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Les logiques du XXe siècle Logique et mathématiques Logique et sciences de la nature Logique et phénoménologie

Publié le 18/11/2011

Extrait du document

Si l'on considère, à nouveau, le schéma que nous venons

de décrire, on s'aperçoit que, fmalement, la mathématique

ainsi formalisée ne se distingue guère, à la

complexité près, de la simple description d'une partie

d'échecs au moyen de la notation habituelle. Toutefois,

il y a loin d'une simple partie d'échecs à une science

qui, bien que pouvant être arbitrairement construite,

découvre ses applications dans les recoins les plus inattendus

de la physique et, dès lors trouve des applications

matérielles et pratiques. Si l'on pense au fait que,

nous l'avons souligné, la théorie des groupes, inventée

par Evariste GALOIS à la veille de sa mort, devait devenir

l'instrument le plus puissant de la physique moderne,

il est permis de se demander -comme, d'ailleurs,

bien des philosophes l'ont fait- comment il

peut se faire que ce qui semble, au premier abord, une

simple construction de l'esprit, et, précisément, un

simple jeu, puisse aboutir à une telle efficacité sur le

plan matériel.

« Nous sommes confrontés ici à une importante ques­ tion: il semble, en effet, que n'importe quel jeu soit susceptible de s'« incarner », en quelque sorte, dans une physique ,.

mais, pourtant , Bourbaki c tient » à une certaine part des mathématiques.

Et d'ailleurs, en ce sens, aussitôt que le traité a énuméré les signes d' une théorie , il s'empresse d'annoncer que, dans la théorie des ensembles -qui constitue l'infrastructure de la mathématique telle qu'elle est ainsi décrite- ces si­ gnes sont de telle nature .

Nous ne saurions épiloguer plus avant dans un débat encore ouvert, mais il semble qu'une sorte d'équilibre tende à s 'établir entre un jeu de l'esprit susceptible de se projeter dans le monde, et un monde en quelque sorte c attiré » par de tels jeux de l'esprit .

Formalisme et naïveté Il est clair qu'à la limite il est possible d'aboutir à l'application stricte d'une règle donnée, exactement comme au jeu d'échecs .

Toutefois, qu'en est-il de la manière dont on enseigne les mathématiques dites « modernes » aux jeunes enfants des écoles ? On constate, à cet égard, un hiatus entre des règles « formelles » automatiquement apprises et leur applica ­ tion à ces modes de calcul courants .

Nous retrouvons ici l'ancien symbolisme chinois du Yin et du Yang: l'enfant, en effet, habitué au jeu, se trouve à l'aise dans un formalisme qui lui est décrit comme tel et qui, en fait, n'est bien qu'un jeu ; c'est ainsi qu'il est à même de manipuler magistralement les relations d'équivalence (il vérifiera qu'une relation R est ré­ flexive, symétrique et transitive), mais sans saisir le fait ,que chaque fois qu'il emploie le mot c même » : les ob­ jets ont la même couleur, tous les enfants sont dans la même classe, ...

il utilise une relation d'équivalence ; autrement dit, il isole une règle du jeu qu' il parvient à manipuler magistralement de la notion naïve qui lui est sous-jacente ; de l'autre côté, un enfant qui reçoit un enseignement selon les méthodes traditionnelles saura faire toutes les opérations sur les fractions , sans pour autant s'imaginer qu'il manipule le corps des nombres rationnels muni de l'addition et de la multi­ plication.

On constate -et, en particulier, dans l'enseigne­ ment- une véritable transcendance entre ces deux ni­ veaux du formalisme et de la naïveté : la maitrise -formelle- de la règle du jeu ignore ce qu'elle ca­ che ; la maitrise- réelle- du calcul ignore la struc­ ture qui le définit.

Nous avons déjà à plusieurs reprises remarqué le fait que les épistémologistes n'avaient tenu compte , en fait, que des deux niveaux physique et eidétique: on se .contente , d'une part de quantifier et d'informer; d'au ­ tre part, que de régionaliser et de· formaliser.

L'enfant qui calcule sur les fractions se trouve au niveau physi­ que : il réduit au même dénominateur, multiplie par l'autre fraction renversée, bref, applique des recettes qui lui permettront, à ce niveau , de trouver une· cer­ taine quantité d'information (un pourcentage par exemple) susceptible de lui être de quelque utilité.

Le mathématicien, au contraire, et même, dans une cer­ taine mesure, l'enfant accoutumé aux mathématiques c modernes », va formaliser des essences : il ne s'agit plus de fractions, mais de nombres ratioimels défmis au moyen d'un procédé complexe où interviendront les relations formelles d'ordre et d'équivalence.

Ce qui manque, en fait, dans ces conditions, ce sont les deux niveaux de la technique et de la phénoméno­ logie : le calcul des fractions devient isolé de son contexte utilitaire (calcul de pourcentages, par exem­ ple) et élaborationnel (résoudre un problème « par l'arithmétique » ); de même, l'imagination fait défaut: on ne sait plus réduire un problème à ses éléments les plus simples: trouver c ce qui se passe », ni en consti­ tuer la solution : c qu'est-ce qui se passerait si...

? ».

Seule la restitution du Moi est susceptible de procé­ der à la réunion de tous les niveaux.

C'est ce que nous verrons dans la dernière partie de cette étude .

Toujpurs est-il que subsiste le problème du hiatus entre langage formalisé et langage naïf.

Il prendra une forme aiguë quand il ~·agira de parler logiquement de la logique.

C'est à GÔDEL que nous devons la solu­ tion de ce problème .

Gëdel et la métamathématique La métamathématique -son nom l'indique- se si­ tue au-delà de la mathématique , ce qui signifie qu'elle vise au moyen du raisonnement à rendre compte du raisonnement mathématique .

On aura une idée des problèmes soulevés par cette question en considérant le fait que, par exemple , avant toute définition rigoureuse des nombres entiers, il faut énumérer -c'est-à-dire , finalement, compter- cer­ tains «ensembles » : certes, on pourrait imaginer une construction purement formelle de la mathématique, dont seul le constructeur pourrait avoir une idée pré­ cise.

Mais il n'empêche qu'un tel constructeur se ver­ rait contraint d'énumérer, de mettre des symboles les uns à la suite des autres, avant même d'avoir défini les notions d'ordre et de nombre entier.

Comme nous l'avons souligné, le problème fonda­ mental qui se pose en l'occurrence est celui du traite­ ment logique de la logique.

Comment, en effet, parler de logique en termes de logique ? Si, par exemple , je raisonne sur un syllogisme en disant : c Tout syllo­ gisme possède telle propriété, or cette proposition pos­ sède cette propriété, donc cette proposition est un syl­ logisme , je raisonne en termes de syllogistique sur un syllogisme, en sorte qu'il y a là une sorte de pétition de principe.

Gode!, dans l'approche du théorème qui l'a rendu célèbre, et qui a trait au problème de l'indécidabilitê (une proposition peut être vraie , fausse ou indécidable), a résolu ce problème d'ordre métamathématique .

C'est ainsi que Kleene écrit dans sa Logique mathématique (éditions Armand Colin, collection « U », trad.

Jean Largeault) ; c La solution de ce paradoxe est simple quoiqu'il faille du temps pour bien voir comment elle se matérialise.

Nous plaçons la logique que nous étu­ dions dans une boîte et celle que nous utilisons dans cette étude dans une autre boîte.

Au lieu de boîtes, nous pouvons parler de ' langages 1.

Quand nous étu­ dions la logique, la logique que nous étudions appa,..

tiendra à une langue dite langage objet parce que cette. »

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