L’expérimentation en psychologie. Sciences et expérience.
Publié le 04/09/2015
Extrait du document
B. L’expérimentation au sens large. — Tout homme réfléchi est amené à expérimenter sur lui-même ou sur les autres, mais il est des spécialistes dont toute l’activité professionnelle se double d’une activité expérimentale analogue à celle des laboratoires.
a) C’est surtout parmi les médecins que, jusqu’ici, on trouvait le plus grand nombre de ces praticiens, qui étaient en même temps des expérimentateurs. Sans doute, ce n’est guère en soignant une pleurésie ou une fièvre typhoïde qu’on peut faire avancer la psychologie, mais il n’en est pas de même quand il s’agit de tumeurs ou de lésions cérébrales ou de troubles mentaux. Nombre de cas devant lesquels se trouve le chirurgien du cerveau ou le médecin des asiles sont des expériences toutes faites dont on n’a qu’à tirer la leçon. Parfois, d’ailleurs, il faut procéder à de véritables expériences : étant donnée l’incertitude qui règne dans certaines régions de la médecine, le médecin est amené à expérimenter divers traitements; ces expériences sont destinées à guérir le malade et non à augmenter le savoir; mais elles n’en sont pas moins utiles à la science que celles des chercheurs de laboratoires.
b) Plus récemment sont apparus les techniciens psychologiques, qui, dans bien des cas, viennent doubler le médecin : songeons aux spécialistes de l’orientation et de l'organisation professionnelle, aux éducateurs spécialisés dans le dépistage des anomalies mentales chez les écoliers ou
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PSYCHOLOGIE
tiennent à .ce que celle-ci a pour objet, non plus la matière inerte, mais un être conscient et des faitrs de conscience.
A.
Du point de vue moral.
- Ecartons d'abord une difficulté moindre, celle qui tient à la conscience morale.
Par suite de celle-ci, 1 'homme a une de~Stinée à atteindre, et on ne peut pas le traiter comme un moyen,
serait-ce comme un moyen de ;progrès rscientifique.
Les âmes sen·sibles protes,tent contre la vivisection des animaux, même si elle se justifie par ·les bes.oins de la recherche médicale.
A plus forte raison, une âme droite
protestera-t-elle contre des interventions qui amèneraient l'homme à faire
le mal ou le rendraient incapable de réaliser sa fin.
~Iai's, on le v-oit, si la morale limite, quand il s'agit de l'homme, le
domaine de l'expérimentation, elle n'interdit pas à l'expérimentateur toute intervention.
Les expériences instituées par les psycho-physiciens pour déterminer le minimum différentiel ou celle,s auxquelles ont recours les, psychologue,s pour préciser le meilleur moyen de fixer les souvenirs ne présentent rien de l'attentat contre la pef'sonne humaine.
De plus, il es.t des cas dans lesquels le re,spect de la perwnne humaine exige une inter vention, par exemple lol'sque des lésions cérébrale.s entraînent des troubles mentaux; sans doute, le chirurgien qui intervient aJ.ors cherche avant tout à guérir le malade, ma.is dans ce domaine enco-re aus,si o·bseur, il lui est impo·ssible de ne pas chercher à saYoir, et alors l'opération chirurgicale se double d'ume véritable expérimentation.
B.
Du point de vue psychologique.
- Des difficulté·s plus difficilement surmontables tiennent à la conscience psychologique, c 'es.t-à-dire au carac tère con.scient des faits que l'expérimentateur doit provoquer.
a) On pourrait dire d'abord que nous ne pouvons pas intervenir dans le domaine de la conscience comme dans celui de la matière : on ne manie pas les pensées et les 'sentiments comme les produits chimiques; le.
psy
chisme échappe à nos prises.
Comment dès lors provoquer méthodiquement les faits de C·onscienee qu'on désire observer P }[ais, si les expériences psychologiques ne peuvent pas se faire avec la
même précision que les expériences ph~'sique,s ou chimiques, il ne s'ensuit pas qu'elles soient radicalement impossibles : je puis susciter en moi une représentation ou un sentiment, et observer les modiflcalions qui s'cnsui nnt: je puis même von·S insulter ou vous flatter dans le but de noter vos réactions.
:\'ons avons une certaine pri·s·e sur n0'lre propre ps~-chisme et, par l'intermédiaire des causes extérieures, nous pouvons agir sur celui des autres.
L'expérimentation reste donc possible en p,sychologie.
b) Malheureusement, on peut objecter que, par suite de la conscience qui l'accompagne, l'e.rpérience provoquée par le psychologue ne présente pas une sérieuse valeur scientifique, d même on peut la considérer comme une expérience véritable.
Une réaction chimique, qu'elle se produise dans la nature et sans l'intenention humaine, ou bien dans une usine confor mément aux indications de l'ingénieur chimiste ou encore dans un labo ratoire de recherches désintéressées, est toujours identique à elle-même, et
le comportement des snsbtances qui se combinent n'est nullement affecté
par l'intention de ceux qui agissent sur elles.
Il n'en est pa5 de même des réactions psychologiques : 'si, au laboratoire de chimie, une " expé rience pour voir n réussit c-omme n'importe quelle autre, au laboratoire.
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