Lettre de Descartes à Elisabeth – Egmond, 4 août 1645 (commentaire)
Publié le 03/05/2012
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Le philosophe du XIXème siècle René Descartes établit une correspondance jusqu’à sa mort avec la princesse Elisabeth exilée en Hollande, et ceci afin d’aborder certains points de philosophie. Ce procédé permit à Descartes de faire découvrir de nouvelles facettes de la pensée à Elisabeth tout en ayant la possibilité de se confier. Le texte dont il est ici question est extrait de cet échange, plus précisément d’une des lettres à Elisabeth du 4 août 1645 et traite d’un thème qui concerne tout un chacun : il s’agit ni plus ni moins des règles à observer en vue d’atteindre le bonheur. En somme, Descartes tâche de définir ce qui est susceptible de rendre un homme malheureux, et le désir en fait partie, mais il se demande aussi s’il s’agit là d’une fatalité ; existe-t-il des moyens de combattre ce qui nous empêche d’accéder au bonheur ? Descartes se charge donc ici de déterminer ce qu’est le bonheur et tente même de définir ce qui empêche concrètement l’homme d’être heureux. Par la suite, il s’interroge : comment peut-on s’en débarrasser ? Enfin, il s’agira de s’intéresser au rôle du désir ; Descartes fait une certaine distinction entre les désirs raisonnables et les désirs déraisonnables qui jonchent aussi bien les uns que les autres la voie qui mène au bonheur.
«
consiste à vivre en accord avec la nature et la raison pour atteindre la sagesse et le bonheur, et qui
aujourd’hui désigne toute attitude caractérisée par l’indifférence à la douleur et le courage face aux
difficultés de l’existence.
Pour Descartes, il y a dès lors deux sortes de choses qui réussissent à faire
parvenir l’homme à un contentement sans faille : il y a tout d’abord ce qui est appelé l’heur, soit ce qui
dépend de nous comme la sagesse ou la vertu, et la béatitude, soit ce qui ne dépend pas de nous,
comme « les honneurs, les richesses et la santé ».
Il paraît alors évident que la béatitude est une
source inconditionnelle de bonheur chez Descartes : il prend l’exemple d’un homme qui ne serait pas
gâté par la nature, car malade et « contrefait », et il apparaît clairement qu’il aura de toute évidence
plus de chemin à parcourir sur la voie du bonheur qu’un autre qui serait « bien né » et à qui la fortune
sourit, même si les deux individus possèdent en tout point le même degré de sagesse.
Voilà pourquoi
les hommes qui n’ont pas reçu ces dons de la nature auront beaucoup plus de mal à être heureux : le
désir est source de malheur car il n’est jamais contenté.
Un homme peut souhaiter posséder ces
choses qui rendent heureux mais il n’atteindra pas la béatitude et le contentement de l’esprit,
tellement essentiel au bonheur.
Par ailleurs, il ne peut chercher à obtenir de dons de la nature ;
l’attribution de ces qualités n’est aucunement en son pouvoir, « la recherche en serait superflue ».
Le bonheur n’est pas chose aisée à atteindre mais le philosophe se propose tout de même d’établir
des règles à suivre afin de se débarrasser des démons qui feraient obstacle au bonheur.
Partant du
principe qu’ « un chacun se peut rendre content de soi-même et sans rien attendre d’ailleurs », il
présente trois principes de morale qu’il suffit d’observer pour être heureux.
Dans le Discours de la Méthode, Descartes examine trois règles de morale essentielles au
bonheur qu’il évoque dans cette lettre à Elisabeth.
Mais que prônent-elles ?
Descartes cherche à se débarrasser de toutes ses anciennes connaissances, tous ses préjugés, bref
il veut faire table rase du passé.
Mais il lui faut tout de même une base de réflexion en attendant
d’élaborer vraiment sa philosophie.
Les trois maximes qui s’appliquent à tout homme sont alors une
ébauche des conditions du bonheur.
Car Descartes relève trois principaux obstacles au bonheur de
l’homme : le désir, le regret et le repentir, tout en distinguant ces trois notions.
Le regret concerne
principalement une action qui n’a pas eu lieu ; l’homme regrette généralement ce qu’il n’a pas
accompli.
Alors que le repentir, au contraire, concerne toujours quelque chose que l’homme a fait ; il y
a certes une forme de regret mais aussi on trouve une certaine volonté de corriger un mal qui a été
commis.
Pour résumer, le regret tout comme le repentir sont deux sentiments liés au désir : lorsqu’un
être humain éprouve des remords ou qu’il regrette une action qui s’est, ou non, déroulée, c’est qu’au
fond on peut trouver un certain désir que la chose se soit produite (ou non) finalement.
Ainsi, le
principal obstacle au bonheur pour Descartes est le désir, sous la forme du regret ou du repentir.
Pour
remédier à cela, le philosophe offre une solution permettant de passer outre ces obstacles : la raison.
Nous arrivons alors au rôle tenu par les maximes de la morale.
La première demande à la raison de rester modérée dans les décisions qu’elle suivra et de s’éloigner
le plus possible de toute forme d’excès : atteindre les extrémités d’une pensée n’est jamais en soi
positif.
Tout homme doit toujours se servir « de son esprit pour connaître ce qu’il doit faire ou ne pas
faire en toutes les occurrences de la vie ».
Quand la raison reçoit plusieurs opinions, la solution est
alors de choisir la plus mesurée, car moindre source d’ennui ou de mauvais résultat.
La seconde
maxime ici énoncée demande à l’être humain « d’exécuter tout ce que la raison lui conseillera, sans
que ses passions ou que ses appétits l’en détournent ».
Descartes propose alors, au cas où la raison
ne pourrait se résigner à élaborer une opinion certaine, de suivre celle qui paraîtra la moins douteuse
et risquée à l’esprit, et de s’y tenir comme si elle était vraie et parfaitement avérée.
Dans le Discours
de la Méthode, cette maxime est illustrée par un exemple : des voyageurs égarés dans une forêt ne
feraient-ils pas mieux, au lieu de rester sur place à s’interroger vainement, de se diriger vers un
chemin quelconque, et de se dire que, quelque part, au bout de ce chemin, ils trouveront une sortie ?.
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