L'expérience joue-t-elle un rôle dans la formation des principes directeurs de la connaissance ?

« 384 MÉTAPHYSIQUE à la fois être et n'être pas, que le contradictoire est impossible, en sorte que, une fois assurés de la vérité d'une proposition, nous ne pouvons pas ne pas rejeter comme fausse la proposition qui .Ja nierait.

Ces axiomes, que l'on réduit ordinairement au principe de contradiction ou à celui d'identité et au principe de raison suffisante, constituent les principes directeurs de la connaissance.

D'où viennent ces principes P Depuis DESCARTES, la discussion de ce problème a fait l'objet de c0ntroverses qui ne sont pas encore terminées, opposant les empiristes d'après lesquels l'expérience suffirait à expliqner la formation des principes et les rationnalistes dont les plus radicaux font des principes une donnée indépendante de l'expérience.

Il faut bien accorder aux rationalistes que l'expérience ne suffit pas à rendre compte de la formation des principes rationnels : le caractère universel et nécessaire de ces principes ne saurait êti·e expliqué par une expérience particulière et contingente.

Mais l'expérience n'est-elle pas nécessaire et ne jouc-t-elle pas un rôle dans la formation des principes directeurs de la connaissance ~ L L'EXPÉRIENCE JOUE U1' RÔLE.

A.

La simple observation le montrf), la formation des principes ration­ nels n ·est pas indépendante de l'expérience au sens ordinaire du terme, c'est-à-dire de la prise de conscience du réel par snite de son action sm· nos m·ganes sensoriels : l'exercice de la raison ,suppose une matière sur lac1uelle elle s'exerce et cet.te matière est fournie par l'expérience; d'autre part, cet exercice est provoqué par les hesoins que cette expé­ rience excite en nous, en sorte que notre esprit resterait inerte si les données sensorielles· n'év,eillaient pas ses énergies latentes.

B.

D'aillenrs, tous les philos&phes le reconnaissent : si la formation des principes ne peut pas être attribuée à l'expérience, l'expérience est du moins la condition nécessaire de leur formation.

Pour PLATON, par exemple, les principes ont été acquis par l 'àme anté­ rieurement à son union au corps, par conséquent indépendamment de l'expérience; mais c'est l'expérience qui provoque la réminiscence sans laquelle nons les ignorerions.

DESCARTES est innéist·e, mais il a été amené à reconnaître qne l'innéi_té des principes se ramenait au pouvoir de les former et ce pouvoir est mis en jeu par l'expérience.

Dans la philosophie de KANT, les catégories qui entrent dans la cons­ titution des principes sont des formes a priori, c'est-à-dire ne devant rien à l'expérience; mais ces formes, éléments néce&saires de la pensée, ne suffisent pas à constituer la pensée; aux formes vides doit s'ajouter une matière, et cette matière est fournie par l'expérience.

Il.

QUELLE EXPÉRIENCE ET QUEL RÔLE A.

QueMe expérien~e 1 - Sans doute, l'expérience sensible sans la­ quelle nous ne nous éveillerions jamais à la vie de l'esprit.

1\lais, nous l'avons dit, pas l'expérience sensible seule : il ne suffit pas de voir de. »