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l'œuvre d'art dit-elle la beauté du monde ?

Publié le 31/12/2023

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« Philosophie : l'œuvre d'art dit-elle la beauté du monde ? Contemplant le tableau “Les Coquelicots” de Claude Monet au Musée d’Orsay, le visiteur anonyme peut légitimement se dire que le tableau qui se trouve devant lui est la bonne voire la meilleure représentation possible de la beauté du monde.

A l’inverse, ce même visiteur pensera-t-il de la même manière lorsqu’il sera face aux “Raboteurs de parquet” de Caillebotte qui permet de presque toucher du doigt la pénibilité de ce dur métier du XIXème siècle ? A priori, il se dira plutôt que ce n’est pas vraiment l’idéal de ce que l’on peut se représenter de la beauté du monde.

Ces deux œuvres mises côte à côte peuvent ainsi semer le trouble dans une éventuelle mission de l’art comme révélateur de cette beauté.

Mais avant tout, définissons brièvement le mot “art”.

Il provient du latin “ars” et se réfère à l’habileté acquise, se distinguant de l’habileté naturelle.

L’art renvoie également au terme “technè”, c'est-à-dire le savoir-faire, les techniques.

L’art peut donc désigner aussi bien un talent, celui avec lequel on réalise une œuvre ou un objectif (l’art de plaire, par exemple), qu’un savoir-faire acquis et appliqué.

Quant à l’art des beaux-arts, il semble se distinguer dans sa finalité, à savoir la recherche de la beauté.

C’est alors le propre de l’artiste, mais encore fautil définir ce qu’on entend par beauté, autrement dit comment parvenons-nous à considérer un objet comme beau ? Y a-t-il un jugement logique, objectif, qui permette de déterminer certaines propriétés de l’objet comme beau ? Ou bien est ce que le jugement esthétique ne renvoie qu’à une notion de plaisir, c'est-à-dire la satisfaction que procure, tant à ses sens qu’à son esprit, la manière même dont la chose se présente à lui ? A travers toutes ces questions, nous nous demanderons si l’œuvre d’art a pour fonction de représenter la beauté du monde et si cela est indissociable du jugement esthétique ou non.

Nous commencerons par définir ce qu’est la beauté et celle du monde en particulier.

Puis dans un second temps, nous verrons si l’art peut (doit) représenter ce qui est beau, dans la mesure où l’on peut définir ce qui est “beau” (jugement esthétique). Tout d’abord, essayons de définir ce qu’est la beauté et le jugement esthétique.

On peut affirmer que quelque chose est beau si la notion de beau signifie la conformité aux goûts d'une époque et si on se place dans la position d'un spectateur habitué à une forme plutôt qu'à une autre de langage artistique (ou autre).

En effet, chaque individu a sa propre conception de l’esthétique, le beau est une notion relative et propre à chacun.

Par exemple, de nos jours, les peintres impressionnistes sont admirés alors qu'ils étaient à peine regardés à la fin du XIXème siècle.

Nous pouvons donc affirmer que l'homme a une certaine idée de la beauté qui lui est propre.

Comme nous l’avons dit précédemment, la notion de beau est relative.

Le spectateur et l'artiste n'aspirent pas forcément à la même notion du beau mais l'artiste ne tient pas compte de celle du spectateur au moment de la création de l’œuvre.

Il ne se conforme à aucun goût particulier, d'une époque ou d'une culture.

Le but serait donc de créer en exprimant le beau sans se soucier des différentes définitions du beau que pourraient porter les spectateurs sur l’œuvre de l’artiste.

Par exemple, Vincent Van Gogh a représenté dans son tableau “La nuit étoilée”, ce qui lui paraissait représenter au mieux la beauté du monde sans se préoccuper de l’avis des spectateurs quant à la représentation de la beauté qu'ils s’en feront car elle est propre à chaque individu. Mais s’interroger sur le beau, c’est aussi s’interroger sur les caractères universels et nécessaires qui constituent l’essence de la beauté.

Nos jugements de beau sont multiples, ils portent sur la nature, des objets, des divinités, etc.

En effet, n'importe qui peut trouver “beau” une peinture, une table, un arbre ou encore un oiseau.

La beauté peut donc être présente partout, il n’y a pas une certaine forme, érigée en norme, qui serait un modèle universel.

La beauté, pour Platon, ne peut pas être une propriété objective.

Elle dépend de celui qui en fait le jugement esthétique.

Par contre, « ce qu’il y a de beau » n’est qu’un exemple de beauté, qui pourrait tout aussi bien être laid pour une autre personne.

L’exemple le plus approprié serait de comparer les avis de plusieurs personnes sur un même tableau, certaines le trouveraient magnifique, alors que d’autres pourraient le trouver hideux. Chez certains philosophes, la beauté est seulement une illusion et l’artiste, à travers son œuvre, émet une fausse représentation de la beauté du monde.

C’est le cas chez Socrate, qui pense que la cause formelle de la beauté serait donc une illusion.

Ce propos est confirmé par Platon qui dit que l’art est une imitation mensongère de la nature et il affirme que celui-ci imite un objet dont Dieu en est le seul créateur.

Il sera ensuite suivi par Hegel qui dit que l’art est une imitation de la nature, mais que celle-ci est redondante, ridicule et ennuyeuse.

Donc par conséquent, en voulant rivaliser la nature par l’imitation, l’art restera toujours en-dessous de la nature.

Pour ces philosophes, la nature est donc au-dessus de toute chose et de toutes les représentations que l’on peut en faire. Finalement, il est possible que, plutôt que de chercher le beau dans l’objet, celui-ci existe dans la relation qui unit le sujet et l’objet.

En effet, cela ne serait pas la valeur de la matière ou son côté précieux qui est important, mais la manière dont l’artiste ou le créateur choisit et organise ses matériaux en vue de les intégrer dans son œuvre.

Par exemple, si un peintre choisit d’utiliser des feuilles d’or dans un tableau, cela ne serait pas les feuilles d’or en elles-mêmes qui seraient belles mais la manière dont le peintre les disposent et les organisent pour créer quelque chose d’harmonieux.

Ce qui rendrait beau quelque chose serait alors sa compatibilité parfaite entre sa conception et la fin à laquelle elle est destinée.

Pour mieux comprendre cette relation entre sujet et objet, il est possible de s’interroger sur le type de jugement auquel renvoie cette définition de la beauté d’un objet par rapport à un sujet.

Pour David Hume, tous les jugements de gout ne se valent pas.

En reconnaissant que le beau est une notion propre à chacun, il pense que le jugement que nous en faisons est alors subjectif car cette qualité esthétique ne se trouve pas dans l’objet que nous jugeons mais dans la représentation que nous en avons.

Autrement dit, l’objet n’est pas beau en luimême mais c’est le jugement esthétique que chacun s’en fait qui le rend beau.

Pour Kant, il existe deux types de jugement ; il distingue un jugement esthétique et un jugement logique.

Il considère que le jugement esthétique exprime notre sensibilité, soit un rapport subjectif entre le sujet et l’objet et il se base dans l’imagination de celui qui porte le jugement.

Le jugement logique instaure un rapport objectif entre le sujet et l’objet, où la représentation de l’objet exprime la connaissance liée à l’objet, mais non sa valeur subjective, celle que lui donne le spectateur.

De plus, Kant pense que quelque chose est beau lorsque cela plait universellement sans concept.

Autrement dit, quelque chose que tout le monde trouve beau est beau. Ensuite, la beauté du monde ne peut être réduite à une l’œuvre d’art, ni à la beauté en tant que telle.

La beauté du monde, dans le christianisme, est représentée par le Dieu incarné, assumant entièrement la condition humaine.

Selon Hegel, le beau artistique ne doit être confondu avec le beau naturel.

« La beauté artistique est la beauté née de l'esprit », c’est l’idée de l’artiste et l’œuvre de son imagination.

Et c'est en cela qu'elle se distingue de la beauté naturelle, celle que l’on considère présente dans la nature, et qu'elle la surpasse.

Pour lui, “le beau artistique est plus élevé, plus prestigieux, que le beau dans la nature”.

Car la beauté artistique est la beauté née comme deux fois née de l’esprit.

Or, autant l’esprit et ses créations sont plus élevés que la nature et ses manifestations, autant le beau artistique est lui aussi plus élevé que la beauté de la nature.

Le beau artistique dépasserait donc l'ordre de la nature puisqu'il traduit ce qui relève du sensible et ce qui relève de l'esprit. Enfin, il y a le degré de technicité par lequel nous apprécions une œuvre ou un objet qui devient une propriété.... »

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