Les utopies, chimères ou réalisables ?
Publié le 23/02/2024
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II- Les utopies : chimères ou réalisables ?
Ainsi, le mot utopie est en lui-même un paradoxe : en même temps le
lieu de nulle part et la société idéale, il est intéressant de se demander si ce ne
sont que de simples rêves inutiles, des fantasmes plutôt que de réels modèles
auxquels les hommes pourront un jour se calquer.
A) Une chimère, un fantasme
En effet, aujourd’hui l’adjectif utopique en est davantage venu à
signifier impossible et apparaît comme un fantasme irréalisable, un lieu de
nulle part rêvé par des humanistes qui, peut être trop soucieux du bien être
humain, oublieraient la limite entre le rêve et le rationnel.
Si le sens du mot
devient réellement péjoratif à partir du xixe siècle, certains humanistes et
philosophes ne manquent pas de critiquer cette vision idéaliste du monde,
notamment Nicholas Machiavel à la Renaissance, lui-même un humaniste
(auteur de l’art de la guerre) et le philosophe néerlandais Baruch Spinoza à
l’époque moderne (XVIIe).
C’est dans son traité Le Prince écrit au début du XVIe siècle que
Machiavel écarte les ouvrages des auteurs qui ont imaginés des systèmes
idéaux afin de conseiller les princes “à la lumière de l’expérience”, prenant
donc totalement le contre pied des utopies qui sont, elles, des expériences de
pensée, donc des hypothèses qui ne s’inspirent pas nécessairement des
données de l'observation mais qui puise sa source dans le raisonnement.
Il y
fait donc une allusion à la République de Platon, et les considère réellement
comme des imaginations inutiles car selon lui : “il y a si loin de la manière à
laquelle on vit à celle dont on devrait vivre, qu’en étudiant cette dernière on
apprend plutôt à se ruiner qu’à se conserver”.
Pour lui, en politique on ne doit
pas accorder une valeur aussi importante à l’imagination comme cela est fait
dans les utopies car ces derniers ne tiennent pas compte de la réalité de la
nature humaine qui ne sera jamais telle qu’on la conçoit dans son habit le
plus parfait car selon Machiavel “un homme de bien ne peut manquer de
périr au milieu de tant de méchants”.
Dans la même logique, Spinoza reproche aux philosophes un manque
de réalisme qui leur empêche d’analyser et de concevoir correctement la
politique, notamment par leur vision faussée de la nature humaine.
En effet
selon Spinoza : “les philosophes conçoivent les affections qui se livrent
bataille en nous comme des vices dans lesquels les hommes tombent par leur
faute, c’est pourquoi ils sont accoutumés à les déplorer, à les détester”.
Il
entend par là que l’homme en quelque sorte est foncièrement mauvais, et que
les passions c’est-à-dire l’ensemble des pulsions instinctives, émotionnelles
et primitives de l’être humain font partie intégrante de sa nature, il ne peut
lutter contre quelque chose qu’il subit.
Spinoza va jusqu'à écrire que les
philosophes “prodiguent toutes sortes de louanges à une nature humaine qui
n’existe nulle part, et flétrissant par leur discours celle qui existe réellement.
Ils conçoivent les hommes, en effet, non tels qu’ils sont, mais tels qu’eux
même voudraient qu’ils fussent”.
(Le mot passion vient du latin patior et
signifie “celui qui subit” ).
Ainsi, la nature humaine apparaît comme
réellement incompatible avec ce rêve des utopies qui selon lui “doivent être
tenues pour une Chimère, ou comme convenant soit au pays d’Utopie, soit à
l'âge d’or cad le temps heureux que l’on situe généralement au tout début de
l'humanité” où nulle institution n’était nécessaire”.
De ce point de vu, on comprend que le rêve utopique apparaît comme
un rêve irréalisable qui prônerait un retour en arrière sans prendre en compte
l’évolution de l’homme qui s’organise autour d’institutions qui se sont
construites au fil des siècle et que l’on ne pourrait balayer aussi simplement,
et qui aurait plutôt pour résultat l’anéantissement.
Pourtant ce n’est vraiment qu’au milieu du XIXe siècle que le mot
utopie commence à prendre un sens très péjoratif en désignant tout projet
politique ou social qui ne tiendrait pas compte de la réalité.
C’est là une
dévalorisation du terme à laquelle a contribué la pensée de Marx et d' Engels
qui a écrit un essai intitulé Socialisme utopique et socialisme scientifique.
Karl Marx a été le premier à utiliser le terme « utopie » de manière péjorative
dans sa critique des « socialistes utopiques » désignant par là l'ensemble des
doctrines des premiers socialistes européens du début du XIXe siècle (qui ont
précédé Marx et Engels), tels Robert Owen en Grande-Bretagne,
Saint-Simon, Charles Fourier, Étienne Cabet et Philippe Buchez en France.
(Proudhon, Fourier, Saint-Simon…).
Pour expliquer dans les grandes Le
socialisme utopique se caractérise par la volonté de mettre en place des
communautés idéales selon des modèles divers, certaines régies par des
règlements très contraignants, se caractérise surtout par sa méthode de
transformation de la société qui, dans l'ensemble, ne repose pas sur une
révolution politique, ni sur une action réformiste impulsée par l'État, mais sur
la création, par l'initiative de citoyens, d'une contre-société socialiste au sein
même du système capitaliste.
C'est la multiplication des communautés
socialistes qui doit progressivement remplacer la société capitaliste.
Karl
Marx et Engels qualifient leur propre théorie de socialisme scientifique, et
l'opposent justement au « socialisme utopique » qui n'aurait, selon eux, pas
de caractère méthodique et rigoureux dans l'analyse de la société capitaliste.
Selon Marx, l’utopie est la représentation imaginaire d’un régime politique
idéal et idéaliste, détaché de toute considération et compréhension des
circonstances matérielles qui pourraient présider à son avènement[5].
Nous
sommes plus proches de l’idéologie....
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