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L'ordre doit-il être toujours défendu ?

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Si l'homme est devenu homme, c'est bien parce qu'il s'est affranchi de la nature. Qu'il s'en rende de plus en plus maître, qu'il éprouve le besoin, comme le dit Hegel, de se sentir «partout chez lui», modifiant, ici, le cours naturel d'une rivière, construisant, là, une église, il ne doit pas oublier que sa raison n'est pas toute-puissante. Il doit reconnaître que la raison devient déraisonnable à partir du moment où, au nom de l'ordre, elle nie tout ce qui constitue également l'essence de l'homme: ses désirs, ses passions, son imagination. Nulle vie sociale n'est possible sans ordre, sans règles instituées. Mais la volonté politique de défendre l'ordre à tout prix n'est finalement que l'expression d'un désir morbide, d'un désir de mort. En effet, c'est tuer l'humanité de l'homme que de ne pas reconnaître sa riche, sa féconde, son insaisissable complexité.

« Il ne faut pas défend re l'ordre à tout prix • Déf endr e l'or dr e à tout prix implique d'avoir recours à des moyens viol ents et coercitifs.

Une société parfa itement ordonnée est une société tota lita ire qui couve en son sein les germes de la révolte.

Le désir d'ordre ne doit pas nier les différences (( 11 faut tout de même voir, dit Charles Péguy dans Notre jeu­ nesse, qu'il y a des ordres apparents qui sont les •la plus haute perfection de la société se trouve dans l'union de l'ordre et de l'anar­ chie.» Pierre Joseph Proudhon, Qu'est-ce que la Propriété? pires désordre s.» L' hit­ lérisme, rêvant d'une société «parfait e», en est arrivé à nier toutes ces diff érences entre les hommes qui font la richesse et la grandeur d'u ne natio n.

Ayant recours à la violence pour assurer l'ordre, il a semé le chaos et la mort.

L'h omme est un être désir ant D ans Les Chiens de garde, Paul Nizan écrit: «Je ne croirai jamais que le destin des hom­ mes soit une vie où tous les pouvoirs naturels sont offensés, où sont étouffées toutes les ten­ tations humain es.» Vou­ loir l'ordre à tout prix, c'est purement et sim­ plement nieda nature humaine.

La raison n' est pas tout 1 'homme doit pouvoir L exprimer et réaliser la totalité de son être.

Il est certes un être rai­ sonna ble, mais il est aussi un être sensible.

Ces mots de Paul Claudel devraient être connus de tout homme politique souhaitant sincèrement servir le bien commun: «L'ordre est le plaisir de la raison : mais le dé­ sordre est le délice de l' imagination» (Le Sou­ lier de satin).

L'ordre est nécessaire, mais il ne doit pas constituer une fin en soi.

Plus une société se veut ordonnée, plus elle brime les désirs.

Elle finit donc toujours par engendrer révoltes, violences et désordre.

- J. »

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