Lucrèce affirme: quel témoignage a plus de valeur que celui du sens ?
Publié le 08/04/2015
Extrait du document
«
selon cette loi la qualité de la sensation dépend de l'organe excité et non de l'excitant ; ainsi un courant
électrique produit une sensation visuelle à l'oeil, et sur la langue une sensation de salé.
Lucrèce a donc vu juste
: la qualité de la sensation dépend du sens qui perçoit ; un coup de poing, excitant mécanique, sur l'oeil fait
voir, comme on dit, « trente six chandelles » c'est-à-dire des sensations lumineuses vives et imprécises, sur la
peau il crée un sentiment de douleur.
Doit-on affirmer pour autant que les sens ne peuvent se corriger entre eux ? C'est aller un peu loin : si je
sens une odeur de rose et que je ne vois pas la fleur, je la cherche et généralement je parviens à la voir.
Si
j'entends miauler et que je vois un chien, je ne me contenterai pas de cette investigation et, même si je ne vois
aucun chat je ne penserai pas que le chien a miaulé.
Il n'est peut-être pas exact non plus de dire que chaque
sens ne peut se contrôler lui-même ; au contraire c'est ce que nous faisons couramment lorsqu'une perception
nous paraît incongrue : nous revenons alors sur le perçu pour nous efforcer de le comprendre et souvent ainsi
nous corrigeons notre première perception.
Bien plus, la psychologie de la Forme montre que nous pouvons
avoir une perception spontanée d'un objet et en susciter une autre sans que rien ne change, si ce n'est notre
manière de voir ; elle considère même que c'est en cela que consiste le travail de l'intelligence : à remanier
notre perception pour trouver une solution à se qui se présent à nous comme problème.
Mais n'y a-t-il pas un glissement de langage dans le texte ? Tandis que la première phrase affirme qu'aucun
témoignage n'«a plus de valeur que celui des sens », la dernière conclut « leurs témoignages en tout temps
sont vrais » : il y a confusion entre la valeur utilitaire du témoignage et sa vérité.
Lucrèce veut-il vraiment dire
que, parce qu'il est incontrôlable le témoignage des sens est vrai ? Evidemment non ! Il nous dit surtout qu'il
n'y a pas d'autre témoignage que celui des sens car la raison « est sortie d'eux tout entière » ; elle ne peut donc
les contredire : s'ils nous trompent « la raison tout entière est mensonge ».
Ce point de vue est empiriste et
peut très bien être récusé ; dans le texte dit « du morceau de cire » (2ème Méditation), Descartes montre que la.
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- Le témoignage des sens est-il digne de crédit ?
- « Si les sens nous induisent en erreur, la raison pourra-t-elle déposer contre eux, elle qui leur doit toute son existence ? » Lucrèce, De la nature, 1er s. av. J.-C. Commentez.
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