Les principes de la raison peuvent-ils évoluer dans le temps ?
Publié le 19/09/2015
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b) Mais si l’homme est capable de former, à l'occasion d'expériences que font aussi les animaux, des principes dont ceux-ci se révèlent, incapables, c’est qu'il y a en lui un pouvoir qui lui est propre, la raison constituante. La raison constituante, elle, est immuable. Elle est innée en l’homme, partout et toujours identique à elle-même. Cette identité, nous ne la constatons que confusément, car il ne nous est pas donné d'observer la raison constituante à l’état pur : nous devons nous contenter de la conclure de la constance et de l'uniformité essentielles du comportement de l’esprit humain; mais les faits autorisent largement notre affirmation.
Ajoutons que les changements opérés par la raison constituante ne se font pas au hasard. Ils consistent dans un ajustement progressif de principes inadéquats, parce que fondés sur une expérience limitée et non sur les exigences absolues de la pensée où du réel. On peut donc se représenter, à la limite, une raison constituée ne débordant pas d’une ligne la raison constituante et se confondant avec elle, sauf qu’elle comporterait en plus la conscience réfléchie de ses lois. Alors la raison iserait arrivée à l'immutabilité parfaite.
«
Or, l'arma ture de cette activité et de ce savoir est oonstituée par les
principes de la raison : dans' les science·s mathématiques, dont l'objet n'est qu'une abstraction de l'esprit, n'intervient que le principe d'identité avec
ses dérivé~.
le principe de contradiction et le principe du tiers exclu;
dans les scienceH expérimentales qui cherchent à déterminer les lOis de 1a réalité concrète, comme d'ailleurs dans la pensée pratique complètement engagée dans le réel, les principes que nous venons d'énumérer restent toujours nécessaires pour assurer la omrection logique des opérations men taleH; mais le levier essentiel du progrè•s, de la découverte et de la preuve est le principe de raison suffisante qu'on invoque le plm s•ouvent s•ous une de ses formes dérivées, le principe de caus·alité et le principe de finalité.
Par suite, la valeur de nüs oonnais·sances dépenrl de la valeur de cette armature qui a contribué à leur acquisilion et Je,s a élaborées en un sy.s•tème cohérent.
Sans doute, il est théoriquement des connaissances intuitives qui, nous d·onnant l'objet avant toute élaboration rationnelle, présentent une valeur absolue '\[ais.
pratiquement, chez l'adulte, l'intuition pure n'est plu.s qu'un état limite auquel il est incapable rlc revenir : le savoir élaboré pm l'esprit 'se superpo·se c·onslammcnt au donné intuitif quand il ne se substitue pas h lui.
Aussi n'est-il pas exagéré de faire dépenclre la valeur de nos connaissances de la valeur des princ:pes.
Il est donc important de savoir si les.
principes de la raison .,ont immuables.
Cette immutabilité :"cule peut garantir la valeur de 1 'édifice
des sciences üomme aw:sj la légitimité de ruos certitudes.
1.
- La thèse : L'I:~rMUTABILITÉ.
(Conception classique.)
A la que.stion de l'immutabilité des principes de la raison, la philosophie cl&s,sique répond nettement par l'affirmative.
Pour elle, les principe.s de la raison s•ont la loi de toute pensée; par suite, il est contradictoire de conce
voir un esprit soumis à des principes différents.
Les principes ne changent donc pas avc•c l'âge mental, soit des indi vidus, eoit des peuples.
Sans doute, il est un niveau de développement
auquel la raison n'apparaît pas ou n'apparaît guère : la vie psychique s'explique alors totalement ou principalement par le jeu d·es associations.
Mais dès que la pen,sée prend le caractère rationnel, elle se conforme aux principes qui régis•sent l'activité intellectuelle de l'adulte oivilisé.
Il y a donc bien un progrès de la raison en ce ·sens que les homme,s,
à mesure qu'ils s'instruisent et se forment l'esprit, ·s'habituent à penser plus rationnellement et à éliminer de leurs jugementH les faeteur·s extra
ration!J1els qui les fau's,sen t.
iaiH ce progrès H 'effectue toujours dans le
même .sens et consiste dans 1 'extension à des domaine·s nouveaux de prin
cipes d'abord admiH dans la partie du réel la plus abée à connaître : c'est airusi que le principe de rais·on suffisante a été progres,sivement étendu du règne mi'llléral à celui du vivant, .puis à l'activité humaine, indivi
duelle ou collective, et même à de·s faits psychiques qui, comme les lapsus ou les rêves, semblent ne relever que du hasard; la tentative faite par E.
MEYERHON de ramener l'explication cau>Sale à l'explication par l'identité nous fournit un autre exemple du progrès de la rationalisation tel que
le concevait la philosüphie cla.ssique.
DISSERTATIONS PHILOSOPHIQUES.
- N° 133-IV.
10.
»
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