l'historien peut-il être objectif ?
Publié le 20/11/2005
Extrait du document
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SUPPLEMENT ENVOYE PAR UN INTERNAUTE: l'objectivité des historiens
Il faut prendre au sérieux l'idée qu'il y a une objectivité historique, et qu'il s'agit d'un modèle concurrent de l'objectivité des sciencesexactes.
Tout d'abord, nous disions plus haut que l'historien ne dispose d'aucune méthode constituée qui garantirait son objectivité.
Est-ce bien unargument de non-scientificité? On peut dire aussi bien que l'historien est celui qui se sert des méthodes de toutes les autres sciences(démographie, statistiques, économie, etc.).
Michel de Certeau ( Histoire et psychanalyse entre science et fiction ) disait en ce sens que l'historien est un contrebandier, un homme des frontières et des marches, qui va importer dans sa discipline tout ce qui, des autressciences, peut lui servir.
On ne peut donc pas dire qu'il n'a pas de méthodologie, il les a toutes, et il se sert de toutes, à tour de rôle,selon le sujet qu'il traite.
L'essentiel, pour lui est de savoir de laquelle se servir, laquelle est la plus pertinente pour le sujet qui l'occupe.En ce sens, il est peut-être le seul "scientifique" à se poser la question de la pertinence des outils dont il dispose, le seul donc à pouvoirles remettre en question et à les maîtriser vraiment.
Nous disions également que l'historien n'atteint jamais aucune généralité.
On peut retourner ce reproche, en faire même la définition del'histoire.
Elle serait, paradoxalement "la science du singulier".
Toute autre discipline tend toujours à comprendre un fait ou un événementen le ramènent à autre chose, comme une loi générale.
L'historien essaie plutôt de comprendre un événement dans ce qu'il a de pluspropre, dans son caractère irréductible.
Au fond, comprendre un événement historique, c'est toujours comprendre qu'on ne peut leramener à rien d'autre, qu'il est unique.
Plutôt que le dissoudre dans une "loi de l'histoire", comprendre en quoi il échappe à cette loi.
Parexemple, Napoléon et Hitler ont tous deux échoué dans leur projet d'invasion de la Russie.
Mais il faut comprendre qu'ils ont échoué pour des raisons différentes .
En dégager une loi générale ("on ne peut pas envahir la Russie"), ce n'est pas faire de l'histoire.
Enfin, on reproche à l'historien d'être subjectif.
Par son objet d'études (les hommes), l'historien ne pourrait pas éviter d'être subjectif.
Onentend généralement par là qu'il court le risque permanent de projeter sa propre subjectivité, sa personnalité sur son objet d'étude, demélanger celui qui connaît (lui-même) et celui qui est à connaître (Napoléon, par exemple).
En fait, c'est méconnaître ce que fait réellement l'historien.
Certes, il a pour méthodologie d'entrer en sympathie avec celui qu'il étudie.Comprendre ce que quelqu'un a fait n'est possible qu'en se demandant ce qu'il voulait faire.
Il s'agit de s'identifier à lui, ce qui ouvrenormalement la possibilité de tous les malentendus.
Mais comme le montre Paul Ricoeur ( Histoire et Vérité ), lorsque l'historien "sympathise" avec un personnage, il ne le fait pas comme il le ferait dans la vie courante.
La subjectivité de l'historien est une subjectivité "élargie".
Il s'agit pour lui de savoir faire un bon usage de sasubjectivité, ce qui implique de se méfier de sa propre subjectivité et de pouvoir endosser n'importe quelle personnalité.
De sorte que, si la subjectivité du scientifique en elle-même est un facteur d'erreur, il y a deux moyens de la corriger: soit de la rédimer(sciences exactes, au de protocoles expérimentaux), soit de la dépasser par encore plus de subjectivité.
Dans son travail, l'historiencorrige et retravaille sa propre subjectivité.
conclusion : nous avons vu que la question de la scientificité des sciences prend tout son sens dans la mesure où elle peut être une invitation à dépasser la conception courante, trop étroite, de ce que c'est qu'une science.
Analyse du sujet
Un sujet très classique, interrogeant explicitement un thème du programme, l'histoire, mais qui, néanmoins, est porteur d'intérêtphilosophique et d'enjeux importants.
Le risque est de transformer le sujet en question de cours.
Or, aucun énoncé philosophique nerentre dans le type « question à réciter ».
Ici, attention, la déviation majeure vous guette.Lisez soigneusement l'énoncé.
Remarquez que l'accent est mis sur le verbe pouvoir (ici : avoir la possibilité de) et non point sur l'état defait en tant que tel.
Peut d'ailleurs s'ajouter une nuance de légitimité.
• Définissez les termes essentiels du texte :- historien: celui qui étudie « scientifiquement » le passé de l'homme, qui tente d'accéder au devenir des hommes et des sociétés, dereconstruire les « faits » donnés dans le devenir humain.- pouvoir: a) avoir la possibilité,b) accéder à la légitimité.- objectif : a) impartial, indépendant des intérêts et des goûts du sujet,b) qui accède à ce qui est commun à plusieurs esprits, à ce qui est valable pour tout être raisonnable.
• Sens du sujet : celui qui élabore un récit concernant le passé des sociétés humaines ou leur devenir a-t-il la possibilité d'accéder àl'impartialité ? L'historien possède-t-il des critères de jugement extérieurs à l'homme, aux sociétés, aux cultures ?
•Quel est le questionnement inhérent à l'intitulé ? Par quels traits l'histoire peut-elle représenter une science ? Comment, d'ailleurs,construire les faits historiques ? Est-il possible d'écrire l'histoire de manière scientifique ? Finalement, subjectivité et objectivité ne sont-elles pas liées en histoire ? Tel est le problème soulevé par l'intitulé, dont i'enjeu est manifeste : selon la réponse apportée, l'approchehistorique se révélera porteuse d'une signification différente.
Plan
Nous suggérons ici un plan dialectique, par thèse, antithèse et synthèse : il est particulièrement adapté à la question posée..
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