Locke: Tolérance et souveraineté
Publié le 05/01/2010
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pas sans raison qu'ils recherchent la société, et qu'ils souhaitent de se joindre avec d'autres qui sont déjà unis ouqu'ont dessein de s'unir et de composer un corps, pour la conservation mutuelle de leurs vies, de leurs libertés et deleurs biens; choses que j'appelle, d'un nom général, propriétés.
124.
C'est pourquoi, la plus grande et la principale fin que se proposent les hommes, lorsqu'ils s'unissent encommunauté et se soumettent à un gouvernement, c'est de conserver leurs propriétés, pour la conservationdesquelles bien des choses manquent dans l'état de nature.
Premièrement, il y manque des lois établies, connues, reçues et approuvées d'un commun consentement, qui soientcomme l'étendard du droit et du tort, de la justice et de l'injustice, et comme une commune mesure capable determiner les différends qui s'élèveraient.
Car bien que les lois de la nature soient claires et intelligibles à toutes lescréatures raisonnables; cependant, les hommes étant poussés par l'intérêt aussi bien qu'ignorants à l'égard de ceslois, faute de les étudier, ils ne sont guère disposés, lorsqu'il s'agit de quelque cas particulier qui les concerne, àconsidérer les lois de la nature, comme des choses quels sont très étroitement obligés d'observer.
125.
En second lieu, dans l'état de nature, il manque un juge reconnu, qui ne soit pas partial, et qui ait l'autorité determiner tous les différends, conformément aux lois établies.
Car, dans cet état-là, chacun étant juge et revêtu dupouvoir de faire exécuter les lois de la nature, et d'en punir les infracteurs et les hommes étant partiaux,principalement lorsqu'il s'agit d'eux-mêmes et de leurs intérêts, la passion et la vengeance sont fort propres à lesporter bien loin, à les jeter dans de funestes extrémités et à leur faire commettre bien des injustices; ils sont fortardents lorsqu'il s'agit de ce qui les regarde, mais fort négligents et fort froids, lorsqu'il s'agit de ce qui concerne lesautres: ce qui est la source d'une infinité d'injustices et de désordres.
126.
En troisième lieu, dans l'état de nature, il manque ordinairement un pouvoir qui soit capable d'appuyer et desoutenir une sentence donnée, et de l'exécuter.
Ceux qui ont commis quelque crime, emploient d'abord, lorsqu'ilspeuvent, la force pour soutenir leur injustice; et la résistance qu'ils font rend quelquefois la punition dangereuse, etmortelle même à ceux qui entreprennent de la faire.
127.
Ainsi, les hommes, nonobstant tous les privilèges de l'état de nature, ne laissant pas d'être dans une fortfâcheuse condition tandis qu'ils demeurent dans cet état-là, sont vivement poussés à vivre en société.
De là vientque nous voyons rarement qu'un certain nombre de gens vivent quelque temps ensemble, en cet état.
Lesinconvénients auxquels ils s'y trouvent exposés, par l'exercice irrégulier et incertain du pouvoir que chacun a depunir les crimes des autres, les contraignent de chercher dans les lois établies d'un gouvernement, un asile et laconservation de leurs propriétés.
C'est cela, c'est cela précisément, qui porte chacun à se défaire de si bon cœurdu pouvoir qu'il a de punir, à en commettre l'exercice à celui qui a été élu et destiné pour l'exercer, et à sesoumettre à ces règlements que la communauté ou ceux qui ont été autorisés par elle, auront trouvé bon de faire.Et voilà proprement le droit original et la source, et du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif, aussi bien que dessociétés et des gouvernements mêmes.
128.
Car, dans l'état de nature, un homme, outre la liberté de jouir des plaisirs innocents, a deux sortes depouvoirs.
Le premier est de faire tout ce qu'il trouve à propos pour sa conservation, et pour la conservation des autres,suivant l'esprit et la permission des lois de la nature, par lesquelles lois, communes à tous, lui et les autres hommesfont une communauté, composent une société qui les distingue du reste des créatures ; et si ce n'était lacorruption des gens dépravés, on n'aurait besoin d'aucune autre société, il ne serait point nécessaire que leshommes se séparassent et abandonnassent la communauté naturelle pour en composer de plus petites.
L'autre pouvoir qu'un homme a dans l'état de nature, c est de punir les crimes commis contre les lois.
Or, il sedépouille de l'un et de l'autre, lorsqu'il se joint à une société particulière et politique, lorsqu'il s'incorpore dans unecommunauté distincte de celle du reste du genre humain.
129. Le premier pouvoir, qui est de faire tout ce qu'on juge à propos pour sa propre conservation et pour la conservation du reste des hommes, on s'en dépouille, afin qu'il soit réglé et administré par les lois de lasociété, de la manière que la conservation de celui qui vient à s'en dépouiller, et de tous les autres membresde cette société le requiert: et ces lois de la société resserrent en plusieurs choses la liberté qu'on a par leslois de la nature..
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