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L'HOMME, ANIMAL RATIONNEL? - « LA RAISON, NATURELLEMENT ÉGALE EN TOUS LES HOMMES » ? - « UN MERVEILLEUX ET ININTELLIGIBLE INSTINCT »

Publié le 06/01/2020

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Nous nous référons souvent à la raison sous la forme de l'adjectif (rationnel, raisonnable) pour qualifier des conceptions ou des comportements, des opérations ou des décisions qui nous semblent obéir à certains critères, répondre à certaines normes. La raison serait une cause dont on ne connaît que les effets, un principe qui ne se révèle que dans ses applications, une fonction qui n'est définie que par ce qu'elle produit. C'est pourquoi (on l'a vu), on la décrit

Aristote désignait la vie selon l'intellect, la pensée rationnelle et la contemplation, comme le bien le plus excellent de l'homme, constituant au plus haut degré l'homme même (Éthique à Nicomaque, X, 7). Définir l'homme par la raison (comme animal rationnel, ou, plus modestement, comme être raisonnable), n'est-ce pas utopique? Les

Telles sont sommairement, les quatre fonctions attitrées de la raison : induction, déduction, régulation, contemplation. Essayons à présent de cerner sa nature.

 

S'agit-il d'une réalité physique, par exemple d'une complication du système cérébral, dont la neurobiologie nous livrera bientôt les secrets ? On n'a jamais vu un homme raisonner sans cervelle. Pour raisonner, il faut avoir toute sa tête. Est-ce à dire que la raison s'identifie au contenu de la boîte crânienne ?

 

Devons-nous étudier la raison comme une simple fonction psychologique (à côté de la perception, de l'imagination, de la mémoire) ; ou comme la structure fondamentale de l'activité mentale et du comportement humain ? Dépend-elle essentiellement du langage ? Est-ce un idéal d'intelligibilité qui guide nos recherches et sollicite nos spéculations ? Une norme qui régit les opérations de l'esprit humain ? Un principe d'organisation commun à l'univers et à la pensée ? Une divinité qui gouverne toutes choses, comme l'ont affirmé Le Livre de la Sagesse, les Stoïciens, Leibniz, Malebranche (« la raison que nous consultons est une Raison universelle... immuable et nécessaire; elle n'est pas différente de celle de Dieu », Recherche de la vérité, dixième éclaircissement) ou encore la Convention Nationale qui, sous l'impulsion de Chaumette, instaura en 1793 le culte officiel de la déesse Raison, « ('Être suprême ne voulant d'autre culte que celui de la Raison » ?

 

Discutons chacune de ces possibilités.

« décrit assez bien ce pénible arrachement au monde de l'enfance: Ah! vous dirai-je, maman, Ce qui cause mon tourment? Papa veut que je raisonne Comme une grande personne Moi je dis que les bonbons Valent mieux que la raison! La raison, représentée ici par la volonté paternelle, impose un renoncement à la douceur sucrée de la mère nourricière.

Au principe de plaisir se substitue un principe de réalité, où l'obligation sociale remplace la jouissance d'une consommation insouciante.

Le raisonnement équi­ vaut à un rationnement des appétits et des émotions.

plus ou moins accepté.

Encore qu'on puisse affirmer, avec Hume, « qu'il n'est pas contraire à la raison de préférer la destruction du monde entier à une égratignure de mon doigt» (Traité de la nature humaine, trad.

A.

Leroy, Aubier­ Montaigne, t.

2, p.

525).

Mais cet usage égoïste et douillet de la raison semble assez éloigné de l'acception commune de la notion.

La raison se présente plutôt comme la clef d'un univers désenchanté où, quittant le monde égocen­ trique de l'enfance, nous avons à répondre de nos faits et gestes en fonction de critères de pertinence et d'utilité.

Ainsi, par exemple, la responsabilité civile suppose expressément la pleine possession des moyens rationnels.

« Pour faire un acte (juridique} valable, stipule l'article 489 du Code civil, il faut être sain d'esprit».

La perte momenta­ née ou durable de l'usage de la raison, lors d'un accès de folie ou dans le cas d'une déficience mentale chronique, atténue voire annule la responsabilité civile de l'indiv'ju.

Mais il ne suffit pas d'avoir toute sa raison pour parler et agir comme de raison.

Dans tous les cas, l'exercice de la raison suppose un dis­ cernement.

En effet, la raison peut être mise en œuvre à mauvais escient, et l'on peut raisonner à tort et à travers, comme le pauvre Sganarelle à la fin du Dom Juan de Molière (Acte V, scène 2), ou encore à vide (Acte Ill, scène 1).

La cohérence formelle d'un discours ou d'un comportement. »

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