L'oeuvre d'art est-elle une expression privilégiée de l'esprit ?
Publié le 22/02/2012
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auteur critique l'art, qu'il situe à trois degrés du réel et du vrai sur l'échelle des êtres.
Le premier degré est en effet celui des essences, c'est-à-dire des idées purement intelligibles et immatérielles, quicontient la véritable nature ou définition des choses, que le démiurge prend pour modèle lorsqu'il produit le monde.
Le second degré est celui des êtres naturels, c'est-à-dire des choses que nous voyons chaque jour, qui constituentle monde sensible et matériel auquel le démiurge a donné une forme.
Le troisième degré est enfin celui des apparences, c'est-à-dire des images des choses, qui comprennent les reflets,les ombres, les représentations que nous en avons naturellement ou que nous pouvons nous en faire.
T.:idée, lachose, l'image, c'est-à-dire le modèle, la copie et le simulacre, forment ainsi une échelle descendante d'êtres quivont du plus au moins parfait, chaque degré ayant moins de réalité que le précédent dont il est une copie.
Cette analyse conduit Platon à faire une critique radicale de l'art : il est soit inutile, car il ne fait qu'ajouter unecopie à une copie, soit dangereux, parce qu'il nous fait perdre de vue l'original et nous détourne finalement du réelet du vrai.
Il est essentiellement trompeur, parce qu'il prend ce qui n'est qu'une copie, c'est-à-dire la chose, pour unmodèle et peut aller jusqu'à inverser le rapport naturel de l'image à l'objet en cultivant cet effet.
Fart n'engendrealors que des illusions et n'a pas pour but d'exprimer l'esprit, mais de l'impressionner en le confrontant à soncontraire, le faux, plutôt qu'à lui-même et ses idées.
Il doit donc être condamné au nom de la vérité.
3.
L'art n'a pas de valeur en soi
Qu'en est-il donc de l'art et de l'esprit? Ont-ils les mêmes fins? Fun peut-il servir de moyen à l'autre? La réponse dePlaton est absolument négative : l'art, parce qu'il est une imitation de la nature, n'a affaire qu'à des copies, jamais àl'original.
Un art qui exprimerait l'esprit ne serait pas un art mais une science, comme la géométrie dont les figuresrenvoient immédiatement aux idées dont elles sont les signes sensibles.
Les fins et les objets de l'art ne sont doncpas ceux de l'esprit et la seule chose que l'on peut demander au premier est de ne pas faire obstacle au second.
Onne peut donc sauver l'art qu'en le mettant au service de la politique et de la morale.
Il faut mettre l'art sous tutelleet ne pas le considérer comme une discipline libre et autonome.Pourtant, l'art n'est-il vraiment qu'une imitation de la nature comme nous le dit Platon? N'imite-t-il que le visible, lachose et le sensible ? Ou peut-il prendre pour objet l'idée, l'invisible, les purs objets de pensée auxquels seul l'esprita accès? Peut-on le considérer comme l'expression privilégiée de ce dernier si le beau n'est pas sensible, maisintelligible?
II.
L'art n'est pas une imitation de la nature, mais la manifestation sensible du vrai
Pour Hegel, l'art est une expression privilégiée de l'esprit, car il a pour objet le beau, qui est la représentationsensible du vrai, c'est-à-dire de l'esprit.
Le but de l'art, conçu comme système des beaux-arts, n'est pas d'imiter lanature, mais de permettre à la conscience et à la subjectivité humaine, qui est invisible, de se manifester dans lesensible et de s'y rendre visible, pour se connaître elle-même au travers de ses oeuvres.
La fin de l'art n'estcependant pas celle de l'esprit, qui le dépasse infiniment.
Le premier n'est que le moyen du second, et la vie del'esprit passe par la mort de l'art: son dépassement dans la religion et la philosophie.
1.
Il ne faut pas opposer la matière et l'espritQuelle preuve tangible pouvons-nous en effet donner de l'existence de l'esprit qui est par définition immatériel etinvisible ? Comment en faire l'expérience, pour en avoir une connaissance objective ? L'esprit paraît en effets'opposer à la matière et se définit traditionnellement à l'aide de déterminations qui contredisent cette dernière.
Onle dit immatériel, donc inétendu et invisible, existant en soi et donné seulement à lui-même, c'est-à-dire àl'intelligence et non aux sens, tandis que l'on perçoit la matière par l'entremise de ces derniers comme une étenduevisible, existant en dehors de nous et indépendamment de nous.
La question est alors de savoir comment ces deuxsubstances peuvent s'unir pour former un être humain, un corps animé par un esprit ou un être doué de conscience,puisqu'elles diffèrent en nature et sont logiquement contraires, puis comment il est possible d'acquérir uneconnaissance réelle et objective de cet esprit, de cette conscience ou de ce sujet pensant, sachant qu'il estimmatériel et que le sujet qui s'oppose logiquement à l'objet ne peut sans contradiction être donné dans l'expérienceet se présenter à nous sous la forme d'un objet.
Le but de Hegel est de résoudre ces contradictions logiques à l'aided'une méthode proprement philosophique, ou dialectique, en montrant que si on ne peut prétendre avoir uneconnaissance objective, immédiate et directe de l'esprit, on peut cependant le connaître de façon indirecte etréfléchie, en l'étudiant au travers de ses oeuvres, c'est-à-dire de ses manifestations visibles ou de ses «phénomènes ».
C'est le propos de la Phénoménologie de l'esprit qui fait de l'art l'une de ses manifestationsprivilégiées.
2.
La beauté est union de l'essence et de l'apparenceQue vaut en effet l'opposition de la matière et de l'esprit? Peut-on dépasser leur contradiction logique? Existe-t-il untroisième terme qui puisse en opérer la synthèse? Le rôle de l'art consiste selon Hegel à mettre fin à cetteopposition logique et stérile qui n'est qu'apparente, pour découvrir l'unité dialectique et réelle de ces termes.Le travail de l'artiste consiste comme on le sait à informer la matière, c'est-à-dire à lui donner la forme qu'il a.
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