Les sens permettent-ils d'atteindre la réalité et d'accèder à la vérité ?
Publié le 01/09/2009
Extrait du document
Ce sujet interroge la possibilité d'appréhender la réalité des choses au moyen des sens. Percevoir une chose est-ce la connaître en elle-même ? En termes kantiens, les phénomènes nous font-ils connaître la chose en soi (ou noumène) ? Pour les empiristes, et plus tard, pour la phénoménologie, les informations que nous donnent les choses par l'entremise des sens constituent l'essence même de cette chose. Toutefois, peut-on se contenter du témoignage partiel et partial des sens ? Ne faut-il pas dire avec Bachelard, que les sensations sont autant d'obstacles épistémologiques à surmonter pour atteindre à la vérité scientifique ?
«
chez Hume dans son Traité de la nature de l'entendement à propos de la question des idées abstraites ou de la pseudo idée de vide : « J'ai peur qu'une telle entreprise (à savoir pénétrer la nature des corps) ne soit hors d'atteinte de l'entendement humain et que nous ne puissions jamais prétendre connaître les corps autrement quepar leurs propriétés extérieures.
Quant à ceux qui tentent d'aller plus loin, je ne peux pas approuver leur ambitionavant d'avoir vu, au moins dans un cas, qu'ils ont réussi ».
C'est ainsi que l'idée de vide apparaît au sein de ce Traité comme un cas exemplaire de ce que peut bien être une idée obscure, soit une idée dont on ne sait pas trop ce qu'elle représente, parce qu'on ne sait pas trop ce qui la cause.
Pour Hume, il est deux sources de confusionpour une idée : une confusion bénigne, due à la faiblesse de celle-ci qui la rend non distinguables d'autres idées, etune confusion autrement plus grave qui résulte de ce que la ressemblance des idées et doublée par celle del'attitude de l'esprit.
L'idée de vide est en effet représentative de ces idées que l'on confond avec d'autres : « Rien ne peut mieux nous faire confondre deux idées qu'une relation entre elles, qui les associe l'une à l'autre dansl'imagination et fait passer celle-ci avec facilité de l'une à l'autre ».
Or l'analyse philosophique vise à clarifier ces obscurités, ce qui suppose, comme nous l'avons vu de recontextualiser l'idée : « Je me contente de connaître parfaitement la manière dont les objets affectent mes sens, ainsi que les relations qu'ils ont entre eux, dans lamesure où mon expérience m'en informe.
Cela suffit pour la conduite de la vie, et cela suffit aussi à ma philosophie,qui prétend seulement expliquer la nature et les causes de nos perceptions, c'est-à-dire de nos impressions et denos idées ».
C'est dire que l'analyse de la pseudo-idée de vide n'a de sens qu'en tant que mise à l'épreuve de la thèse humienne relative à l'espace et au temps comme le laisse voir l'ouverture de la section : « Si la seconde partie de mon système est vraie, à savoir que l'idée d'espace ou d'étendue n'est rien d'autre que l'idée de pointsvisibles ou tangibles, distribués suivant un certain ordre, il s'ensuit que nous ne pouvons former une idée du vide, oud'un espace où il n'y a rien de visible ou de tangible ».
Transition :
Ainsi les sens sont-ils bien les sources premières voire uniques de nos connaissances.
Pourtant, peut-on réellementse fier aux sens ?
II – Sens et tromperie
a) Mais s'il faut douter non seulement de nos connaissances mais surtout de nos sens c'est qu'ils sont sourcesd'erreurs et de fausseté comme le cas du bâton brisé dans l'eau de la Dioptrique .
Si le doute comme méthode, tel que le propose Descartes dans les Méditations métaphysiques , manifeste l'œuvre de la raison notamment contre l'expérience sensible c'est que par ce dernier, l'esprit peut mettre de côté tout ce qui l'entoure et se retrouver seulavec lui-même.
L'esprit se libère de la coutume, des préjugés, des besoins du corps etc.
Cette liberté est doncessentiellement négative en tant qu'elle est destruction mais se transformera en positivité dès la suspension dudoute.
Le doute sera donc radical en tant qu'on examinera plus les choses elle-même, libération par rapport à lamatérialité – ce qui s'oppose par ailleurs à la spiritualité de l'esprit et constitue donc une double libération –, pour envenir uniquement aux principes des choses ; le savoir est attaqué sur sa base, à tous les niveaux, rien ne luiéchappe ; et c'est dans l'audace d'une telle entreprise, l'esprit affirme sa liberté : « Maintenant donc que mon espritest libre de tous soins, et que je me suis procuré un repos assuré dans une paisible solitude, je m'appliqueraisérieusement et avec liberté à détruire généralement toutes mes anciennes opinions […] mais parce que la ruine desfondements entraîne nécessairement avec soi tout le reste de l'édifice, je m'attaquerai d'abord aux principes surlesquels toutes mes anciennes opinions étaient appuyées ».
b) Or cette défiance face aux sens se marque très bien en astronomie ou plus exactement avec l'exemple deCopernic comme le met en exergue Nietzsche dans Par-delà bien et mal : « ce que l'on doit avant tout à ce Polonais, Boscovich, qui, avec le Polonais Copernic, fut jusqu'à présent le plus grand et le plus victorieux adversairede l'apparence sensible.
En effet, alors que Copernic nous a persuadés de croire, à l'encontre de tous nos sens quela terre n'est pas immobile, Boscovich a enseigné à abjurer la croyance au dernier bout de terre qui « demeuraitimmobile », la croyance à la « substance », à la « matière », à l'atome-résidu-de-terre et à l'atome-caillot : ce futle plus grand triomphe sur les que l'on ait remporté jusqu'à présent ».
Et c'est en ce sens que l'on peut relire avecDuhem dans Sauver les phénomènes l'ensemble de l'histoire de la cosmologie comme cette tentative désespérée de mettre en accord le perçu avec la vérité de la science.
c) Bien plus, pour Berkeley , si l'on ne peut se fier au sens c'est comme il le dit dans ses Principes de la connaissance humaine que La matière n'est que perçue ou n'existe pas.
Pour le démontrer, il s'agit pour lui derabattre les qualités première sur les qualités secondes et de montrer que les premières ne tirent pas moins que lessecondes toute leur substance de nos perceptions.
En effet, si les qualités secondes dépendent des premières,cette dépendance implique une communauté de nature entre ces qualités.
Impossibilité de les séparer dans notreconscience de l'objet.
Si l'on dépouille la perception d'un objet de tout ce que nous pouvons attribuer à nos sens, ilne reste rien qu'une idée abstraite, aussi abstraite que la notion indéterminée appelée matière première par lesaristotéliciens.
Si l'on prend l'exemple de l'unité et du nombre ; ils sont si évidemment dans l'esprit que les tenir pour.
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