Liberté, égalité, fraternité : y a-t-il un lien nécessaire entre ces trois exigences ?
Publié le 04/03/2005
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Il y a un lien indéfectible entre liberté, égalité et fraternité. Aucun de ces trois principes ne peut être réalisé sans les autres. Comment une société pourrait-elle être fraternelle et libre sans être en même temps juste ? Mais, en voulant imposer l'égalité, on crée une autre forme d'injustice et on est conduit à persécuter tous ceux qui ne pensent pas comme la majorité. La liberté totale ne conduit-elle pas, non à la fraternité, mais à la guerre absolue de tous contre tous ?
- I) Il y a un lien entre la liberté, l'égalité et la fraternité.
a) Du lien entre liberté et égalité. b) Du lien entre égalité et fraternité. c) Du lien entre fraternité et liberté.
- II) Il n'y a pas de lien entre la liberté, l'égalité et la fraternité.
a) L'égalité s'oppose à la liberté. b) La liberté s'oppose à la fraternité. c) L'égalité s'oppose à la fraternité.
.../....
«
peuvent être falsifiées par une égalité juridique formelle ou transcendante» (ibid.).
C'est le sens de nombreuxcombats, comme celui du féminisme.Mais comment être certain que la loi exprime bien l'intérêt général et non celui d'une classe particulière,s'érigeant en norme de toutes les autres ? En nivelant les différences factuelles, la passion de l'égalité nerisque-t-elle pas d'aboutir à une uniformisation unilatérale des individus, fort préjudiciable à la liberté
Il y a un lien entre égalité et fraternitéL'égalité ne peut être instaurée que si le sentiment de fraternité prévaut sur celui des différences.
Tant quecertains individus croient être meilleurs, l'égalité entre les hommes est menacée.
Il ne peut y avoir d'égalité si,au lieu de le considérer comme un frère et un égal, le noble se croit supérieur au prolétaire, le riche aupauvre, l'autochtone à l'étranger, l'homme à la femme, etc.
Il y a un lien entre fraternité et libertéLa liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui», stipule la Déclaration des droits del'homme et du citoyen.
En d'autres termes, ma liberté est limitée par le respect que je dois à l'autre.
Il n'y apas de liberté si chacun prétend pouvoir exercer sa propre liberté au détriment de celle d'autrui.
[En voulant imposer l'égalité, on crée une autre formed'injustice et on est conduit à persécuter tous ceux qui ne pensent pas comme la majorité.
La liberté absoluene conduit pas à la fraternité mais à la guerre.]
L'égalité s'oppose à la liberté[1.
L'égalisation des individus bride les énergies]Calliclès le soutient avec force contre Socrate dans le Gorgias : « La loi est faite par les faibles et par le plusgrand nombre.
C'est donc par rapport à eux-mêmes et en vue de leur intérêt personnel qu'ils font la loi.
» Afinde se protéger des plus puissants par nature, « les faibles » inventent un redoutable stratagème : faire passerleurs valeurs pour des valeurs absolues.
Égaliser les conditions signifie en ce cas brider les énergies des plusfougueux : « Ils racontent que toute supériorité est laide et injuste, et que l'injustice consiste essentiellementà vouloir s'élever au-dessus des autres : quant à eux, il leur suffit [...] d'être au niveau des autres, sans lesvaloir ».
Donner raison et pouvoir à celui qui vaut le moins par rapport à celui qui vaut le plus revient, pourCalliclès, à nier totalement la liberté.
[2.
L'égalitarisme uniformise les individus]La forme pervertie de l'égalité des droits, c'est-à-dire l'égalitarisme, induit ainsi une uniformisation desindividus.
Chacun devient interchangeable et finit par s'assoupir, perdant tout sens du devoir et de l'initiativequi pourrait l'élever au-dessus du rang commun.
C'est l'usage de la liberté lui-même qui est mis en péril.
Alexisde Tocqueville dénonce une telle mollesse sous la forme du « despotisme démocratique » : « Je vois une fouleinnombrable d'hommes semblables et égaux [...] chacun d'eux, retiré à l'écart, est comme étranger à ladestinée de tous les autres [...] les esprits les plus originaux et les plus vigoureux ne sauraient se faire joursans dépasser la foule » (De la démocratie en Amérique).
L'égalitarisme pouvait procéder, à l'origine, d'uneintention louable.
Mais il finit par dégénérer en laisser-aller et en démission de la raison : on délègue à autruijusqu'à sa liberté, dès l'instant que l'on conserve ses petits privilèges et son patrimoine.
La tendance des démocraties au despotisme chez TOCQUEVILLELa « tyrannie de la majorité » (Tome I, 11, 7 et 8) : la majorité est censée incarner la volonté du peuple etpeut donc légitimement imposer ses décisions à la minorité.
Elle risque d'abuser de son pouvoir, en opprimantla minorité.
Dans une société égalitaire, l'opinion publique toute-puissante exerce un « empire moral » sur leshommes : par peur de ne pas ressembler aux autres et convaincus que il y a beaucoup plus de sagesse dansbeaucoup d'hommes que dans un seul », ils se rallient à la pensée dominante.Le despotisme tutélaire : l'égalisation des conditions engendre l'atomisation du corps social etl'individualisme*.
Les citoyens désertent l'espace public et ne se soucient que de leur bien-être.
Ilsabandonnent l'exercice de leur libre-arbitre, en confiant à un pouvoir unique et central le soin d'administrerleur vie, de réglementer leur pensée et leur action pour garantir leur bonheur et leur sécurité.Considérablement étendu et renforcé, l'État exerce une tutelle absolue sur des citoyens complices.
[3.
Égalitarisme et totalitarisme]L'égalitarisme est ainsi une des conditions du totalitarisme qui procède, comme l'explique Claude Lefort, de « ladénégation de la différence » (L'Invention démocratique).
Le projet de maîtrise et d'uniformisation du système.
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