l'homme libéré du travail, n'est ce qu'un rêve ?
Publié le 05/08/2005
Extrait du document
Analyse du sujet
● Le sujet met en relation trois notions : l’homme, le travail, et le rêve. On s’interroge sur leur relation à travers la notion de libération.
- L’homme libéré du travail : ce serait l’homme dans le loisir ou l’inactivité : le loisir n'est pas l'inactivité, ou la paresse, mais une activité dans laquelle s'exprime une liberté. Il est l'occupation d'un temps libre.
● Le travail : le travail est l'activité qui, reposant sur le besoin, transforme le monde extérieur pour pouvoir le satisfaire. De ce point de vue, le travail relève de la nécessité. Il est alors élément essentielle de la condition humaine. La pénibilité du travail réside essentiellement dans ce caractère non libre dans l'activité. Le travail renvoie à l'utile, il ne va donc pas sans technique, laquelle visant à adapter les moyens à la fin dans le souci d'efficacité : le plus grand résultat pour le moindre effort.
● Un rêve : quelque chose qui ne peut se réaliser mais qui correspond à un désir. Si donc il ne s’agit « que d’un « rêve, comme l’exprime la formule restrictive du sujet, on suppose alors qu’il ne convient pas de le poursuivre.
- Présupposé du sujet : le travail serait de l’ordre de l’aliénation pour l’homme, et ne pourrait être compatible avec sa liberté totale. Il ne serait que contrainte ou obligation.
Problématique
Le travail repose sur le besoin. A ce titre, il doit se penser en rapport à l'utile. Il consiste en effet à transformer le monde extérieur pour répondre aux nécessités de la condition humaine. Dès lors, le travail assujettit l'homme à la nécessité. Mais, alors, pour autant que le travail est une nécessité de la condition humaine, l’homme ne peut que chercher à vouloir s’en libérer, notamment par la technique. De ce point de vue, on ne travaille que pour autant que c'est nécessaire, ce qui permet alors de libérer du temps libre, du loisir, lequel étant le moment de l'expression de la nature humaine et de sa liberté épanouie. Le désir de se libérer du travail passe donc par la technique. En ce sens, l’homme libéré du travail n’est pas un simple rêve.
Cependant, un homme libéré du travail serait-il encore un homme ? En effet, la liberté doit se construire, notamment par rapport à une donné naturelle à modifier. Or, si la technique permet de modifier la réalité extérieure, seul le travail est susceptible de modifier sa propre nature afin de la libérer de ses instincts. En outre, on remarque que la technique elle-même ne suffit pas à libérer l’homme du travail dans la mesure où elle suscite son propre développement, donc un travail permanent.
Le problème qui se pose est donc celui de la nécessité du travail pour que l’homme se constitue, et du la place que la technique peut jouer à l’égard du rapport de l’homme au travail. Permet-elle de le remplacer ou bien n’instaure-t-elle pas une nouvelle finalité pour le travail ?
«
– En effet, si la nature véritable de l'homme est la liberté, alors n'est-ce pas par le travail même que cette liberté peut se réaliser ? En effet, comme le remarque Hegel dans la Philosophie de l'esprit , loin d'asservir l'homme à la nécessité, le travail libère de cette nécessité.
En effet, si dans un premier temps, celui qui veut disposer de loisir, de temps libre, pour sepenser comme liberté, devient un Maître qui force l'Esclave à travailler, en un second temps, l'Esclave, en travaillant,devient le maître de la nature.
Car le travail s'accompagne du pouvoir et de la maîtrise de ce sur quoi s'effectue le travail.Mais en devenant le maître de la nature, l'esclave devient le maître de lui-même, c'est-à-dire qu'il se libère de sa proprenature.
En effet, si l'esclave accepte de travailler pour le maître, c'est parce qu'il n'est pas libre à l'égard de sa proprenature, qui apparaît sous la forme de l'instinct de conservation.
Je ne suis l'esclave de quelqu'un que parce que je suisl'esclave de moi-même, de mon instinct de conservation.
Autrement dit, je ne suis pas absolument libre, libre jusqu'àpréférer la mort.
Mais alors, le travail sur la nature libre l'Esclave de lui-même, et le libère donc du Maître.
Le maître, aucontraire, ne travaillant pas, laisse le donné ou la nature tels qu'ils sont, sans modification.
Il ne permet donc pas de selibérer en dépassant ce qui est donné.
Cette dialectique du maître et de l'esclave montre alors le renversement suivant :celui qui était l'esclave du maitre parce qu'il était l'esclave de lui-même, en travaillant, s'affranchit de lui-même et partant,du maître.
C'est alors le maître qui n'est plus libre, car dépendant du travail de l'esclave. – Cette analyse de Hegel permet de montrer que le loisir, entendu comme temps libre, ne peut alors certainement pas être le lieu de l'accomplissement de l'humanité de l'homme, à savoir la liberté agissante, la libération à l'égard des dépendancesde la nature, la fabrication d'un monde humain, d'un monde technique, dans lequel l'homme se réalise.
Le loisir est donc lalimite du travail en ce sens qu'il et repos en attente d'un travail ultérieur.
C'est alors le travail qui définit l'essencehumaine.
Le repos peut donc bien être le but apparent, la fin visée dans l'instant de l'effort mais, en réalité, c'est l'effortdu travail lui-même qui compte, comme liberté en acte.– On doit alors développer cette perspective : si la fin ou le but véritable du travail est la liberté, alors, le travail ne peut avoir pour terme que la liberté réalisée.
Néanmoins, et c'est tout le paradoxe, la liberté est elle-même sansfin.
Ceci a alors pour conséquence que le travail est également dépourvu de fin, dès lors qu'il vise la liberté.
La finvéritable du travail est-elle même processus infini, tâche toujours à recommencer.
Ce recommencement peut alorsprendre deux figures : celui du rocher que Sisyphe remonte chaque jour, et qui retombe au bas de la colline chaquesoir (Camus Le myhte de Sisyphe ) : le travail, tout comme Pénélope tissant sa toile en attendant le retour d'Ulysse, défaisant la nuit ce qui avait été fait la journée, serait éternellement recommencement, absurdité d'une libertétoujours à reprendre.
Mais ce peut être aussi la figure de l'infini d'une volonté qui se dépasse, se surmonte à chaquefois en un continuel progrès.
Éternel recommencement ou progrès sans fin, ces deux figures de la liberté supposentalors que le loisir n'est que le but apparent du travail, et non son but réel. 3.
Enfin, l'homme libéré du travail par la technique n'est qu'un rêve car la technique elle-même modifie la naturehumaine en la rendant désirante, et donc travailleuse.
- En effet, comme le remarque Rousseau, si à l'origine la technique naît d'un besoin pour que les individus puissent survivre, très rapidement elle transforme la nature première de l'homme.
Car, par la puissance qu'elleaccorde à l'homme, celui-ci en vient à se considérer comme au premier rang, d'abord par son espèce, puispar son individu.
En ce sens, La puissance technique associée à la conscience que l'homme en a génère enlui l'orgueil et la comparaison.
Cette comparaison permanente et la volonté d'être au premier rang de par lapuissance conduit donc à un développement technique permanent et est destructeur de la moralité del'homme car il génère des passions égoïstes (l'amour propre) au détriment des instincts premiers (l'amour desoi et la pitié).
La technique génère donc le désir de puissance infini de l'homme.
En ce sens, l'hommedésirant travaille pour le développement technique.
La technique génère le travail, loin de nous en libérer. - La manifestation la plus évidente et la plus claire de cette déviance de la technique, qui de moyen,devient finalité, consiste dans le fait que l'on travaille désormais pour la technique, celle-ci étantcomprise comme valeur ultime, comme le remarque J.
Ellul.
« On n'arrête pas le progrès ».
Derrière cetteinstauration de la technique comme finalité, l'homme paraît avoir perdu son pouvoir de liberté, cette dernièrefonctionnant de manière quasi-autonome.
On peut illustrer cette idée par l'exemple des rythmes de travail,imposés par la machine à l'ouvrier.
L'homme devient donc le serviteur de la technique. Conclusion Le rêve d'un homme libéré du travail par la technique ne peut donc a priori pas se réaliser, ceci pour deuxraisons bien différentes.
Tout d'abord parce que le travail est la condition de l'humanisation de l'homme, et sans laconfrontation à la contrainte, l'homme ne peut que rester dans un état naturel sans liberté, à la merci de sesinstincts premiers.
La seconde raison est que le moyen rêvé ultime de libération totale, la technique, produit enréalité des effets pervers qui conduisent simplement à changer l'orientation du travail, et non à le supprimer.
Letravail prend alors pour objet le développement technique et la réalisation des désirs humains infinis.
L'homme libérédu travail n'est donc qu'une chimère qui se contredit elle-même, et qui est ne peut trouver de moyen de se réaliser..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Dissertation : Le travail fait-il le malheur de l’Homme ?
- Le travail rend-t-il l'homme heureux
- HOMME ET LE RÊVE (L ) Mika Waltari
- Le travail dévalorise-t-il l'homme?
- ?Le travail est défini comme étant une action de l?homme