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L'homme injuste peut-il être heureux ?

Publié le 28/01/2004

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  • Première partie: le malheur est source d'injustice.
  • Deuxième partie: Peut-on soutenir que le malheur donne le droit d'être injuste ?
  • Troisième partie: Compassion et circonstances atténuantes.

Y a-t-il un lien indéfectible entre bonheur et justice de sorte qu’un homme injuste ne peut pas être heureux ou bien l’injustice peut-elle apporter des satisfactions telles que l’homme juste serait condamné au malheur ? Comment comprendre ce qui est réellement ce bien qui nous fait agir (le bonheur) : est-il relatif à nos désirs et à leur satisfaction ou bien est-il un concept rationnel impliquant de savoir ce qui est juste pour l’atteindre dans nos actions ?

« Cette fausse loi sous laquelle nous vivons est intrinsèquement fragile, puisqu'elle se maintient en s'appuyant sur unverbiage sans répondant, et grâce à l'absence momentanée d'un individu suffisamment fort pour la renverser en luiet hors de lui. Discussion de chaque argument Calliclès confond expression et représentation.

S'il est vrai que les lois représentent la masse, elles ont une réalitéqui ne lui est pas réductible.

La vraie question est donc celle de la spécificité du politique : un ordre d'existence queson absence de répondant réel n'autorise pas à qualifier d'illusoire.Calliclès suppose que l'homme est un être sorti tout constitué de la nature, c'est-à-dire qu'il est un simple vivant,alors qu'il est le produit des lois.

Il est donc absurde de considérer que les lois l'oppressent : elles le constituentcomme sujet.L'égalité conditionne l'idée même de loi, à la fois parce qu'elle doit être la même pour tous et qu'elle effectue laforme même de la réflexion, puisque réfléchir revient à se poser soi-même comme un sujet indifférent c'est-à-direjuridiquement égal aux autres.

La loi a la consistance de la réflexion, acceptée par le discours de Calliclès en tantque c'est un discours et non un pure violence.La cité, dit Aristote, exclut aussi bien ceux qui sont trop inférieurs (bestialité) que ceux qui sont trop supérieurs (lesdieux, les héros), puisqu'il est impossible à l'individu moyen de se reconnaître en eux.

Toute éducation a donc bienune dimension de dressage à la " semblance " (être le même que soi parce qu'on s'est soumis à ce qui rassemble lessemblables) c'est-à-dire à la médiocrité.

Cependant les dispositions exceptionnelles ne sont pas naturelles maishumaines (l'idée d'un gène de la musique, de la philosophie ou des mathématiques est absurde, puisque ce sont desréalités exclusivement culturelles) : les " dons " sont des attitudes envers le monde et surtout envers soi-même(une éthique) motivées par une situation en fin de compte toujours sociale.

Dès lors si la vie commune peut parfoisétouffer de grandes individualités potentielles, elle est cependant le seul lieu de leur possibilité.

En réalité le dangerreste très minime : être une personnalité d'exception étant une question d'éthique et non pas de nature, autrementdit la semblance étant une position subjective et non un état objectif, il faudrait des circonstances extrêmementparticulières et rares pour qu'un individu ne soit pas totalement responsable de sa vie.

Donc même si l'on admetcette absurdité que constitue l'idée d'un don naturel, l'argument de Calliclès qui attribue cette responsabilité à lasociété reste sans portée réelle.Calliclès confond le fait et le droit : la nature atteste de ce qui est, pas de ce qui doit être.

Quand il s'agit des loisde la cité, son invocation est donc nulle par principe.

D'autre part il confond l'universalité des lois de la nature quiest absolue ou a priori (si on ne la pose pas l'idée même de nature n'a aucun sens, et avec elle la simple éventualitédu savoir) et celle des lois de la cité qui est relative ou réflexive (c'est le rapport du peuple à lui-même).

Autrementdit il confond la réalité où s'effectue la nécessité des lois de la nature avec la représentation où s'effectue celle deslois de la cité.La culture n'a pas de répondant et c'est précisément en cela qu'elle s'oppose à la nature : l'arbitraire n'est pas safaiblesse mais sa force, puisqu'on peut seulement contester ce qui se présente comme fondé.

On n'obéit donc pas àla loi parce qu'elle est utile, mais simplement parce que c'est la loi.

Voulant fonder la loi dans la réalité, Calliclèsl'abolit donc : il n'y aurait plus que la nature.

Mais il réfute lui-même la thèse que cela pourrait constituer en prônantle droit du plus fort en déplorant un pouvoir que les faibles exercent...

pour la seule raison qu'ils sontmomentanément les plus forts.

On comprend ainsi que ce n'est pas du tout de la nature qu'il parle : devant êtreimposée d'une manière volontaire et non par la seule immanence de sa nécessité, cette " nature " est en réalitépurement idéologique, comme à chaque fois qu'on veut y voir un modèle.

Dès lors, la vérité de son argumentationapparaît à la fin du texte : il veut seulement un maître, grâce auquel il sera enfin débarrassé de sa liberté en sedissolvant dans la semblance universelle. Conclusion Ce discours, paradigme de tout recours à la nature pour décider des affaires humaines, est un exemple deméconnaissance projective : celui qui veut un maître attribue aux autres une nature d'esclaves ! La servitudevolontaire est le mobile caché de toute invocation d'un modèle naturel.

La méthode généalogique se retourne contreCalliclès. Introduction & Problématique " Tu ne vois donc pas qu'il est malheureux ? " .

Cette phrase souvent entendue appelle à la clémence celui qui, par exemple, jugerait sévèrement l'injustice du malade ingrat envers ceux qui se dévouent jusqu'au sacrifice à sonchevet.. »

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