L'histoire comme réalisation de la liberté
Publié le 20/01/2004
Extrait du document
«
La Raisongouverne lemonde.
(LaRaison dansl'histoire)
Selon Hegel, l'histoire est rationnelle.
Certes l'histoireapparente nous montre le spectacle de la violence et dudésordre mais il faut se référer à l'histoire profonde quimanifeste la Raison.
Celle-ci n'est pas un principepurement individuel mais une puissance spirituelleimmanente à l'Univers.
Elle utilise comme instrument lespassions humaines.
Hegel nomme cette utilisation "la ruse de la Raison"
La scène du monde ne présente pas un chaos d'événements livrés au hasard et au caprice ; elle estrationnelle, ce qui signifie aussi que les événements, les guerres, etc.
sont gouvernés par la nécessité.
«De l'étude de l'histoire universelle même doit résulter que tout s'y est passé rationnellement, qu'elle a étéla marche rationnelle, nécessaire de l'esprit universel.
»Cette nécessité est pour Hegel le développement de la conscience de la liberté et sa réalisation au seinde l'Etat.
« L'histoire universelle est le progrès dans la conscience de la liberté, progrès dont nous avonsà reconnaître la nécessité.
»Qu'est-ce à dire ? Ce qui caractérise l'homme, l'esprit, est la liberté.
L'histoire est le temps nécessairepour que, d'une part l'homme prenne conscience de cette liberté, pour que l'esprit parvienne à laconnaissance que : « L'homme en tant qu'homme est libre », et que, d'autre part, cette connaissance seconcrétise dans le monde, se donne la forme politique qui lui correspond.
Ainsi Hegel propose-t-il unepériodisation de l'histoire humaine, où l'Idée de liberté, présente dès le départ, se déploie, s'éprouve et seréalise.« Les Orientaux ne savent pas encore que l'esprit ou l'homme en tant que tel est en soi libre ; parce qu'ilsne le savent pas, ils ne le sont pas ; ils savent uniquement qu'un seul est libre [...] Cet unique n'est doncqu'un despote et non un homme libre.
»Cela signifie d'une part que l'Idée de liberté, même sous forme unilatérale et frustre (un seul est libre), estprésente dès le départ, mais, de plus, que la conscience détermine l'être : ne pas se savoir libre, c'est nepas pouvoir l'être, et qu'enfin à toute conscience de la liberté correspond une forme politique adéquate,ici le despotisme.Selon le déploiement de la conscience de la liberté, chez un autre peuple se manifestera une phase plushaut, plus développée de l'Idée de liberté.« Chez les Grecs s'est d'abord levée la conscience de la liberté, c'est pourquoi ils furent libres, mais eux,aussi bien que les Romains, savaient seulement que quelques-uns sont libres, non l'homme en tant quetel.
Cela même Platon & Aristote ne le savaient pas ; c'est pourquoi [...] les Grecs ont eu des esclavesdesquels dépendaient leur vie mais leur belle liberté.
»Cette phrase implique d'autres conséquences, aussi essentielles.
La philosophie est fille de son temps.Ainsi même des philosophes aussi prestigieux que Platon et Aristote ne pouvaient « sauter par-dessus leurtemps » et comprendre que l'homme en tant qu'homme est libre.La philosophie ne fait que tirer au clair, rationaliser, comprendre la nécessité et les failles de ce qui est.On ne saurait condamner plus fermement le mépris du présent et les créations d'Utopie.
mais oncommence aussi à comprendre ce qui fait passer d'une phrase à une autre de l'histoire : c'est lacontradiction qui se manifeste dans la conscience que les hommes ont de la liberté, et par suite, dans laforme étatique qui en résulte.
Ainsi la belle liberté grecque, cette forme unique qu'est la « polis » se voitdépendante des esclaves, c'est-à-dire de son contraire : la servilité.En fin c'est dans le christianisme qu'émerge la conscience que « l'homme en tant qu'homme est libre, quela liberté universelle constitue sa nature propre ».
Cependant cette connaissance reste d'abord confinéedans la sphère intime de la religion (par exemple l'esclavage ne disparaît pas).
La tâche politique moderneest de transformer cette conscience en réalité, c'est-à-dire de la prendre pour fondement de l'ordrejuridique et étatique (comme la Révolution française a tenté de le faire, en ^laçant la liberté et l'égalitépour fondements de son régime).
Ainsi, « Cette application du principe aux affaires du monde, latransformation et la pénétration par lui de la condition du monde, voilà le long processus qui constituel'histoire elle-même.
»
On comprend dès lors, en partie, pourquoi « L'histoire présente le développement de la conscience qu'al'esprit, et de la réalisation produite par une telle conscience.
»On peut déduire de tout cela deux points centraux.• D'abord, la philosophie de Hegel est idéaliste.
Non pas au sens trivial (selon lequel serait idéaliste celuiqui aurait des idéaux) ; bien au contraire, cet idéalisme est méprisé et dénigré par Hegel.
Mais au sensvrai : c'est la conscience qui est première et qui détermine l'être.
L'idée de liberté est première et latâche historique est d'abord le déploiement de sa forme initiale et unilatérale jusqu'à sa vérité, ensuite saréalisation concrète dans le monde.• D'autre part, la conception hégélienne de l'histoire est tragique.
En ce sens d'abord que l'adaptation duprincipe au monde, de la conscience de la liberté à la réalité concrète, qui est par essence la tâchehistorique « exige un long & pénible effort d'éducation ».« L'histoire universelle n'est pas le lieu de la félicité.
Les périodes de bonheur y sont des pages blanches :car ce sont des périodes de concorde auxquelles font défaut l'opposition.
».
»
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