04/2009
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En quel sens le langage est il un outil de communication ? Il est exact qu’à partir du moment où existe un état social, il faut bien qu’il y ait un moyen de mise en relation des individus entre eux, onc un moyen de communication. Les animaux eux-mêmes disposent d’un système de signaux qui répond au besoin de faire circuler de l’information, au minimum dans le but du partage des tâches. Langage et société vont ensemble. Le dire est énoncé une banalité. Mais le langage humain n’est pas fondé sur la nature du signal. Il n’est seulement fait pour déclencher des conduites. Il est un instrument d’information mais pas dans un sens conditionnel, mais dans un sens plus intelligent, car son objet c’est la signification grâce à l’usage de signes et non la manipulation des signaux. Il nous est nécessaire non seulement de nous exprimer, ce que nous faisons de toute manière avec notre démarche, nos gestes etc., mais surtout de communiquer et nous communiquons avec autrui au niveau du sens.
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esprit qui écoute, comprend et répond.
Ce médiateur, c'est la langue commune qui le fournit.
Le langage n'est pas leseul foyer d'expression de la subjectivité, puisque celle-ci rayonne déjà dans la présence corporelle, mais le langagedevient indispensable dès l'instant où c'est la pensée que veut se communiquer dans des idées.
Un regard, un gestene suffit pas à préciser une pensée, il y faut un langage capable de précision, de rigueur, et c'est là que doitintervenir la parole et l'échange des paroles.
Une pensée ne peut dialoguer en toute clarté avec une autre penséequ'au moyen d'un langage qui leur est commun.
Or la langue est là par avance disponible pour assumer cettecondition et rendre possible la communication des pensées.
La communication qui use du langage comme d'un médiateur peut pourtant ne pas réellement aboutir, abuser dulangage et oublier sa valeur.
Est-ce la faut du langage si les hommes ne parviennent pas à communiquer ? Est-ce aulangage que l'on doit la communication ? La communication peut se convertir en simple information.
L'enseignementà l'heure actuelle est d'abord informationnel.
Il effectue une transmission de savoir.
Il y a très peu de retour del'élève, de l'étudiant, vers le professeur.
L'enseignement reste axé sur une didactique d'information.
Croire que lesmoyens extrascolaire de communication seraient meilleurs est une illusion.
Le glissement de la communication versl'information est inscrit par exemple dans la structure de la radio et de la télévision.
L'auditeur et le téléspectateursont par avance placés dans une situation de passivité qu'il faut surmonter pour autoriser un retour qui engendreraitla communication effective.
Les masse média sont de prime abord informatives.
Ce n'est que par une mise encommun consciente, intentionnelle, qu'elles peuvent faciliter la communication.
La communication peut aussi très souvent dégénérer en polémique.
Il suffit que soit perdu de vue l'enjeu de lavérité, que l'accent d'une discussion soit détourné vers la personne et la communication devient une dispute, unealtercation où le langage n'a plus pour fonction que de donner de quoi propulser des injures.
La violence la plusélémentaire est d'abord une violence verbale.
Il suffit que la condition du respect de l'autre, de l'égalité de prise deparole n'intervienne plus pour que la communication cesse.
Le langage fournit à la violence ses premières armes, ilest l'instrument le plus adéquat pour diviser, opposer, rejeter, semer le doute et l'incompréhension.
La communication peut aussi subir l'effet de nivellement propre à ce qui est mis en commun.
La communication toutazimut tend à simplifier les complexités, à vulgariser à outrance, à aplanir ce que le dialogue de fond serait capablede souligner.
C'est d'ailleurs un reproche souvent adressé aux moyens modernes de communication que de ramenertrop souvent l'essentiel à de la banalité ou de l'élémentaire.
Michel Henry disait que les média corrompent tout cequ'ils touchent.
Ce qui est grand, beau, élevé, du seul fait d'être mis sur une scène de télévision, peut très sombrerdans le banal, l'insignifiant.
A ce titre, peut-on prétendre que les nouveau moyens d'information nous font beaucoupprogresser ? Il est agréable de penser qu'avec des moyens nouveaux de communication plus puissants, les hommescommuniqueront davantage.
Mais de nouveaux moyens de communication ne changent pas l'essence de lacommunication ni ce qui est communiqué.
Le média seul change.
On peut dire des banalités et des sottises dans laconversation courante autant que sur Internet.
Une communication par groupe de discussion ou par E-mail n'est pasdavantage communication qu'une conversation entre amis.
L'éloignement des personnes, la négation de la présencecharnelle ne favorise pas la communication.
Le langage reste là.
Il continue d'être un médiateur essentiel, et unmédiateur ambivalent.
Ce qui a été modifié avec l'apparition des nouveaux média, c'est la multiplication exponentielledes mises en relation.
C'est un peu comme si la conscience collective se tissait de relations de plus en plus étroites,alors qu'auparavant la communication était surtout intra culturelle.
Or le risque dont souffre la communication, c'estd'être victime de l'équivocité du langage, de mettre en relation des personnes, mais qui ne mettent pas dans lesmots le même contenu, ce qui entretient une mécompréhension mutuelle.
La communication, si elle n'est pas fondéesur une intelligence claire, une vraie culture et une sincérité mutuelle peut engendrer une confusion.
La rencontredes esprits qui fait la beauté de la communication est une rencontre au niveau du sens partagé, ce qui veut direplus que seulement brasser beaucoup de mots.
II.
Un langage pour dominer
L'idée que le langage est un instrument en appelle une autre, qu'il sert à manipuler son objet en vue d'une finquelconque.
Effectivement.
Le langage peut être utilisé comme moyen de pression, de domination et même demanipulation.
Dès que nous posons une fin à réaliser par le langage : vendre un produit, ramener à soi les suffragede l'opinion publique, assurer devant autrui le bien-fondé d'une croyance, d'un choix etc.
nous posons que lelangage doit être un moyen efficace de persuasion.
On appelle rhétorique l'art de bien parler en vue d'obtenir par la parole les fins que l'on poursuit.
Le rhéteur est celuiqui sait déployer toutes les ressources du langage pour tenter de plier la volonté de celui à qui il s'adresse pourobtenir de lui ce que l'on désire.
Ce qui résulte de la seule magie du discours ne créée qu'une persuasion et pas devraies convictions.
On ne retient rien de précis d'un discours très rhétorique, on n'y rencontre pas vraiment laconviction de raisons solidement enchaînées, mais seulement des opinions.
Inversement, pour être convaincu de lajustesse d'un point de vue, nous n'avons pas besoin de beaucoup de mots, mais d'une parole claire, véridique, muniede raisons.
Gorgias, face à Socrate, est intarissable, il est l'homme de l'éloquence, l'homme d'esprit qui brille ensociété.
Il est brillant et il sait de quel pouvoir il dispose à travers la rhétorique.
Platon nous présente au contraireun Socrate volontairement maladroit, mais incisif dans son questionnement.
Socrate ne fait pas beaucoup de longsdiscours mais assène question après question.
Il y a là deux manières de se rapporter au langage, celle du « beauparleur », du sophiste, qui cultive l'art de parler, et celle du philosophe qui cultive l'art de penser.
L'enjeu entre l'uneet l'autre consiste essentiellement dans l'alternative entre se servir de la parole comme d'un outil de manipulationd'autrui ou bien laisser la parole à elle-même comme d'une voie d'accès à la vérité.
Comprendre la parole comme voied'accès à la vérité rend nécessairement économe de ses mots.
La prudence devant le langage rend la pensée plus.
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