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« L'idée de cause et d'effet est dérivée de l'expérience qui, nous présentant certains objets constamment unis, produit en nous une telle habitude de les envisager dans cette relation, que nous ne pouvons plus sans nous faire sensiblement violence les envisager dans une autre. » Hume, Traité de la nature humaine, 1740. Commentez. ?

Publié le 05/05/2010

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hume

Aux yeux de  Hume la notion de causalité est très énigmatique parce qu'au nom de ce principe de causalité, nous affirmons à tout moment plus que nous ne voyons, nous ne cessons de dépasser l'expérience immédiate. Par exemple, au nom du principe de causalité (les mêmes causes produisent les mêmes effets, or l'échauffement est la cause de l'ébullition) je dis que l'eau que je viens de mettre sur le feu va bouillir ; je prévois l'ébullition de cette eau, je tire donc « d'un objet une conclusion qui le dépasse «. Tout le raisonnement expérimental par lequel je conclus du présent à l'avenir (l'eau va bouillir, la barre de métal va se dilater, demain il fera jour, etc.) repose sur ce principe de causalité.

 D'où peut donc me venir ce principe de causalité ? A quelle impression correspond cette idée ? L'« enquête « philosophique va se présenter ici comme une recherche dans toutes les directions :  « Nous devons procéder comme ces gens qui à la recherche d'un objet qui leur est caché battent quand ils ne l'ont pas découvert à l'endroit où ils s'attendaient à le trouver, tous les lieux voisins sans vue ni dessein déterminés dans l'espoir que leur bonne fortune les guidera enfin vers l'objet de leurs recherches «. Voyons donc où va nous mener cette battue philosophique.

hume

« dans le monde de la nature et se manifeste sous des formes aussi nombreuses et aussi variées.

Si Ies idéesque l'on peut et que l'on doit considérer à part pour les besoins de l'analyse restaient à jamais isolées les unes desautres, nous ne pourrions formuler aucune pensée, aucun raisonnement.Il faut donc qu'une force les lie les unes aux autres, de même que dans le monde physique une force lie les uns auxautres les corps célestes (sans elle, ils partiraient dans l'infini de l'espace, en ligne droite, à la manière d'une pierrelâchée par une fronde).

Cette force d'association des idées est spontanée (nous dirions aujourd'hui qu'elle estinconsciente). Hume distingue trois types d'associations: la ressemblance, la contiguïté, la causalité. L'association par ressemblanceUne idée en appelle une autre si, par un élément ou en totalité, elle présente une analogie avec celle-là.

Ainsi uninconnu dans la rue peut-il nous faire aussitôt penser à un ami parce qu'il a la même allure générale ou parce qu'ilporte une verrue sur le front comme lui.

L'association par contraste, bien qu'inverse, peut être considérée commeune variante: un inconnu très maigre peut nous faire penser à notre ami très gros justement parce qu'il y adissemblance accusée entre eux (après tout, l'homme n'aurait pas à ce point cru aux paradis religieux puis politiquess'il n'avait pas lui-même vécu de tels enfers). L'association par contiguïtéUne idée en appelle une autre si, par un élément ou en totalité, elle a été associée dans un même contexte spatialou temporel à une autre.

Ainsi une musique peut-elle nous faire penser à celui ou à celle avec qui nous avonscouché pendant les vacances, un soir de saoulerie.

La madeleine de Proust est un fameux exemple littéraire (et plusdistingué) d'association par contigüité. L'association par causalitéUne idée peut nous faire penser à une autre si elle en est la cause ou bien l'effet.

Ainsi une publicité pour voitureneuve peut faire penser aux inconnues que je pourrais séduire en cascade dans les rues.

Notons à ce propos quela publicité qui fuit le raisonnement comme une petite peste fonctionne exclusivement à l'association d'idées: lapoitrine du mannequin ne sert pas seulement à vendre telle marque de soutien-gorge, elle pointe vers le yaourt et letaboulé aussi bien. Pourquoi une telle attention à la causalité? Si Hume attache une telle importance à la critique de l'idée de causalité (plus d'un nul parmi les lecteurs serait eneffet en droit de se demander: pourquoi s'énerver pour si peu?), c'est pour plusieurs raisons.D'abord la causalité est un principe d'association des idées, l'un des trois principes.

Ensuite, l'idée de causalité estau coeur de tous les systèmes métaphysiques - que l'on pense au rôle exorbitant que l'on a donné à Dieu au xviiesiècle.

Les rationalistes pensaient que la relation de causalité est une déduction: de l'idée de la cause, je tire par laseule pensée l'idée de l'effet.

Hume le conteste: de l'idée de refroidissement, je ne pourrai jamais tirer celle deglace.

Si je le sais, c'est que je l'ai vu de nombreuses fois, que j'en ai fait l'expérience.Enfin, last bat not least comme disent les Anglais, la causalité semble dès le départ mettre en échec l'idée de basede l'empirisme.

Cette relation, en effet, conduit la pensée à passer d'une cause donnée (le feu) à un effet nonencore donné (l'ébullition de l'eau) mais seulement attendu.

Faut-il en conclure que l'esprit, par ses seulesressources, soit capable de dépasser l'impression reçue?Fine mouche, Hume cherche l'impression particulière d'où naît l'idée de causalité.

Qu'avons-nous dans la tête lorsquenous parlons de causalité? Tout d'abord une relation de contiguïté inscrite dans l'espace et le temps proches (le feutouche la casserole d'eau, l'ébullition suit immédiatement la chaleur du feu).

Même lorsque la cause et l'effetsemblent éloignés l'un de l'autre, nous supposons quelque chose qui les relie: si le soleil grille les feuilles des arbresl'été, c'est parce que son énergie chauffe l'air de manière excessive, l'atmosphère étant le lien entre le soleil et laplante. La causalité, entité illusoire. La causalité se réduit à une banale association d'idées, engendrée dans notre esprit par l'expérience et l'habitude :« Ainsi nous nous souvenons d'avoir vu un objet de cette espèce que nous appelons flamme et d'avoir senti unesensation de cette espèce que nous nommons chaleur.

Nous rappelons également à l'esprit leur constanteconjonction dans tous les cas passés.

Sans autre cérémonie, nous appelons l'une cause et l'autre effet, et inféronsl'existence de l'une de l'existence de l'autre » (Hume, Traité de la nature humaine, Aubier, p.

161).La causalité, fruit de l'habitude, d'un comportement acquis par la répétition d'expériences identiques, ne résulte pas. »

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