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L'indicible chez Bergson et Hegel

Publié le 07/05/2022

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bergson

« L’ARTICULATION ENTRE LANGAGE ET PENSEE MISE A L’EPREUVE PAR LE CONCEPT D’INDICIBLE « L’idée de cercle n’est pas ronde », écrit Spinoza dans sa tentative de traduire le décalage entre la représentation par signes et ce que les signes représentent.

Le langage n’est pas une simple traduction analogique de la pensée ; autrement dit, l’adéquation parfaite entre le mot et la chose est illusoire.

Cette constatation nous amène à poser la question de l’indicible, adjectif substantivé qui renvoie à une déficience de l’expression.

Ici, la substantivation du terme n’est pas anodine : elle divise le réel en deux, d’un côté ce qui pourrait être décrit par les mots, et de l’autre ce que l’on ne pourrait pas dire.

Elle pose donc une hypothèse métaphysique qui limite de manière radicale la capacité du langage : il existerait une dimension de la réalité impossible à décrire par la parole.

Ce « manque à dire » peut aussi bien prendre racine dans le langage lui-même que dans la nature de l’expérience vécue.

On distinguera ici l’indicible de l’ineffable, qui renvoie à un sujet trop noble ou au caractère trop divin pour être verbalisé.

Si l'on se réfère à la morphologie, le préfixe latin -in, qui indique la privation ou le manque, bouleverse le domaine auquel il s'applique en le contraignant à l'intérieur de sa limite. Autrement dit, accepter l’existence d’un indicible, c’est manifester au langage ses limitations, en admettant l’impossibilité d’une coïncidence entre l’être et sa représentation linguistique. Le problème de l’indicible est par essence complexe à traiter, car lui donner corps suppose qu’il puisse en avoir un : comment parler de l’informulable ? Néanmoins, ce problème nous paraît d’autant plus intéressant qu’il amène à interroger l’articulation entre langage et pensée, signifiant et signifié.

C’est sur l’étude de cette articulation que se fonde l’antinomie entre les réflexions de Hegel et de Bergson, le premier considérant que les mots et l’esprit coïncident nécessairement tandis que le second a une conception plus instrumentale du langage.

Chez Hegel, l’indicible n’est vécu que sur le mode de l’impensé et n’a donc pas sa place au sein d’une philosophie conceptuelle ; Bergson y oppose une philosophie de l’intuition et rejette la raideur du système linguistique au profit de la souplesse de l’expérience vivante.

Nous aborderons cette antinomie entre les deux philosophes à travers un texte de Duras intitulé La Douleur, qui nous parait être une porte d’entrée à cette réflexion dans la mesure où la question de l’indicible au sein de la littérature du XXe siècle demande à être abordée sous le signe de la Shoah.

Au milieu des années 1980, une revue demande à Marguerite Duras de transmettre un de ses textes de jeunesse en vue de sa publication.

Au cours de ses recherches, Duras découvre un journal qu’elle avait oublié dans les placards de sa maison à Neauphle-le-. »

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