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Liberté et sécurité

Publié le 22/02/2012

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La sécurité, absence d'atteinte à ses intérêts notamment physiques et matériels, et la liberté semblent être chez l'homme deux biens constituant le bonheur, et à ce titre, l'homme a tendance à les rechercher à leur niveau maximal. Mais une première conception rapide de la liberté peut faire penser qu'elle compromet la sécurité. En effet la liberté conçue comme degré supérieur d'indépendance, « faire ce qu'on veut », peut porter atteinte à la sécurité du sujet, mais aussi, puisqu'il faut considérer l'homme dans sa dimension sociale, à la sécurité d'autrui. Réciproquement, la sécurité nécessite un certain nombre de règles et, à l'extrême, comme le dit Rousseau, nous ne sommes en sécurité que dans un cachot. Il semble donc y avoir un premier conflit entre cette liberté « naturelle » et la sécurité, et l'homme, dans sa recherche du bonheur, semble contraint d'établir une priorité entre ces deux biens. Mais dans ce cas là, que penser de l'exercice d'une liberté réalisée simultanément avec l'insécurité ? Ne serait-elle pas finalement contrainte par cette insécurité ?

« état de nature, est foncièrement belliqueux.

Il serait alors tenté d'exercer une violence sur les autres, car il seraitpoussé par les pulsions de son « ça » inconscient mais aussi parce que les hommes sont égaux en aptitudes (ils sontchacun capable de tuer).

En effet, connaissant cette égalité, chaque homme sera tenté d'imposer sa force surl'autre, que ce soit par plaisir ou par intérêt.

Dans cette hypothèse, les conflits sont nécessaires et suppriment lasécurité physique des individus (atteinte à leur corps).Mais la liberté met également en danger la sécurité matérielle ou subsistance de l'homme, quelle que soit sonattitude dans une société ou une nature non policée.

On peut en effet imaginer que, doté d'une liberté entenduecomme indépendance, l'homme ne soit pas tenté par la coopération avec autrui et préfère chercher à servir sesintérêts individuellement.

Or une analyse malthusienne des ressources porte à croire qu'elles sont en nombreinsuffisant, d'autant plus sans coopération entre les hommes.

Les intérêts de chacun seraient donc contradictoireset il y aurait une lutte pour la survie pouvant se traduire par des conflits par exemple liés à la nourriture ou à lapropriété.

La méfiance s'instaure alors entre les individus, et certains cherchent à assurer leur sécurité ensupprimant la menace qui pèse sur eux, c'est-à-dire en s'attaquant à d'autres hommes.Enfin, peut-on se passer de contrainte sociale tout en maintenant sa sécurité ? L'Etat ne guiderait-il pas le sujet, etl'instinct de survie ne serait-il pas un instinct grégaire, ou en tous cas lié à la conscience de groupe ? Par exemple,n'y a-t-il pas une peur de la liberté en tant qu'émancipation de la société ou au moins désengagement partiel entrel'individu et sa société ? En effet, la perte des normes et des repères peut déstabiliser la santé morale des individuset les mettre en danger.

Selon Durkheim, cette liberté causerait chez certaines personnes des suicides.

On peut eneffet imaginer que cette insécurité serait induite par la suppression de repères ou alors, chez les personnes trèsimpliquées dans la société, par le désespoir dû à la disparition de finalité dans leur vie.Finalement, la liberté qui consiste en une large indépendance des hommes semble insupportable et non souhaitable,quel que soit l'état dans lequel ils vivent.Selon la conception de Freud, l'homme qui ne s'imposerait pas d'obligations serait en quelque sorte esclave de sespassions (pulsions ou instincts de violence).

Il abandonnerait son libre-arbitre et donc toute liberté réelle.De plus, l'individu semble alors préoccupé uniquement par sa sécurité : comment limiter son insécurité matérielle ?Comment se défendre ? Si bien qu'il ne développe pas d'activité morale ou intellectuelle, il ne peut donc pas profiterde sa liberté ni espérer atteindre un bien-être supérieur.Au contraire, cet état d'inquiétude et de crainte à l'égard des autres et de sa conservation est finalement unecontrainte autant ou plus importante que s'il renonçait à son indépendance.

Sa liberté, par l'insécurité qu'elleproduit, s'annule elle-même.Non socialisé, l'état de nature ne semble pas souhaitable du fait de l'indépendance qui lui est lié : il n'en résulte pasde liberté effective, sinon une liberté théorique dont on ne peut jouir à cause de l'insécurité.

Donner la priorité à uneliberté conçue comme absence de lois (morales et politiques) conduit ainsi à une annulation de toute sécurité et,paradoxalement, de toute liberté.

La socialisation de l'état de nature semble donc indispensable pour assurer lasécurité, mais alors ne risque-t-on pas de voir disparaître sa liberté devant les contraintes de groupe ? Devant cet échec de la liberté comme indépendance, l'homme sera tenté, par réflexe ou suite à un raisonnementlogique, à concéder un peu ou toute sa liberté en échange de plus de sécurité.

Mais là encore, est-ce un boncompromis et un projet réalisable ?En remarquant que l'état de nature, belliqueux ou paisible, est insupportable par l'insécurité physique et matériellequ'il impose, l'homme peut décider de renoncer à sa liberté naturelle.

C'est-à-dire qu'il peut se résoudre à uneservitude volontaire en espérant améliorer sa condition générale.Pour sortir de leur état de nature, les hommes peuvent décider de tous confier leur liberté et leur volonté à untyran, un Léviathan pour Hobbes, qui aurait pour rôle d'assurer la sécurité de citoyens.

Pour ce faire, cette instancedevrait se doter d'un pouvoir absolu et diriger arbitrairement les hommes, par tous les moyens ne compromettantpas leur sécurité.

La violence existe toujours, puisque l'Etat en a le monopole, mais celui-ci a pour mission de n'enuser que pour se faire respecter et garantir l'ordre.Les hommes seraient d'autant plus contraints à respecter contrat de soumission et d'obéissance dans la mesure oule Léviathan inspirerait la crainte ou la terreur.

Ainsi, nul ne voudrait plus intenter à la liberté d'autrui.Néanmoins la solidité de ce contrat peut-être critiquée dans la mesure où il ne repose que sur une décisionponctuelle – abandonner ses libertés – puis sur la contrainte du pouvoir absolu.

Pour Spinoza, l'Etatne peut pas reposer sur la crainte car il pourrait être perçu par certains comme aussi indésirable que l'état deguerre.

Ces individus souhaiteraient peut-être, aux vues des changements dans leurs conditions, revenir sur leurrésolution.

Il faudrait au contraire que les hommes se rassemblent autour d'intérêts communs.

Le partage d'intérêtsserait un liant de la société et un fondement de la communauté politique bien plus fort.

En effet ces intérêts sontmotivés par des désirs dont Spinoza affirment qu'ils surpassent en puissance la volonté nécessaire à la création del'état hobbésien.De plus, cette forme d'Etat n'est pas sans comporter plusieurs dangers.

Par la crainte qu'il inspire, cet Etataccoutume les hommes à obéir aveuglément et automatiquement à l'instance de pouvoir, une fois leur renonciation àla liberté décidée.

Et comme l'Etat doit posséder tous les pouvoirs afin d'assurer son rôle, aucune place n'est laisséeà la contestation : un droit de rébellion rendrait impuissant le « Léviathan ».

Les hommes n'ont donc plus d'emprisesur un pouvoir qui, confié à un monarque, peut cesser de servir leur sécurité.

C'est par exemple le cas de l'Ancienrégime en France où le pouvoir royal instaure une insécurité matérielle dans le tiers-Etat, à cause de l'excèsd'impôts.

Cette dérive du contrat sécuritaire en un contrat supprimant à la fois liberté et sécurité laisse penser queces deux biens, s'ils peuvent être absents simultanément, ne s'excluent alors pas nécessairement.En cessant désormais de penser la liberté comme une indépendance ou absence de contraintes, n'existe-t-il pas desformes de liberté s'accordant avec la sécurité ? Quelles seraient alors les conditions nécessaires sur ces libertés ?Pour Spinoza, les hommes peuvent former des communautés tout en conservant leur liberté naturelle, à condition. »

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