L'éveil du génie critique : Recherche de la vraie méthode de la métaphysique (KANT)
Publié le 21/03/2011
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— Au moment où Kant déclare ainsi la métaphysique inutile et impossible, il ne laisse pas d'en chercher la méthode et les conditions. Il n'est donc sceptique que par accès et relativement à certains objets trop éloignés de l'expérience humaine. Ce problème de la méthode l'a occupé dès 1763. Il a fini par la trouver et cette méthode, ce devait être la Critiqua, dont il donnera la première exposition systématique dans la Critique de la raison pure (1781) : seulement elle le conduira à une conception de la métaphysique radicalement différente de celle qu'il avait eue d'abord en vue et dont il cherchait les conditions. Il n'est pas arrivé d'ailleurs tout de suite à comprendre que la Critique est la condition de la métaphysique. Dans ce progrès vers la conception définitive de l'œuvre philosophique on pourrait distinguer deux étapes préliminaires.
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lesquelles naturellement dépendent de nos organes et sont en quelque façon subjectives.
Il y a donc de ce chefune apparence des choses qu'il faut distinguer de la réalité.
D'autre part nous pensons, nous nous formons des idéesdes objets, et c'est par là, selon Kant, que nous atteignons la réalité.
Il y a en nous des concepts nés de l'action denotre esprit, et qui se rapportent véridiquement aux objets réels.
Ils ne nous en donnent pas l'intuition, mais ils nousen font connaître la forme ou la condition abstraite et générale, et cela nous permet d'interpréter l'expérience et dela dépasser.
Rien n'est donc plus nécessaire que distinguer ce qui dans notre manière de connaître n'a de rapportqu'avec l'apparence et ce qui se rapporte au réel.
Toute la discipline de la raison est fondée sur cette distinction.
Kant y a été conduit par ses réflexions sur une idée spéciale dont il se proposait d'éclaircir les difficultés, l'idée dumonde.
Le monde, c'est l'ensemble des choses, comme formant un tout et ayant une certaine unité.
C'est là une idéenaturelle et nécessaire.
L'esprit procède à la connaissance par analyse et synthèse.
En tant qu'il analyse, il s'obligeà trouver des éléments simples; en tant qu'il synthétise, il s'oblige à trouver une totalité absolue, sinon il necomprend rien.
Le simple et le tout sont les limites de l'activité de l'esprit et les conditions de la possibilité de sonœuvre.
Ceci posé, que la raison.
exige une totalité ou un monde, il s'agit de savoir ce qui en fait l'unité et quel estle principe de cette synthèse nécessaire.
Tel est le problème que Kant s'est posé.
Or voici qu'au cours de sesréflexions cette idée du monde lui paraît pleine de difficultés.
Cette totalité réclamée par la raison lui sembleimpossible.
Gomment faire un tout de l'infini de l'espace et du temps ? Il y a incompatibilité entre la synthèse queréclame la raison et les conditions d'existence des choses.
Mais k difficulté n'est insoluble qu'autant que l'on fait du temps et de l'espace les vraies et objectives conditions dela réalité ; tout s'expliquerait au contraire si l'on considérait ces intuitions comme des lois ou des formes de lareprésentation.
Il y aurait alors deux mondes : celui de la représentation qui ne peut être conçu comme une totalitéet qui se déploie dans le temps et l'espace infinis, et celui de la pensée, c'est-à-dire le monde réel, qui n'étant passoumis aux conditions de l'espace et du temps comporte la totalisation.
C'est ainsi que Kant est amené à distinguerla sensibilité et l'entendement, à reconnaître la subjectivité du temps et de l'espace et à en faire les lois nécessairesde la représentation.
Et voilà déjà constitué ce qui sera plus tard l'Esthétique transcendantale.
D'ores et déjà troisconclusions des plus importantes suivent de ces affirmations.
D'abord les sciences qui ont pour objet les choses situées dans l'espace et dans le temps sont des sciences del'apparence.
Et les plus hautes et les plus abstraites, les mathématiques, sont les sciences des conditions formellesde tout objet représenté.
Elles n'en sont pas moins valables, car elles s'appliquent nécessairement à tout objetdonné dans la représentation.
Mais la métaphysique qui est la science du réel est au delà des sciences, dans une autre région.
Elle opère surd'autres notions, les données de l'entendement pur, qui convergent toutes vers deux idées capitales, conceptionsdes deux formes de l'idéal : l'idéal du réel, à savoir Dieu ou l'être nécessaire, et l'idéal de l'action ou la perfectionmorale.
Par suite, et enfin, il faut bien se garder, quand on spécule sur les réalités qui sont l'objet de la métaphysique, deleur appliquer les notions ou les lois qui n'ont de rapport qu'avec l'apparence.
C'est pourtant ce que l'on fait sanscesse, et de là viennent la plupart des erreurs des métaphysiciens.
Kant ne se contente pas de signaler en généralcette source d'illusions.
Il s'applique à définir et à décrire minutieusement tous les sophismes que l'on fait lorsquel'on transporte à la réalité absolue ce qui n'est qu'une condition de notre représentation.
Et c'est en cela qu'ilexplique surtout ou uniquement dans cet écrit ce qu'il ne faut pas faire en métaphysique.
Ce qu'il faut faire, il seréserve de le dire plus tard ; seulement il va bientôt découvrir qu'il n'y a rien à faire et c'est alors seulement qu'ilsera en possession de toute sa doctrine..
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