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l'homme doit-il rechercher le bonheur ou chercher a se rendre digne du bonheur ?

Publié le 21/11/2005

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Aussi, sans rejeter la notion d'obligation, nous ne la mettons pas au premier plan et lui substituerons celle de bien ou de valeur. Nous dirons donc, non pas que la morale nous enseigne comment nous « devons » nous rendre soit heureux, soit dignes du bonheur, mais qu'elle nous montre l'idéal grâce auquel nous parviendrons au bonheur ou au degré de dignité qui nous méritera le bonheur.C. Par le fait même tombe l'opposition essentielle que KANT établit entre la vertu et le bonheur, 'opposition que seule parvient à surmonter, dans le monde des noumènes, la toute-puissance du créateur. Si on ne peut obéir à la loi par pur amour de la loi sans réprimer ses tendances naturelles et, par suite, sans renoncer à quelque chose de son bonheur, c'est tout naturellement, au contraire, que nous nous portons vers le bien et les valeurs; quand on se place à ce point de vue, vertu et bonheur coïncident. Qu'on ne dise pas que nous retombons dans une morale de l'intérêt. Dans la recherche du bien, ce n'est pas vers soi que l'homme est orienté, mais vers plus haut que soi; ce n'est pas le bonheur qu'il cherche, mais le bien sous ses diverses formes : ordre, justice, vérité, etc. Le bonheur, d'ailleurs, n'arrive jamais, que par surcroît, et celui qui se concentrerait à sa recherche le manquerait certainement. C'est la création des valeurs, la promotion du bien, qui nous valent les meilleures joies de la vie. CONCLUSION.

A peu d'exceptions près, les philosophes n'admettent pas la valeur morale du plaisir; ce mot, en effet, désigne presque exclusivement les satisfactions d'ordre sensible, dont ne saurait se contenter un être doué de raison. Leur jugement est tout autre quand il s'agit du bonheur, du moins si l'on entend par là un contentement de l'homme en tant que tel, c'est-à-dire en tant qu'être capable de connaître et de vouloir le bien.  Telle ne semble pas cependant être la pensée de KANT, qui écrit dans la Critique de la raison pratique (trad. Picavet, nouv. édit., p. 439) : « La morale n'est pas à proprement parler la doctrine qui nous enseigne comment nous devons nous rendre heureux, mais comment nous devons nous rendre digne du bonheur. « Tâchons de bien comprendre la pensée de KANT; nous nous demanderons ensuite si nous devons l'admettre sans restriction.

« la conquête du bonheur : elle nous enseigne « comment nous devons nous rendre dignes du bonheur ». II.

— APPRÉCIATION. Cette dernière proposition, notons-le d'abord, n'est pas très heureusement formulée, car, prise hors du contexte,elle risque d'être interprétée à contresens :elle pourrait faire croire, en effet, que nous pouvons rester centrés sur lebonheur par rapport auquel tout le reste ne serait que moyen.

alors que comme on l'a vu, c'est tout le contraire queKANT affirme : il n'y a qu'une fin morale, la vertu qui consiste dans la fidélité à là loi pour la loi elle-même; .cettefidélité nous rend dignes du bonheur; mais elle est voulue pour elle-même et non en considération du bonheur qu'elleconditionne.

Il serait donc préférable de dire : la morale nous enseigne, non pas comment nous devons nous rendreheureux, mais quelle doit être notre conduite qui, par ailleurs, nous vaudra le bonheur.

Que penser de cetteconception morale ? A.

On ne saurait trop approuver KANT dans son opposition aux Morales de l'intérêt personnel.

Si noble que soitl'intérêt, tant qu'on reste enfermé en soi-même, on ne s'élève pas au niveau de la moralité; on agit en homme avisénon en homme de devoir ou en homme de bien.

Il n'y a de conduite moralement bonne que celle qui nous porte versquelque chose qui nous dépasse et à quoi nous nous dévouons.Il est donc bien vrai qu'une morale bien comprise ne nous fige pas dans la considération d'un bonheur à atteindre:c'est un idéal à réaliser qu'elle nous propose. B.

Mais — et sur ce point nous nous séparons de KANT cet idéal est fait de biens et de valeurs à réaliser et non dedevoirs à accomplir ou de lois à observer.

La morale kantienne, en effet, nous paraît inacceptable en tant qu'elle faitdu devoir et de la loi morale un absolu.

L'absolu est le bien ou la valeur.

Ce n'est pas son obligation qui fait la bontémorale d'un acte; au contraire, c'est sa bonté morale qui le rend obligatoire.

Aussi, sans rejeter la notiond'obligation, nous ne la mettons pas au premier plan et lui substituerons celle de bien ou de valeur.

Nous dironsdonc, non pas que la morale nous enseigne comment nous « devons » nous rendre soit heureux, soit dignes dubonheur, mais qu'elle nous montre l'idéal grâce auquel nous parviendrons au bonheur ou au degré de dignité qui nousméritera le bonheur. C.

Par le fait même tombe l'opposition essentielle que KANT établit entre la vertu et le bonheur, 'opposition queseule parvient à surmonter, dans le monde des noumènes, la toute-puissance du créateur.

Si on ne peut obéir à laloi par pur amour de la loi sans réprimer ses tendances naturelles et, par suite, sans renoncer à quelque chose deson bonheur, c'est tout naturellement, au contraire, que nous nous portons vers le bien et les valeurs; quand on seplace à ce point de vue, vertu et bonheur coïncident.

Qu'on ne dise pas que nous retombons dans une morale del'intérêt.

Dans la recherche du bien, ce n'est pas vers soi que l'homme est orienté, mais vers plus haut que soi; cen'est pas le bonheur qu'il cherche, mais le bien sous ses diverses formes : ordre, justice, vérité, etc.

Le bonheur,d'ailleurs, n'arrive jamais, que par surcroît, et celui qui se concentrerait à sa recherche le manquerait certainement.C'est la création des valeurs, la promotion du bien, qui nous valent les meilleures joies de la vie. CONCLUSION. — Le tort principal de KANT a peut-être été d'admettre les présupposés psychologiques de ses adversaires les épicuriens.

Pour lai comme pour eux, l'homme ne cherche que son plaisir; ses tendances naturellessont toutes égoïstes.

Avec de tels présupposés, prétendre l'amener, à agir moralement est une gageure; aussi doit-il reconnaître que, depuis que le monde existe, il n'a peut-être pas été accompli un seul acte vraiment moral.Or, l'observation vulgaire nous le montre, nous cherchons bien moins le plaisir personnel que la réalisation d'uneoeuvre; nous aimons l'ordre pour lui-même et non pas seulement pour les avantages que nous comptons en retirer.Nous sommes axés sur le bien, et non sur le bonheur.

Dès lors, l'alternative que nous avions à discuter repose ensomme sur une ignoratio elenchi.. »

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