LES TROIS ORDRES CHEZ PASCAL
Publié le 04/04/2011
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Nous ne voulons pas proposer un nouveau classement des Pensées, mais pour ne pas trop morceler notre étude, nous tenterons de nous placer au centre même de l'œuvre, en étudiant une notion fondamentale de la philosophie pascalienne : la notion d'ordre. Dans cette intention nous allons d'abord définir cette expression, puis nous montrerons les conséquences qu'il est possible d'en tirer dans divers domaines. Le mot se trouve dans les Pensées avec quatre sens principaux : a) plan, organisation des différentes parties de l'ouvrage projeté : Ordre : les hommes ont mépris pour la religion ; ils en ont haine de peur qu'elle soit vraie. Pour guérir cela il faut commencer par... etc. (suit une esquisse de plan) (187);
«
qui établissent leur supériorité : les premiers par la force, les seconds par la raison, les troisièmes par l'agrément(c'est-à-dire par le consentement admiratif, l'approbation totale et immédiate de ceux qui les entourent) ;
et qui reçoivent en échange : le respect et la crainte, l'estime et la « créance » (c'est-à-dire le fait d'ajouter foi àleurs raisonnements); enfin l'amour,
# son «obstacle» qui risque de nous détourner de Dieu.
Il est vrai que cet obstacle est toujours le même : l'amourde soi, mais il prend, suivant les ordres, un visage différent :
la concupiscence (c'est-à-dire le désir de posséder des biens terrestres);
la curiosité (c'est-à-dire la recherche de la science pour le seul plaisir de savoir);
l'orgueil (332, 460).
b) Différence de nature : malgré l'identité de leur
structure, il est impossible d'apprécier leurs éléments au moyen d'une commune mesure, de même qu'il est impossibled'évaluer une surface en unités de poids ou un volume en unités de temps.
Un roi aura de nombreux soldats, il n'ensera pas pour autant bon mathématicien.
Un savant fera de remarquables découvertes, ce n'est pas ce qui fera delui un sage ou un saint.
Cette différence est rendue sensible de la manière suivante : les grandeurs de la chair sont visibles aux yeux, lesgrandeurs des esprits sont visibles aux yeux de l'esprit, les grandeurs de la charité sont visibles aux yeux de Dieu(793).
Chaque ordre forme donc un monde clos.
Il est impossible de passer d'un ordre à l'autre sans changer de nature : Detous les corps ensemble on ne saurait faire réussir une petite pensée, de tous les corps et esprits on ne saurait tirerun mouvement de vraie charité (793).
c) Hiérarchie : les corps sont inférieurs aux esprits et les esprits sont inférieurs à la charité, mais la distance descorps aux esprits est inférieure à la distance des esprits à la charité.
Les corps et les esprits ensemble forment l'ordre naturel; la charité est surnaturelle; c'est-à-dire que l'homme parson existence appartient à la « chair », par sa pensée aux « esprits » et cela naturellement.
Mais il ne saurait, sansla grâce, accéder à l'ordre de la charité.
Après avoir résumé ces notions dans le tableau suivant, nous étudierons plus en détail chacun des ordres.
TABLEAU DES TROIS ORDRES
Chair Esprit Charité
Objet : les corps les esprits la Justice
Visible... aux yeux des hommes aux yeux de l'esprit aux yeux de Dieu
C'est là quetriomphent... ...les rois, les riches... ...les savants; ex. Archimède... les « sages », lessaints; ex.
J.-Christ
Fondement del'autorité la force la pensée, la raison l'agrément
Devoirs rendus le respect fondé sur la crainte l'estime et la « créance » l'amour
Obstacles à laconnaissance de Dieu la
concupiscence
la « curiosité » l'orgueil
Ordre NATUREL SURNATUREL.
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