L'opinion constitue-t-elle un obstacle à la connaissance ?
Publié le 23/01/2004
Extrait du document
On appelle opinion un jugement du sujet qui est personnel à ce sujet, et qui n'est pas nécessairement juste. L’opinion est donc une sorte de préconnaissance, ou de préjugé, c'est-à-dire de pensée qui précède le jugement critique. L’opinion ne provient donc pas d’un cheminement de pensée critique susceptible de mener à la vérité, mais semble naitre d’habitudes, de normes sociales, d’idées reçues qui n’ont jamais été remises en question. Le terme d’opinion relève donc bien du champ de la connaissance, mais semble en être le parent pauvre, l’ennemi, ce contre quoi la connaissance se définit. Pour autant, on peut se demander si l’opinion est le point de départ de toute connaissance, ou si au contraire elle est un obstacle véritable obstacle à l’acquisition. Plus encore, en on peut se demander si la connaissance pure de toute opinion est vraiment possible.
I. La connaissance suppose une démarche critique individuelle
II. La raison comme faculté commune à tous les hommes
III. La connaissance véritable est-elle une connaissance dénuée d’opinion ?
«
pour vrai : il doit la vérifier, la prendre comme simple postulat et la pousser dans ses retranchements.Autrement dit, le rôle du scientifique est justement de remettre toute connaissance commune (fût-ellecommune à l'ensemble des scientifiques) en question.
B.
Nous arrivons donc à une conclusion bien paradoxale, que Nietzsche assume et formule clairement : « Mais cela ne revient-il pas, au fond, à dire que c'est uniquement lorsque la conviction cesse d'êtreconviction qu'elle peut acquérir droit de cité dans la science ? ».
En effet, une conviction qui ne vaut quecomme hypothèse perd toutes ses prérogatives de conviction.
D'où une critique de la conviction semblable àla théorie de Platon sur la connaissance : « La discipline de l'esprit scientifique ne commencerait-elle passeulement au refus de toute conviction ? ».
En effet, cela rejoint l'idée selon laquelle la recherche de lavérité suppose la remise en question et l'abandon de tous les préjugés (au sens littéral de « ce qui précèdele jugement ») et de toutes les opinions.
C.
Néanmoins, le paragraphe se clôt sur une phrase bien plus abyssale : « reste à savoir si l'existence d'une conviction n'est pas déjà indispensable pour que cette discipline elle-même puisse commencer ».
Nietzscheprésente ici une thèse essentielle à sa philosophie, qu'il formule de manière radicale et quelque peuprovocatrice dans Par delà Bien et Mal : pourquoi la vérité est-elle mise au dessus de la non-vérité, du mensonge ? en effet, si la véritable connaissance suppose de faire table rase de ses préjugés, de toutremettre en question et d'avoir une audace radicale de pensée, on peut, grâce à cette définition interrogerla vérité elle-même et se demander au nom de quoi elle serait une valeur ? « On voit par là que la scienceelle-même repose sur une croyance ; il n'est pas de science sans postulat.
» C'est ainsi que se termine leparagraphe du Gai Savoir : la vérité ne saurait se passer de toute croyance, puisqu'une première croyance est nécessaire pour engager la recherche de la vérité : la croyance en la suprématie de la vérité.
Ce queNietzsche montre, c'est que vouloir éliminer la croyance et la conviction de certaines disciplines rationnellesafin de garantir l'objectivité et la marche vers la connaissance véritable est illusoire, puisque la vérité nepeut échapper à la loi cruelle qu'elle énonce : tout doit être remis en question, jusqu'à la valeur de la vérité.Ce que Nietzsche montre, c'est que la critique exhaustive est impossible à tenir, la connaissance doittoujours prendre appui sur quelque opinion, celle de la valeur de la vérité par exemple.
Conclusion En conclusion, on peut dire que bien l'opinion est un obstacle à la connaissance, mais on ne peut ni faireen sorte qu'il n'existe pas, ni le considérer comme insurmontable.
L'apprentissage ne commence pas dans l'ignorancepour ensuite prendre la voie de l'opinion ou de la connaissance, mais elle commence au contraire dans l'opinion,c'est-à-dire dans l'idée préconçue, induite, sur laquelle on s'appuie pour vivre et agir.
Pourtant, l'opinion n'est pasnon plus complètement surmontable, puisque la recherche de la connaissance présuppose au moins une opinion (quine peut être critiquée ou remise en question sans dommages), celle de la valeur de la vérité..
»
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