Locke: loi et interet
Publié le 18/10/2013
Extrait du document
« Une loi, suivant sa véritable notion, n'est pas tant faite pour limiter, que pour faire agir un agent intelligent et libre conformément à ses propres intérêts : elle ne prescrit rien que par rapport au bien général de ceux qui y sont soumis. Peuvent-ils être plus heureux sans cette loi-là? Dès lors cette sorte de loi s'évanouit d'elle-même, comme une chose inutile ; et ce qui nous conduit dans des précipices et dans des abîmes, mérite sans doute d'être rejeté. Quoi qu'il en soit, il est certain que la fin d'une loi n'est point d'abolir ou de diminuer la liberté, mais de la conserver et de l'augmenter. Et certes, dans toutes les sortes d'états des êtres créés capables de lois, où il n'y a point de loi, il n'y a point non plus de liberté. Car la liberté consiste à être exempt de gêne et de violence, de la part d'autrui: ce qui ne saurait se trouver où il n'y a point de loi, et où il n'y a point, selon ce que nous avons dit cidessus, une liberté, par laquelle chacun peut faire ce qu'il lui plaît. Car qui peut être libre, lorsque l'humeur fâcheuse de quelque autre pourra dominer sur lui et le maîtriser? Mais on jouit d'une certaine liberté, quand on peut disposer librement, et comme on veut, de sa personne, de ses actions, de ses possessions, de tout son bien propre, suivant les lois sous lesquelles on vit, et qui font qu'on n'est point sujet à la volonté arbitraire des autres, mais qu'on peut librement suivre la sienne propre.«
John Locke, Traité du gouvernement civil.
Mais la liberté comme absence de contrainte n'est qu'une définition négative de la liberté. Dire que la loi limite les contraintes qui nuisent à l'exercice de la liberté, c'est dire seulement que la loi donne les conditions d'une liberté possible. L'auteur va plus loin en affirmant que la loi permet une véritable autonomie. En effet, être libre, ce n'est pas seulement ne pas être « sujet à la volonté arbitraire des autres '" mais c'est aussi « librement suivre la sienne propre «.
«
CORRIGÉ
CORRIGÉ
•Éléments d'analyse
Notions en jeu
La liberté ; la justice et le droit ; la société et l'État ; le bonheur; autrui.
Repères principaux
Légal/légitime ; obligation/contrainte.
Problème
La liberté de faire tout ce que l'on veut semble la liberté la plus grande.
Pourtant très vite cette
liberté se heurte à celle de l'autre qui agit comme
une contrainte.
L'instauration de
la loi permet de garantir la sécurité des
individus contre
la liberté infinie des autres.
Mais alors, si la liberté de
chacun devient
possible, effective grâce à la loi, elle se trouve cependant
limitée par cette même loi.
Question
Quelle liberté la loi peut-elle garantir aux individus?
Thèse
Non seulement la loi garantit une liberté qui est absence de contrainte car
elle constitue une sécurité face à la liberté menaçante d'autrui, mais aussi,
elle donne l'espace nécessaire à la réalisation d'une véritable autonomie.
Structure du texte et procédés d'argumentation
• Dans une première partie (du début jusqu'à « il n'y a point non plus de
liberté»), l'auteur établit un lien entre la loi et le bien général qui répond aux
intérêts de chacun car
la fin de la loi est d'augmenter la liberté.
•
La seconde partie (de « Car la liberté consiste à être » à la fin) explique ce
paradoxe :
la loi préserve chacun des contraintes qu'autrui pourrait lui
imposer, condition de possibilité pour pouvoir disposer de sa personne et
de ses biens.
Remarques
• Pour comprendre ce texte, il faut s'interroger sur les fondements de l'État
et ce qui justifie le passage de l'état de nature à l'état civil, c'est-à-dire le
passage à la loi.
LA SOCIÉTÉ ET L'ÉTAT• SUJET m 1159.
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