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l'expression « contemplation de l'oeuvre d'art » signifie-t-elle que nous soyons passifs dans le plaisir esthétique ?

Publié le 02/08/2005

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Il est rare que l'accès à une oeuvre soit immédiat: lorsque l'esprit a brutalement la révélation d'un style ou d'une oeuvre jusqu'alors méconnu, on constate qu'il était déjà imprégné de culture artistique le préparant à accepter un tel inédit (les cubistes et l'art « nègre «). Mais l'esprit non cultivé rejettera plus volontiers l'oeuvre en la trouvant choquante (la réaction des contemporains des cubistes au même art « nègre «).

- Ainsi, même si l'on devait constater que le temps de la contemplation est passif, il faudrait souligner combien cette passivité résulte d'un travail antérieur.

II. COMMENT ET QUE CONTEMPLE-T-ON ?

- Pour savoir si la contemplation est en elle-même passive ou non, il faut l'analyser précisément. Que vise-t-elle et comment (dans quelles conditions) a-t-elle lieu?

- S'il y avait passivité, cela signifierait que l'oeuvre d'art vient combler simplement une attente préétablie - c'est-à-dire qu'elle n'apporte rien d'imprévu. Or l'oeuvre véritable propose au contraire - à la sensibilité et peut-être complémentairement à l'esprit - un dispositif qui, n'étant pas en permanence présent dans le quotidien, s'affirme comme singulier. En quoi réside cette singularité?

L'art devient, dit-on volontiers, objet de consommation. Si résonne encore dans ce terme ce que l'on nomme «contemplation de l'oeuvre d'art «, cette expression signifie-t-elle que nous soyons passifs dans le plaisir esthétique, c'est-à-dire que ce plaisir spécifique suppose une totale absence d'activité intellectuelle ? L'expression « contemplation de l'oeuvre d'art « signifie-t-elle que nous soyons passifs dans le plaisir esthétique ?  

« probablement pour la raison que la spiritualité chrétienne ne suffit plus tout à fait aux besoins de l'esprit. Le beau est une idée, soit l'unité d'un concept et de la réalité.

Le concept est l'âme tandis que la réalité en estl'enveloppe charnelle.

Le beau est donc la manifestation sensible de cette unité ; il exprime une réconciliation.

Il estnaturel qu'il échappe à l'entendement qui sépare et qui divise, de même qu'à la volonté qui cherche à soumettrel'objet à ses propres intérêts.

Tout ce qui est libre, indépendant, infini, conforme à la seule nécessité de sonconcept, peut être dit beau.

De plus, un bel objet est vrai, puisqu'il est conforme à son être.

Cela implique qu'aucunorganisme vivant ne pourra être beau, parce que soumis au besoin, il n'a pas de véritable liberté.

Seule la beautéartistique peut être accomplie : elle représente l'idéal.

L'idéal est soustrait de la vie quotidienne imparfaite etinauthentique.

Il incarne l'universel dans l'individualité absolument libre et sereine : le symbole en est l'individualitéapollinienne, perfection d'harmonie et de forme, sérénité conquise sur la douleur.

En un sens, cette beauté idéaleest hors du temps et de l'histoire, symbole de l'éternité.

Si cet idéal de beauté est désormais révolu, alors qu'ilculminait dans l'art grec, c'est que l'organisation sociale et la production économique sont devenues prévalentes,soudant les individus dans des rapports de besoin, d'échange et de travail complexes et étroits.

L'Idéal ne peut pluss'incarner dans l'art, il s'est incarné dans l'État et la politique à la fin du xixe siècle et au cours du xxe siècle.

Onpeut toutefois remarquer qu'à notre époque présente, ces deux formations ne semblent plus animées par lesaspirations spirituelles les plus hautes des individus et de la collectivité.

Nous vivons dans l'ère du nihilisme queNietzsche avait diagnostiquée à la fin du xixe siècle.— Toute oeuvre se présente ainsi comme un carrefour où se rassemblent des significations et des contextes qu'ilappartient à l'esprit de parcourir:• Ex.

le goût artistique des ruines (méditation possible sur l'histoire, la civilisation, la mort, etc., à partir d'unetotalité formelle que l'esprit reconstitue par l'imagination). III.

LA PASSIVITÉ IMPLIQUE L'ABSENCE D'OEUVRE D'ART— Il existe cependant des secteurs où la pure consommation domine en effet, et s'accompagne de passivité.— Il s'agit précisément des secteurs dont les produits correspondent à une attente ciblée des publics:• musique de variétés;• littérature «de gare»;• imagerie sentimentale (sous-bois avec biche...).Ces objets ne sont pas «beaux », mais seulement «jolis », «grâcieux », «mignons », etc.— L'aspect formel s'y efface en effet au profit du seul contenu (préprogrammé).

Dès lors la qualité esthétiquedisparaît (on peut opérer la même remarque sur les formes d'« art engagé »).— De telles consommations n'impliquent aucun travail intellectuel ou spirituel et ne font que confirmer les « goûts »des consommateurs (ceux qu'on leur attribue ou qu'on leur impose).

Donc, c'est lorsqu'il y a passivité qu'il n'y a pasart. CONCLUSIONL'art n'est pas un pur «divertissement» (au sens pascalien).

Ce qu'il nous propose n'est jamais prédigéré et en fait,le terme de contemplation doit sous-entendre une activité spirituelle permettant au spectateur, lecteur, auditeur...de se hisser au niveau de l'oeuvre.

Il y a donc un processus d'enrichissement par l'art, qui provient, non pas de ceque l'oeuvre apporte seule, mais de la rencontre entre ses propositions et le chemin qu'aura su faire le«consommateur».. »

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